À Mexico, mobilisation et solidarité après le séisme qui a fait plusieurs centaines de victimes (Le Monde)

À l’aide de pioches, de pelles et de cordes, des centaines d’habitants se sont joints aux sauveteurs pour tenter de déblayer les décombres dans le centre et le sud de la capitale. L’ambiance était au chaos dans les rues de Mexico, violemment touchée, mardi 19 septembre, par un séisme de magnitude 7,1 sur l’échelle de Richter. Le bilan s’annonce très grave. Mercredi matin, il s’élevait à au moins 217 morts dans cinq États, dans celui de Mexico et de Morelos particulièrement touchés, mais aussi de Puebla et de Guerrero. Le décompte s’alourdit d’heure en heure, il atteint au moins une cinquantaine de morts dans la capitale. Selon les estimations du gouvernement, des centaines de municipalités seraient affectées dans le centre du pays.

À Mexico, la solidarité règne, les habitants se mobilisent pour aider les secours. A l’aide de pioches, de pelles et de cordes, des centaines d’entre eux se sont spontanément joints aux sauveteurs – les « Topos », du nom de la brigade spécialisée dans la recherche de victimes ou de survivants dans les décombres après les tremblements de terre – pour tenter de déblayer les décombres des immeubles ravagés dans le centre et le sud de la capitale. « Silence ! », crie un des secouristes, pour parvenir à écouter la voix d’un possible survivant sous les débris d’un édifice de cinq étages écroulé.

« Le cauchemar recommence »

Mardi à 13 h 14 (20 h 14 en France), les alertes sismiques ont retenti dans la ville quelques secondes avant la première secousse. La panique a alors gagné les vingt millions d’habitants de Mexico, qui se sont précipités hors de leurs bureaux ou de leurs voitures. L’épicentre du séisme a été localisé à 51 km de profondeur près des villes d’Axochiapán, dans l’État de Morelos (centre), et de Chiautla, dans celui voisin de Puebla, situées à 120 km de la capitale. « J’ai juste eu le temps de prendre un pantalon », soupire un sinistré couvert de poussière dans une rue de Mexico. De nombreux autres n’ont pas eu sa chance.

« Nous avons besoin de lampes de poche ! », s’exclame un sauveteur alors que la nuit plonge les rues dans la pénombre. « Des enfants sont toujours bloqués sous les décombres », s’alarme une femme quinquagénaire aux abords d’une école primaire et secondaire qui compte 400 élèves dans le sud de la mégalopole. L’effondrement de son bâtiment a fait 22 morts, dont 21 élèves, 38 sont toujours portés disparus. La foule, qui observe avec anxiété les 500 militaires et 200 agents de la protection civile qui s’agitent sans relâche dans les gravats de l’établissement, applaudit quand des soldats sortent des ruines une civière transportant un enfant vivant.

À quelques mètres de là, un militaire tente de réguler la circulation. « Les embouteillages monstres, provoqués par des pannes de feux rouges et des routes barrées par les débris, ralentissent les secours », déplore-t-il. Trois mille soldats ont été déployés dans la capitale pour prêter main-forte aux 25 000 pompiers, policiers et membres de la protection civile mobilisés.

Dans le quartier de la Condesa, Rosita Ramos, 63 ans, soupire devant une voiture écrasée par une chute de pierres : « Le cauchemar recommence trente-deux ans plus tard ! » La catastrophe est en effet survenue le jour de la commémoration du tremblement de terre de 1985, qui avait fait plus de 10 000 morts. Deux heures avant la première secousse, une simulation de séisme avait d’ailleurs été organisée par la mairie. Et le sud du pays a déjà été frappé, le 7 septembre, par un autre tremblement de terre d’une magnitude de 8,2, ressenti jusqu’à la capitale, causant la mort d’au moins 98 personnes. Ce séisme-là, le plus puissant depuis un siècle, était encore plus intense que celui de mardi. Pourtant, le bilan à Mexico est bien plus lourd aujourd’hui. « La proximité de l’épicentre, à 120 km de la capitale, explique l’ampleur des ravages. Celui qui est survenu il y a douze jours était à 700 km », souligne Xyoli Pérez, à la tête du Système sismologique national (SSN). Mardi, le maire de Mexico, Miguel Angel Mancera, a déclaré l’État d’urgence. Les écoles et les universités ont immédiatement fermé dans neuf États et la capitale. L’aéroport de Mexico a aussi suspendu ses activités. Mercredi matin, 40 % des habitants de Mexico et 60 % de ceux de l’État de Morelos étaient privés d’électricité.

Crainte de répliques

Mobilisation dans les rues de Mexico, mardi 19 septembre, après le séisme de magnitude 7,1 qui a touché la capitale mexicaine et fait au moins de 216 morts. Miguel Tovar / AP

« N’allumez pas de cigarette ! », crient les sauveteurs aux passants, amassés devant un bâtiment ravagé, par crainte des fuites de gaz dans le quartier très affecté de la Roma, dans le centre de Mexico. Deux incendies ont provoqué d’immenses colonnes de fumée avant d’être contrôlés par les pompiers. Dans la nuit de mardi à mercredi, de nombreux habitants restaient prostrés dans les rues par peur de retourner dans leurs immeubles fissurés. D’autres continuaient de former des chaînes humaines pour évacuer les gravats avec des seaux aux côtés des sauveteurs.

Le président, Enrique Peña Nieto, en déplacement dans l’État d’Oaxaca (sud-ouest), violemment touché par le séisme du 7 septembre, est immédiatement rentré à Mexico à l’annonce du séisme. A bord d’un hélicoptère, il a survolé la ville pour évaluer les dégâts et coordonner les secours. « C’est une nouvelle épreuve pour notre pays », a déclaré dans la soirée le chef de l’État, qui a loué « la solidarité » dont font preuve ses concitoyens, appelant les sinistrés à se rendre dans les refuges ouverts dans les régions affectées.

Quelques heures plus tôt, la mairie de Mexico annonçait l’ouverture d’une vingtaine de centres de collectes de l’aide humanitaire. « Nous avons besoin d’eau et de médicaments pour les victimes, mais aussi de masques et de gants pour les volontaires », explique un sauveteur, dont la voix est vite couverte par les sirènes de deux ambulances. Comme lui, de nombreux Mexicains craignent les répliques du séisme. Une quinzaine se sont déjà fait sentir, dont une de magnitude 4, risquant de faire d’autres victimes dans les prochaines heures

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Frédéric Saliba 

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