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Au Brésil, Jair Bolsonaro ravive la mémoire encore sensible de la dictature (Pierre Le Duff/ France 24)

Les victimes de la dictature brésilienne et ceux qui s’emploient à établir la vérité sur les crimes de la junte s’insurgent contre les récentes décisions et paroles du président Jair Bolsonaro, accusé de vouloir réécrire l’Histoire.

Le président brésilien Jair Bolsonaro assiste à la relève de la garde au palais du Planalto, à Brasilia, le 31 juillet 2019. (Evaristo Sa, AFP)

Il n’en finit pas de faire l’apologie de la dictature militaire. Et tente d’imposer sa vision au Brésil. Début août, Jair Bolsonaro, président au pouvoir depuis le 1er janvier dernier, a changé quatre des sept membres de la Commission spéciale des morts et disparus politiques, chargée depuis 1995 d’identifier les victimes de la junte et de les indemniser.

Parmi les entrants, des militaires et des membres de sa formation, le Parti social-libéral (PSL). Le nouveau président de la commission n’a aucune expérience particulière dans le domaine de la recherche des disparus.

Pour l’avocate Rosa Cardoso, qui faisait partie de la commission jusqu’en 2016, les nouveaux membres “ne croient pas eux-mêmes en l’idée d’une justice de transition”, qui reconnaît aux proches de victimes le droit de connaître la vérité. “C’est comme si le Musée de l’Holocauste passait sous la gestion de l’extrême droite allemande”, ose de son côté Paulo Pimenta, député du Parti des travailleurs (PT), qui vient d’être remplacé au sein de la commission par un membre du PSL.

434 morts et disparus, un chiffre trompeur

La dictature militaire brésilienne a duré 21 ans, de 1964 à 1985. Dans la région, c’est le régime autoritaire qui a duré le plus longtemps, mais c’est aussi celui qui a fait le moins de victimes : 434 morts et disparus, d’après les travaux de la Commission nationale de la vérité, contre plus de 3 200 sous la dictature chilienne (là aussi selon différentes commissions de la vérité) et plus de 30 000 pendant le régime militaire argentin.

Mais ce chiffre de 434 morts et disparus est trompeur. Le rapport final de la Commission nationale de la vérité estime que les politiques des gouvernements militaires successifs ont aussi entraîné la mort d’au moins 8 500 Indiens. La répression est féroce, notamment pendant les “années de plomb”, entre décembre 1968 – quand la Constitution et la plupart des libertés individuelles sont suspendues et le Congrès est dissous – et 1975. On estime qu’au moins 20 000 Brésiliens ont été victimes de torture, entre les mains des agents de la police secrète.

Il faudra ensuite attendre 2011 pour que la Commission nationale de la vérité soit créée – plus de 25 ans après la fin du régime militaire – par la présidente Dilma Rousseff, elle-même une ex-guérillera d’extrême gauche, torturée et emprisonnée par l’appareil répressif du régime (…)

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