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Chili. Caimanes : Injustice, poussière et méga-mines (Elif Karakartal / article publié par Nuestra República et traduit par FAL 33)

Un nouvel épisode de la « série » de violations des droits de l’homme commises par l’entreprise Minera Los Pelambres – MLP, qui génère cent millions de dollars de bénéfices nets par mois, appartient au groupe Luksic, l’une des cent plus grandes fortunes du monde…

En pleine pandémie de Covid-19, une grave pollution affecte la qualité de l’air respiré dans les Caïmans (4e région du Chili), mettant en danger la santé de ses habitants. Ce n’est pas la première fois que les opérations minières dans la région génèrent de graves impacts environnementaux dans la vallée. Cela nous amène à repenser les actions et les réponses des acteurs d’un conflit qui dure depuis de nombreuses années.

L’air des mines

Depuis les premiers jours de mai, un étrange brouillard survole la communauté de Caimanes. Les habitants de la communauté ont immédiatement détecté qu’il s’agissait d’une poussière provenant des résidus émis par  la zone appelée Tranque del Mauro, située à 8 km au-dessus.  Les stériles miniers,  maillon faible du processus d’extraction, se présentent sous la forme d’une fine poussière contenant du mercure, de l’arsenic, du manganèse et de nombreux autres métaux lourds. Le nuage toxique se répand dans la vallée et dépose ses fines particules sur le sol, les maisons et les personnes.

Un nouvel épisode de la « série » de violations des droits de l’homme commises par la Minera Los Pelambres (MLP) dans le village de Caimanes. En 2008, la compagnie minière a installé, contre la volonté de la grande majorité, le troisième plus grand barrage de résidus au monde.  Après « les eaux volées », dont la disparition a été attribuée à la MLP par la Cour suprême du Chili le 21 octobre 2014, après le danger d’effondrement du barrage reconnu par la même cour la même année, un nouveau drame touche la communauté.

Une pollution atmosphérique visible qui est censée affecter les voies respiratoires et les poumons des personnes qui vivent là, précisément au moment où la contingence nationale se concentre sur la pandémie de Covid-19, qui provoque également des insuffisances respiratoires.

À Caimanes, pendant des années, la plupart des gens refusent de consommer de l’eau potable parce qu’il a été démontré qu’il y avait une possible contamination par les métaux lourds, tout en vivant sous le risque de l’effondrement de l’ouvrage géant de 300 mètres de haut qui pourrait mettre fin à la vie des villageois en quelques minutes et aujourd’hui, le simple fait de respirer l’air deviendrait également un risque. Cette fois, la compagnie a omis d’informer les habitants de la fuite de la fumée toxique.

Ce sont les villageois eux- mêmes qui ont révélé ce fait et l’ont dénoncé. Lorsque la société a été avertie que l’incident du nuage toxique commençait à être connu, la MLP a reconnu le fait mais a blâmé le vent et la sécheresse. En effet, le manque d’eau et les courants d’air ont soufflé les fines particules du barrage dans la vallée. Mais va-t-on rendre responsables les éléments de la nature de l’accident environnemental et non le dépôt à l’air libre de 2 milliards de tonnes de résidus ? C’est l’argument que l’entreprise minière a tenté d’imposer, comme pour donner une explication quasi « naturelle » à un événement de pollution grave, dont l’origine dépend de sa production minière. Comment comprendre qu’une entreprise de cette taille, appartenant à l’un des groupes économiques les plus importants du pays, soit si peu soucieuse de la vie humaine ?

Où la richesse (de certains) génère fumée et pauvreté pour beaucoup

MLP génère en bénéfices nets cent millions de dollars par mois, appartient au groupe Luksic, l’une des 100 plus grandes fortunes du monde et fait partie du consortium Antofagasta Minerals, qui est coté à la bourse de Londres où cette multinationale a choisi son domicile.  Alors qu’à Londres, devant les actionnaires internationaux, les chiffres des bénéfices s’envolent, à Caimanes, la digue de retenue des résidus a généré beaucoup de « pauvreté », pauvreté en termes de destruction environnementale et humaine et parce qu’elle a également ruiné l’économie locale. Le manque d’eau a détruit la rivière, les affluents et par conséquent la plupart des activités économiques traditionnelles de la vallée.

La menace que le barrage s’effondre et enterre toute la vallée est une source d’inquiétude constante. L’intrusion de la MLP dans le village a provoqué des divisions et des haines. Les faits ont été largement dénoncés et la plupart d’entre eux ont été reconnus par la justice chilienne.  Aujourd’hui, l’entreprise est à nouveau jugée pour avoir mis en danger la santé de la population et violé les droits de l’homme garantis par la Constitution chilienne. Mais selon la compagnie minière, les événements « naturels » seraient causés par accident. Jusqu’où les activités extractives minières peuvent-elles aller, affectant la vie des êtres humains et l’environnement des territoires ? Jusqu’où leurs impacts sont-ils ignorés ? Quelle sera la limite de ce qui est acceptable? (…)

(…) Lire la suite de l’article ici 

Elif Karakartal est réalisatrice de documentaires et Master en Anthropologie. Elle a été témoin et a fait un rapport sur le conflit de Caimanes entre 2012 et 2016 en tant qu’observatrice internationale pour la Fondation Danielle Mitterrand.

https://nuestrarepublica.org / Traduction FAL 33

Leer en español Caimanes: injusticia, polvo y megaminería