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Haiti: le scandale du-siècle (Frédéric Thomas/ CETRI)

Si la dégradation de la situation socio-économique, déjà très précaire, est le terreau des mobilisations sociales qui secouent Haïti, le scandale PetroCaribe en est le catalyseur. Il nous semble important d’offrir une analyse synthétique et vulgarisée des causes de la crise actuelle. 

Première partie. Le dossier Petrocaribe

Petrocaribe est un accord de coopération énergétique, lancé en juin 2005, par Hugo Chávez, alors président vénézuélien. L’accord, qui s’inscrit dans la stratégie d’intégration régionale du Venezuela, est conclu avec une quinzaine de pays d’Amérique centrale et des Caraïbes. Concrètement, ces États bénéficient de la livraison de pétrole à des tarifs préférentiels, et avec des facilités de payements (en termes de délais notamment).


Photo : Jean Nehemy Pierre (Wikimedia Commons)

Haïti, signataire de cet accord, reçoit sa première livraison début 2008. Le Bureau de gestion des Programmes d’aide au développement (BMPAD) est alors créé, pour gérer le fonds Petrocaribe (il est également responsable de la mise en œuvre de deux projets). Il s’agit d’une institution publique, sous la tutelle du Ministère de l’économie et des finances (MEF), et dont le Conseil d’administration est composé de six ministres et du gouverneur de la Banque de la République d’Haïti [1]. .

Le BMPAD a acheté le pétrole du Venezuela et l’a revendu aux compagnies haïtiennes locales. Les bénéfices devaient servir pour financer des projets sociaux et de développement. En juin 2018, le Venezuela, au vu de ses propres difficultés, a suspendu l’accord avec une série de pays, dont Haïti [2]. (…)

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Deuxième partie. Corruption et politique néolibérale

Plus encore peut-être que la corruption elle-même, ce qui choque – et exacerbe la colère de la population haïtienne – dans le dossier PetroCaribe, c’est l’arrogance de cette « élite », qui a détourné des centaines de millions de dollars. Sûre de son impunité, cette clique au pouvoir n’a eu de cesse de s’enrichir, multipliant les plans, stratégies et promesses. Comment ne pas lire au revers du spectacle qu’elle donne le mépris du peuple haïtien ?


Photo : Jean Nehemy Pierre (Wikimedia Commons)

« Plus c’est gros, plus ça passe ». Telle semble avoir été la logique mise en œuvre. Avec, à tous les niveaux des projets et à tous les étages du pouvoir, une confusion délibérée, entretenue et organisée. Confusion sur les montants payés (qui diffèrent des contrats, et ceux-ci des résolutions autorisant ces contrats), sur la monnaie utilisée (gourdes ou dollars), sur la phase d’exécution des projets, sur les taux de change – qui allaient de 70 à 107 gourdes pour un dollar, alors que le taux de référence de la Banque de la République d’Haïti était de 65 [1] –, etc. Pour tenter d’y voir plus clair, revenons sur quelques exemples symptomatiques et interrogeons la dynamique de cette corruption à grande échelle (…)

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Troisième partie. Le sens de la révolte

L’étonnant n’est pas la colère actuelle, mais qu’elle ne soit pas arrivée plus tôt. Les manifestations de masse de début février et le blocage de toutes les activités – le « pays lock » – trouvent leur origine immédiate dans un mouvement initié en août 2018. Sur twitter, un homme aux yeux bandés brandit une pancarte en carton sur laquelle est écrit : « Kot Kòb Petwo Karibe ?  » [Où est l’argent de PetroCaribe ?]. L’homme en question est Gilbert Mirambeau JR., un cinéaste et écrivain haïtien résidant au Canada. Le message va déclencher une campagne dans les médias sociaux, avant de rebondir dans une première manifestation de rue le 17 octobre [1].


Photo : Jean Nehemy Pierre (Wikimedia Commons)

Le mouvement #PetroCaribeChallenge est né. Il rassemble nombre de jeunes Haïtiens, qui en ont assez, et exigent des institutions nationales de rendre compte de ce qui a été fait de l’argent de PetroCaribe. C’est sous sa pression que la Cour supérieure des comptes et du contentieux administratif (CSCCA) a publié l’audit concernant la gestion du fonds PetroCaribe. L’origine, la dynamique, les revendications et l’importance de la jeunesse dans ces mobilisations ne sont pas sans rappeler le « printemps arabe  » et son « Dégage ! » [2] (…)

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