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Les enjeux de l’élection d’Ivan Duque à la tête de la Colombie: le point de vue de Christophe Ventura (Institut de Relations Internationales et Stratégiques/ IRIS)

Au terme d’un second tour inédit entre Ivan Duque, candidat du Centre Démocratique (droite), et Gustavo Petro, premier candidat de gauche à parvenir aussi loin dans une élection présidentielle, Ivan Duque l’a remporté. Le nouveau président souhaite modifier l’accord de paix avec les Forces Armées Révolutionnaires de Colombie (FARC) et durcir le ton avec le Venezuela, laissant incertaine la stabilité de la région. Pour nous éclairer sur la situation, le point de vue de Christophe Ventura, chercheur à l’IRIS.

Que signifie la victoire d’Ivan Duque à la tête de la Colombie ? Quels sont les défis qui l’attendent sur la scène intérieure ?

La victoire du candidat Ivan Duque (Centre démocratique) avec 54% des voix – scénario attendu -, est un tournant important pour la Colombie, et cela pour plusieurs raisons. Le jeune candidat de la droite conservatrice colombienne est aujourd’hui un des représentants de l’ancien président Alvaro Uribe (2002-2010), sénateur le mieux élu du pays lors des dernières élections qui a rompu avec son ancien « poulain » Juan Manuel Santos (président de 2010 à aujourd’hui) sur le dossier des FARC. Sur le plan intérieur, la feuille de route va être assez classique pour un parti de droite. M. Duque se veut l’homme d’un libéralisme affirmé sur le plan économique. Il a bâti son programme sur une proposition d’abaissement de la fiscalité des entreprises ainsi que sur une libéralisation accrue de l’économie afin d’attirer les investisseurs internationaux dans le but de financer la croissance locale et de développer l’exploitation des ressources naturelles dont est richement dotée la Colombie. Sur le plan politique, le nouveau président a construit un programme essentiellement basé sur un durcissement des positions de l’État colombien dans la négociation avec l’Armée de libération nationale (ELN), qui est la seconde guérilla avec laquelle le gouvernement est actuellement en discussion, mais surtout avec les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC). Il promet également une lutte acharnée contre la corruption et une réforme de la justice.

Le nouveau président souhaite modifier l’accord conclu avec les Forces Armées Révolutionnaires de Colombie. Peut-il remettre en cause l’accord de La Havane établi avec les FARC, aujourd’hui transformées en parti politique légal ?

Cette élection suscite de grandes incertitudes sur l’accord de paix conclu avec les FARC. Ivan Duque a été un fervent opposant, aux côtés d’Alvaro Uribe, au processus de négociation de l’accord de paix. En effet, il a mené la campagne du « non » au referendum du 2 octobre 2016 qui visait à valider par une consultation populaire l’accord négocié. Toutefois, aujourd’hui, il dit ne pas souhaiter rompre l’accord, mais se positionne plutôt comme un Donald Trump, c’est-à-dire qu’il veut le récrire plus durement. Il a ainsi indiqué qu’il ne voulait pas « déchiqueter » l’accord mais procéder à des « corrections ». Il souhaite ainsi durcir le sort judiciaire et le statut politique des membres et dirigeants des FARC. Ivan Duque refuse entre autres de les voir au Congrès, ce que prévoit l’accord. Les FARC – désormais transformées en parti politique légal : Force Alternative Révolutionnaire du Commun (FARC) – ont fait savoir par le biais d’une déclaration au soir du résultat qu’elles étaient prêtes à rencontrer le nouveau président élu pour lui exposer leur position sur la mise en place de l’accord. Et de rappeler que si l’accord était remis en cause, le pays glisserait immanquablement vers un nouveau cycle de violences.

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