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EDITORIAL

                          1973-2013 : de l’ombre à la lumière ?
Quatre décennies après la vague de putschs militaires qui se sont abattus sur le sous-
continent latino-américain et dont les plus connus, parmi bien d’autres, sont ceux de
l’Uruguay et du Chili en 1973, puis de l’Argentine en 1976, un regard rétrospectif criti-
que sur cette époque nous semble nécessaire.
Il n’aura échappé à personne que, depuis quarante ans, les choses ont beaucoup chan-
gé en Amérique latine et dans le monde. Plus de Guerre Froide, fin du Socialisme réel,
montée des intégrismes, progrès extraordinaires en matière de communication et de
transports, mondialisation de l’économie et de la finance pour ne citer que les plus vi-
sibles.
En ce qui concerne l’Amérique latine, fin de l’hégémonie absolue des Etats-Unis, scè-
nes politiques aux acteurs civils et non plus militaires, émergence des nations origi-
naires, apparition de nouvelles formes d’organisation et de lutte des peuples. En effet,
sur ce continent, la période post Guerre Froide se caractérise par l’apparition de vastes
mouvements citoyens qui inventent des méthodes et ont des structures inédites. Il n’en
demeure pas moins que les attentes et les aspirations de ces nations et de leurs popu-
lations restent intactes : plus de justice et d’égalité sociale, une meilleure distribution
des richesses, la sauvegarde des ressources naturelles, autant de nécessités ajournées
ou simplement étouffées par les gouvernements dictatoriaux issus des Coups d’Etat
encouragés et financés par les Etats-Unis.
Une fois le système démocratique formel rétabli, les partis traditionnels se sont mon-
trés absolument impuissants et incapables de répondre aux aspirations des peuples.
Embourbés dans des alliances improbables entre les classes dominantes – parfois avec
la participation épisodique d’autres secteurs de la société servant de faire-valoir – leurs
administrations étaient destinées essentiellement à perpétuer prébendes et corrup-
tion. Ainsi, ce qui devait arriver est arrivé : l’implosion du système et l’invention de nou-
velles formes d’organisation citoyenne. Les mêmes qui ont failli à trouver les solutions
dont les peuples avaient besoin sont ceux qui aujourd’hui crient à la démagogie et au
populisme. Ces deux mots, inventés par les classes dominantes en mal de pouvoir, sont
répétés par les medias internationaux ignorants des réalités latino-américaines.
Quarante ans après tant d’espoirs perdus et tant de violences subies, les peuples latino-
américains se sont remis à l’ouvrage : la recherche du progrès pour tous, la quête perma-
nente d’égalité et l’élaboration de nouvelles formes de participation qui soient capables
de dépasser le simple énoncé de la théorie démocratique.
Notre mission en tant qu’associations de solidarité doit consister à faire connaître les
véritables enjeux auxquels est confrontée l’Amérique latine et à accompagner les luttes
de ses peuples.

                                                                                         Ricardo Parvex
 Membre du Bureau de l’Association d’Ex-prisonniers politiques chiliens - France (AEXPPCH)
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