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À l'occasion de la Journée mondiale de la Terre (22 avril 2016),
                                                                   manifestation paysanne à Nacaome (département de Valle).
                                                                   Photo : Hélène Roux.

                                                                     sociales  et ONG  qui soutiennent  l’initiative
                                                                     semblent disposées à s’adapter à certaines règles
                                                                     institutionnelles plutôt que de se priver d’un
                                                                     levier efficace pour faire peser la balance en leur
                                                                     faveur. Le président Juan Orlando Hernández ne
                                                                     s’y est d’ailleurs pas trompé et, lors de son dernier
                                                                     voyage à  Washington, a affiché sa «  surprise  de
                                                                     constater que […] l’information qui parvient aux
                                                                     congressistes et aux sénateurs, provient souvent de
                                                                     Honduriens qui tergiversent la vérité, et continuent
                                                                     de  le  faire  sachant  que  cela  nuit  énormément  au
                                                                     Honduras⁵. »

                                                                     Face au cynisme de la classe politique et de
                                                                     l’oligarchie locale, le recours à la dénonciation
                                                                     et la recherche d’appuis internationaux – même
                                                                     si elle est soumise à des contraintes d’ordre
                                                                     institutionnel – ont au moins le mérite de battre
       Photo : Hélène Roux.                                          en brèche une stratégie gouvernementale qui
                                                                     se fonde uniquement sur la militarisation du
                                                                     territoire et sur la judiciarisation de la violence,


                                                                     structurelles. La situation dans la région de l’Aguán
                  La culture de l’amnésie élevée au rang de          évitant ainsi soigneusement d’en traiter les causes      Photo : Nivando Bezerra.
                  politique d’État est cependant de plus en plus     illustre de façon emblématique cette confusion
                  mise à mal au niveau international. Le 21 juin,    des genres. L’absence de volonté politique pour
                  dans le quotidien  The Guardian⁴, un lieutenant    résoudre le conflit agraire qui, depuis de longues
                  déserteur de l’armée hondurienne affirmait que     années, oppose  grands  propriétaires  terriens  et
                  le nom de Berta Cáceres figurait sur une liste     organisations paysannes, a conduit à un processus
                  d’opposants à éliminer, distribuée aux membres     de décomposition de ces dernières et d’infiltration
                  des corps d’élite de l’armée. Parallèlement, aux   par des éléments liés à l’armée mais également
                  États-Unis, cinq congressistes du Parti démocrate   au  crime  organisé.  Même  s’ils  ont  légèrement
                  présentaient le projet de loi «  Berta  Cáceres »,   diminué, les crimes et les menaces contre les
                  visant à « suspendre la coopération militaire et l’aide   paysans  organisés  continuent sans  que  l’unité
                  en matière de sécurité […] jusqu’à ce que cessent les   spéciale (UMVIBA )⁶, créée en 2014, pour enquêter
                  atteintes aux droits humains commises par les forces   sur les morts violentes dans le Bas Aguán,
                  de sécurité honduriennes et que les responsables   parvienne, faute de moyens, à en déterminer les
                  soient  traduits en  justice  ».  Sur  le  principe,  on   responsables.
                  pourrait y voir une énième tentative du grand
                  voisin du Nord de souffler le chaud et le froid dans                                 Hélène ROUX
                  son pré carré, voire taxer la démarche d’hypocrite,                                     Journaliste
                  alors même que l’ambassadrice étasunienne
                  affirmait récemment que «  les relations avec le   ⁴ https://www.theguardian.com/world/2016/jun/21/berta-caceres-name-
                                                                     honduran-military-hitlist-former-soldier
                  Honduras n’avaient jamais été aussi bonnes ». Mais   ⁵ http://criterio.hn/presidente-hernandez-culpa-ongs-defensoras-derechos-
                  même si elles ne sont pas dupes, les organisations   humanos-campana-honduras/
                                                                     ⁶ Unidad de Muertes violentas en el Bajo Aguán. Elle est composée de 15
                                                                     enquêteurs de la police et du ministère public.

                                                Élections au Nicaragua, la victoire par le vide ?
                         « …et le combat cessa faute de combattants ».
                         (Le Cid, Corneille).
                         Les élections de novembre prochain s’annoncent sans suspense au Nicaragua. Pour le FSLN, la formule
                         présidentielle, ce sera Daniel Ortega (pour la 3 ème  fois) et Madame. Même dans les rangs sandinistes, le
                         malaise est palpable, malgré les justifications du président vantant la capacité des femmes (surtout la sienne)
                         à exercer le pouvoir. L’argument n’avait pas été évoqué lorsqu’en 1990, il fut battu par Violeta Chamorro…
                         mais, depuis, le scénario pour que cette cinglante défaite ne se reproduise jamais a été soigneusement
                         élaboré. En prélude, cette fois, la destitution de 24 députés du principal parti d’opposition qui refusaient
                         le remplacement de leur leader Eduardo Montealegre (droite) par un parfait inconnu, disposé à servir de
                         caution au régime. Sous la dictature somoziste, on appelait « zancudos » (moustiques) ces partis satellites
                         du pouvoir en place. Remis au goût du jour, ce funeste antécédent prive une partie de l’opposition (social-
                         démocrate) du choix cornélien qui, en 2011, l’avait amenée à se fourvoyer en soutenant le candidat de la
                         droite la plus rance.




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