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Témoignage pour le 40ème anniversaire de FAL

L’Amérique latine,
ça intéresse vraiment les gens ?

Le 13 novembre 2010, France Amérique Latine fêtait ses 40 ans à Ivry, avec
près de 400 personnes qui ont répondu à l’invitation.
Renaud Lambert du Monde Diplomatique a bien voulu témoigner sur le rôle
et l’implication de notre association.

Il y a quelques années, un ami journaliste © Franck Gaudichaud
m’interrogeait sur la place que Le Monde
diplomatique accorde à la couverture de Renaud Lambert à Ivry, le 13 novembre dernier
l’Amérique latine : « Mais enfin, tu crois que
ça intéresse vraiment les gens ? » Quelques années après, Donald Rumsfeld
Sa question me rappela celle d’un jeune devient secrétaire à la Défense de l’admi-
fonctionnaire américain au président Ri- nistration Ford, qui finance la dictature de
chard Nixon, à la fin des années 1960. « Pinochet. Il occupe à nouveau ce poste
A quelle région m’intéresser pour vraiment – auprès de George W. Bush – quand, en
réussir ma carrière ? », demande l’ambi- 2002, les Etats-Unis parrainent le coup
tieux. « Pas à l’Amérique latine !, répond le d’Etat qui renverse le président vénézué-
président. L’Amérique latine, tout le monde lien Hugo Chávez pendant deux jours
s’en fout. » et quand ils organisent la chute de Jean-
Pourtant, Nixon allait changer d’avis et la Bertrand Aristide, en Haïti, deux ans plus
carrière du jeune fonctionnaire, un certain tard. C’est encore cette administration qui
Donald Rumsfeld, allait lui laisser tout loi- estime crucial d’établir une zone de libre-
sir de ne pas suivre le conseil qui venait de échange à travers les Amériques afin, expli-
lui être prodigué. que Colin Powell, « d’assurer un libre accès,
En 1970, l’élection de Salvador Allende sans obstacles ni difficultés, à nos produits et
préoccupe suffisamment Nixon pour le à nos services ».
conduire à déclarer, le 6 novembre : « Nous
ne devons pas laisser l’Amérique latine pen-
ser qu’elle peut prendre ce chemin sans en
subir les conséquences. » Allende a pris ses
fonctions l’avant-veille. A l’époque, Nixon
s’émeut assez de l’évolution du Chili pour
demander que la CIA y fasse « hurler » l’éco-
nomie.
Trois ans plus tard, Santiago suscite tou-
jours l’intérêt du président américain : il
autorise le coup d’Etat qui renverse Allen-
de et transforme le Chili en laboratoire du
néolibéralisme.