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Nouveau pas dans l’unité latino-américaines : milliers de vénézuéliens. Mais ce sont surtout
tous les États membres de l’Union des Nations des millions d'anonymes qui se sont mobilisés
Sud-Américaines, réunis en session extraordinaire et ont permis ce succès diplomatique. C'est
à Quito le 14 mars 2015, exigent l'abrogation du ainsi que le véritable événement du Sommet
décret qui "constitue une menace d’ingérence et de des Amériques 2015 ne sera pas la photo si
violation de la souveraineté et du principe de non- médiatisée d’Obama et Castro, mais bien ce
intervention dans les affaires intérieures d’autres rejet collectif de l'ingérence étasunienne qui
États”. témoigne de l’irréversibilité du mouvement
C'est ensuite le tour de la CELAC qui regroupe les entamé en 2001, lorsque fut enterré le Traité
33 états d’Amérique latine et de la Caraïbe, de de Libre Commerce que voulaient imposer les
l’ALBA, de PetroCaribe, des 134 pays membres États-Unis à toute l'Amérique latine (ALCA en
du G77 et de la Chine… Bref, tout le sud de la espagnol ou ZLEA en français, ndlr).
planète a rejeté le décret Obama parce qu’”il
viole le droit international, la souveraineté et Le processus bolivarien à la croisée des chemins.
l’indépendance politique du Venezuela”.
Mais cette victoire diplomatique ne masque
Mais, fait nouveau, ce rejet ne s'est pas cantonné pas les importantes difficultés économiques
au côté bolivarien. qui mettent en danger le processus. Nicolás
Maduro qui, au début de son mandat, a pratiqué
«Le Venezuela n’est une menace pour aucun pays», une politique de main tendue envers les chefs
a déclaré la direction de l'opposition réunie au d’entreprises, y compris les représentants
sein de la Table de l’unité démocratique (MUD). les plus emblématiques de la bourgeoisie
"Nous apprécions le soutien de la communauté vénézuélienne, sait qu'il faut désormais mettre
internationale, mais nous ne souhaitons ni au pied du mur les responsables des pénuries
n’admettons que la communauté internationale, qui visent à mécontenter et démoraliser la
ou qu’un de ses membres, assument des devoirs population.
qui sont les nôtres ». De retour du Sommet des Amériques, Maduro
Le gouverneur de l'État de Lara, Henri Falcón, a appelé ministres, syndicats, et organisations
membre de l'opposition, a qualifié le décret populaires à s’attaquer à la « racine du mal » et
de Barack Obama de "document menaçant, à ne « plus croire en la bourgeoisie ». À l'occasion
irrespectueux, relevant de l'ingérence et bien des manifestations du 1er mai, il a déclaré que
sûr inamical. Nous ne pouvons pas le partager, "la défaite de la guerre économique doit constituer
indépendamment de notre opinion sur le la grande victoire de peuple vénézuélien en 2015.
gouvernement." Notre peuple a le droit à la stabilité". Dans ce but,
Dans la même veine, l'Église vénézuélienne, par l’État a entrepris de contrôler les importations de
la voix de l'archevêque de Caracas, considère base, et d'infliger des sanctions aux entreprises
que "le gouvernement nord-américain a corruptrices et aux fraudeurs, accapareurs,
exagéré en affirmant que le Venezuela est une spéculateurs, contrebandiers.
menace pour la sécurité interne des États-Unis."
L’opposition semble consciente que l’ingérence Mais cette bataille ne se gagnera pas d’un coup
de Washington dans la politique intérieure du de plume ou par des discours : elle nécessite
Venezuela est cette fois-ci trop voyante et lui la fin de l'impunité de ceux qui mènent cette
rend un mauvais service. guerre économique et la consolidation de
nouvelles formes économiques, car ce sont
Avril 2015 : toujours des monopoles privés qui contrôlent
« Obama deroga decreto ya ! », 80 % des importations, de la production et de la
la campagne internationale pour l'abrogation distribution au Venezuela.
du décret s'invite au Sommet des Amériques.
Le gouvernement vénézuélien est donc à
Une pétition demandant à Washington de la croisée des chemins, entre négociation,
révoquer son décret est alors lancée dans le pays concertation, lutte contre la corruption et
et au niveau international dans le but d'obtenir radicalisation du processus. Face à la guerre
10 millions de signatures. Objectif largement économique, et dans la perspective des
atteint puisque ce sont plus de 13 millions prochaines élections législatives, la contre-
de signatures que Nicolás Maduro remettra à attaque semble le seul choix à même de
Barack Obama lors du Sommet des Amériques permettre la survie de la Révolution Bolivarienne.
réuni en avril à Panama.
Parmi les signataires, des noms célèbres tels
que ceux d'Eduardo Galeano qui accomplissait Cathy FERRÉ
là son dernier geste public et d'Evo Morales qui Membre du Bureau National de FAL
signait aux côtés de Nicolas Maduro, face à des FAL Marseille
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