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VIE ASSOCIATIVE

Maurice Barth nous a quittés,
il nous reste le vaste univers de son action

Maurice Barth est né en Alsace en mars 1916, quelques semaines après le début de la
bataille de Verdun, l’une des plus meurtrières et cruelles de la Première Guerre Mondiale.
Cette époque tragique a sans doute joué un rôle clef dans ce qui serait l’un des moteurs
de sa vie : la recherche de la réconciliation et de la paix entre les êtres humains.

© Véronique Huyghe                                                           lait pas la paix des cimetières, car il la souhaitait
                                                                             porteuse de vie et d’espoir, juste et égalitaire.
                    Bien entendu, ces idéaux n’étaient pas l’exclusi-        Voilà pourquoi en 1945, allant s’installer dans
                    vité de Maurice car beaucoup de personnes dé-            une Allemagne en ruines, il entendait – lui Fran-
                    clarent vouloir chercher l’entente et l’harmonie         çais – partager avec le peuple allemand le triste
                    universelles.                                            sort et les terribles séquelles laissées par le na-
                    En revanche, là où notre camarade, ami et frère          zisme. Seulement ainsi, en joignant le geste à la
                    montrait sa véritable volonté et ses convictions         parole, il entendait contribuer à la réalisation de
                    profondes, était dans le fait qu’à la base de sa         ce souhait unissant tous les Européens à la sortie
                    quête de paix et de réconciliation, il luttait           de la guerre « plus jamais ça ».
                    d’abord pour la justice et l’égalité entre ses sem-      Voilà pourquoi, quelques années plus tard, il
                    blables. Pas de paix bâtie sur l’exploitation, les       s’est battu pour que la paix au Proche-Orient
                    iniquités et la domination du plus faible par le         soit le fruit de l’égalité et des mêmes droits pour
                    plus fort ; pas de paix du vainqueur revanchard          les Palestiniens et les Israéliens et non pas une
                    sur le vaincu impuissant. NON, Maurice ne vou-           paix de résignation et de soumission des uns
                                                                             aux autres.
                                                                             Lorsque, avec son inépuisable réserve d’injusti-
                                                                             ces, la vie lui a montré d’autres populations en
                                                                             détresse, d’autres hommes, femmes et enfants
                                                                             victimes de guerres, dictatures et violences,
                                                                             Maurice n’a pas détourné le regard. Les alertes
                                                                             venaient des étudiants latino-américains de la
                                                                             Résidence Maydieu dont Maurice était le direc-
                                                                             teur. C’est en communion avec ces jeunes qu’il
                                                                             s’est impliqué à fond dans la solidarité avec les
                                                                             Brésiliens, Argentins, Uruguayens et Chiliens
                                                                             fuyant leur continent pour sauver leur vie. De
                                                                             cette époque datent ses premiers contacts avec
                                                                             la langue espagnole, langue qu’il s’est proposé
                                                                             d’apprendre malgré ses presque soixante ans,
                                                                             réussissant un pari que peu de gens auraient re-
                                                                             levé.
                                                                             Ce fut ensuite pour lui la déchirante découver-
                                                                             te d’une église catholique qui, dans sa grande
                                                                             majorité, gardait le silence devant les terribles
                                                                             injustices dont l’Amérique latine était victime.
                                                                             L’ignorance, l’indifférence et la complicité face à
                                                                             ces drames ont fait de ce prêtre français de l’or-
                                                                             dre des dominicains le dénonciateur permanent
                                                                             de ces pratiques ecclésiastiques proches du pou-
                                                                             voir. Heureusement, il n’était pas tout seul et il a

                                                                         28
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