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Hors-Série




                                                                            La COP21 prépare
                                          de nouveaux crimes climatiques !




                    En près de 25 ans de négociations, les émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES) ont augmenté
                    de 60%. Plus les États négocient, plus les émissions augmentent et plus le réchauffement climatique
                    s'accélère. Un nouveau record d'émissions de GES a été battu en 2014 et l'année 2015 est en train de
                    battre tous les records de chaleur. Tout s'accélère, sauf les négociations. Le mandat est connu depuis
                    quatre ans, et pourtant, le texte de négociation actuel comporte l'ensemble des options contradictoires
                    que les États défendent. Un peu comme si les quatre-vingt cinq jours de négociation organisés lors
                    des conférences de Doha (2012), Varsovie (2013) et Lima (2014) – et lors d'innombrables sessions
                    intermédiaires – n'avaient pas permis d'avancer dans la négociations des différents points durs.





          Le  texte  de  négociation  est  illisible  et  pourtant   plus fortement les populations qui disposent de
          la situation s'est nettement clarifiée au cours des   peu de ressources pour les supporter, s’y adapter
          semaines passées.                                  ou tenter de les éviter. Des populations qui, par
          La grande majorité des États ont désormais         ailleurs, n’ont qu’une responsabilité marginale
          enregistré auprès de l'ONu leurs contributions     en matière de réchauffement climatique. Preuve
          nationales volontaires en matière de lutte contre   que les inégalités  écologiques redoublent les
          les dérèglements climatiques : les INDCs dans la   inégalités sociales et font du réchauffement
          novlangue onusienne. Là où le protocole de Kyoto   climatique un enjeu majeur de justice, d’égalité et
          consistait à fixer un objectif global d'émissions   de solidarité.
          à répartir en un certain nombre de pays, il est
          désormais prévu que chaque pays détermine             Écart abyssal entre le réel et le souhaitable
          ce qu'il met au pot commun, en fonction des
          «  réalités nationales  ».  C'est  une  transformation   Il serait logique que l'écart entre le souhaitable
          extrêmement profonde de la négociation : on        (les  2°C  ou  moins)  et  le  réel  (les  3°C  ou  plus)
          ne négocie plus un objectif global, mais on        soit au cœur de la négociation de Paris et que
          agrège des objectifs nationaux – pas forcément     les États s'accordent pour se répartir les efforts
          commensurables entre eux et pas forcément en       supplémentaires nécessaires. Ce serait logique,
          adéquation avec ce qui est nécessaire.             mais ce ne sera pas le cas. Ces contributions ne
                                                             seront pas revues à la hausse lors de la COP21.
             Toujours plus de gaz à effet de serre dans      Parce que ce n'est pas prévu à l'ordre du jour et
                          l'atmosphère                       parce qu'aucune des puissances de la planète, du
                                                             Nord comme du Sud, n'en a la volonté.
          Comme le montrent désormais de nombreuses
          études, y compris l'évaluation réalisée par        en matière de climat, tout retard pris n’est pas
          l'ONu elle-même, les contributions nationales      rattrapable et il hypothèque dangereusement
          volontaires des États conduisent à une             la transition énergétique mondiale : selon
          augmentation d'au moins 10 % des émissions         l’évaluation de l’ONu, les engagements actuels
          mondiales d’ici à 2030.  Traduit en termes de      des États conduisent à consommer en 15 ans près
          réchauffement, cela conduit à un réchauffement     de 75 % du budget carbone global (environ 1000
          climatique  supérieur  à  3°C  d'ici  la  fin  du  siècle.   Gt) dont nous disposons pour ne pas aller au delà
          Bien plus que le mandat que les États se sont eux-  des 2 °C. Cet écart entre le réel et le souhaitable
          mêmes donnés. Près de deux fois plus que les       est donc le point de départ pour de nouveaux et
          1,5°C que les climatologues mettent désormais      plus nombreux crimes climatiques, aux quatre
          en avant comme « ligne de défense » dont il        coins de la planète, dont les populations les plus
          faudrait se tenir éloignés.                        vulnérables vont payer le plus lourd tribut.

          On ne manque pourtant pas de rapports,                    A l'ONU, on négocie le contenant,
          d'études et de données scientifiques pour                         pas le contenu !
          savoir qu'un réchauffement de 3°C serait
          catastrophique pour bon nombre de régions et       De quoi vont discuter les négociateurs s'il ne s'agit
          populations de la planète. Ces bouleversements     pas de ramener le réchauffement climatique en
          climatiques, inégalement répartis, toucheraient    deçà d'une trajectoire de 2°C ? À la COP 21, les



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