🇺🇸 Donald Trump en grandes manœuvres latino-américaines (Jean-Jacques Kourliandsky / Nouveaux Espaces Latinos)
Brésil, Équateur, Mexique, Venezuela, ont été mis sous pression par le président des États-Unis et ses collaborateurs ces dernières semaines. Rien là de bien nouveau sans doute. Dès son entrée en Maison Blanche, Donald Trump avait mis à l’index « hispanos » à expulser, gouvernements latino-américains à recadrer sur le méridien étatsunien, Espagne, mère de leur patrie, à démoniser.

Cette insistance pérennisée bien qu’elle se soit manifestée de façon différente d’un pays à l’autre interroge. L’Amérique latine est une périphérie géopolitique, sans réelle influence sur la diplomatie mondiale, sans Forces armées dignes de ce nom, sans rayonnement économique particulier. La relecture des évènements courants montre pourtant que l’Amérique latine a mobilisé le Département d’État des États-Unis (ministère des affaires étrangères), et celui de la Défense, en dépit de la guerre d’Israël à Gaza et du conflit européen entre Russie et Ukraine.
Les initiatives commerciales unilatérales de Donald Trump ont touché l’Amérique latine comme le reste du monde. Tout le monde a été mis au taux de base de + 15 %. Le Brésil à + 50 % fait exception. Cuba déjà soumis à un sévère régime de sanctions a été victime d’un tour de vis supplémentaire. Tandis que le Venezuela, également sous sanctions, a pu réactiver ses activités pétrolières vers les États-Unis l’entreprise Chevron ayant obtenu les autorisations nécessaires. La lutte contre le trafic des stupéfiantes et les migrations vers les États-Unis ont justifié d’autres interventions.
Le Secrétaire d’État, Marco Rubio, s’est rendu en Équateur et au Mexique les 2, 3 et 4 septembre 2025. Il s’est félicité des transferts aux États-Unis pour y être jugés, et à leur demande, de nationaux mexicains soupçonnés de narcotrafic. 29 le sont allés en février 2025 et 26 le 13 août. Il a sollicité l’Équateur afin qu’il accueille dans ses prisons les migrants jugés indésirables aux États-Unis suivant le modèle expérimenté avec le Salvador. À l’Équateur il a signalé aussi que les États-Unis répondraient positivement à toute demande d’une présence militaire permanente. Comme cela avait été le cas à Manta, aux portes de la Colombie jusqu’en 2009. Une flotte de bateaux militaires, comprenant un sous-marin nucléaire, et une dizaine d’avions F-35, ont été déployée dans la Caraïbe, pour verrouiller les côtes du Venezuela, pays dénoncé comme exportateur de stupéfiants.
Le rôle d’un cartel de militaires d’active proche du président Nicolás Maduro qualifié des Soleils, emblème figurant sur les casquettes et les épaulettes de ces officiers, a été dénoncé. Un petit bateau, suspecté de transport de drogue, a été coulé le 3 septembre avec les onze personnes se trouvant à son bord. Le cartel de los Soles est inconnu des spécialistes de la question. Aucune preuve n’a été présentée pour valider la thèse d’un narco-bateau.
Le Brésil a été sanctionné commercialement pour diverses raisons. La première est celle d’avoir engagé des poursuites contre l’ex-président Jair Bolsonaro accusé d’avoir été l’organisateur de la tentative de coup d’État du 8 janvier 2023. Cette procédure a été présentée comme contraire aux droits de l’homme par les autorités des Etats-Unis. Elles ont adopté des mesures ciblant le juge instruisant le dossier, Alexandre de Moraes, interdit de séjour aux États-Unis, tout comme le ministre brésilien de la justice, Ricardo Lewandowski. Le Brésil est par ailleurs sévèrement critiqué par Donald Trump pour avoir inventé un système de paiement dématérialisé, appelé Pix. Ce système a en quelques mois concurrencé avec succès les réseaux nord-américains Mastercard et Visa, situation présentée comme déloyale par Washington qui en demande la suspension.
Un argument idéologique a par ailleurs été présenté par Donald Trump. Le Brésil aurait pris un virage d’extrême gauche. Le Venezuela lui aussi, confirmant un passé trouble et anti-démocratique. On saisit mal si on s’en tient aux justificatifs avancés la cohérence de ces initiatives et de ces déclarations. Pourquoi ce déploiement de forces militaires face au Venezuela qui est loin d’être au cœur des trafics de stupéfiant en Amérique latine ? Les grands producteurs de coca sont la Bolivie, la Colombie et le Pérou. Les logistiques exportatrices principales passent par les ports équatoriens et le Mexique. Les décisions prises à l’égard du Venezuela sont en accordéon. Tantôt elles signalent un possible rapprochement après des échanges de personnes et une ouverture pétrolière. Tantôt elles coupent court à toute évolution, avec une gesticulation militaire. (…)
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