🇧🇷 🇵🇪 Face aux bûcherons et aux évangélistes, les peuples «non contactés» menacés de toute part (Jeanne Cassard / Reporterre)


Exploitation forestière et minière, trafic de drogue, missionnaires religieux et même influenceurs… La survie des peuples autochtones non contactés est menacée, alerte l’ONG Survival International.

Rare photo des Mashco Piro, qui rejettent toute interaction avec le monde extérieur, publiée en juillet 2024 par l’ONG Survival International. – © Survival International

À l’image, un groupe d’une quarantaine d’hommes, de femmes et d’enfants marche le long de la rive d’un cours d’eau. La photo, rare, a été publiée en juillet 2024 par l’ONG Survival International. Elle montre des membres de la tribu Mashco Piro, un peuple autochtone semi-nomade vivant en Amazonie péruvienne, non loin de la frontière avec le Brésil. Avec une population de plus de 750 personnes, il est considéré comme le plus grand peuple autochtone non contacté de la planète, c’est-à-dire qui rejette toute interaction avec le monde extérieur.

Mais leur présence en dehors de la forêt, à proximité d’une concession forestière et d’un village d’un autre peuple autochtone, est anormale. C’est le signe qu’ils sont en grand danger, alerte Survival International, leur territoire étant détruit par l’exploitation forestière.

Comme les Mashco Piro, 64% des 196 peuples vivant en isolement volontaire recensés à travers le monde sont menacés par l’industrie forestière, selon un rapport de Survival International publié fin octobre. La moitié risque de disparaître d’ici dix ans si rien n’est fait. 95 % vivent en Amazonie, surtout au Brésil, et aussi en Indonésie, Papouasie occidentale et Inde.

Extraction minière, trafic de drogue, agro-industrie, constructions d’infrastructures, risques de contacts forcés avec des missionnaires et même des influenceurs… Les dangers s’accumulent. Mais l’exploitation forestière représente le danger le plus grave, selon Survival International.

95 % des peuples non contactés vivent en Amazonie. © Survival International

« Ces menaces ne sont pas seulement environnementales ou sociales, insistent les auteurs du rapport, elles sont existentielles. » Le contact expose ces peuples à des maladies contre lesquelles ils n’ont aucune immunité. En Amazonie brésilienne, plus de 80 % de la population des peuples autochtones nouvellement contactés meurent généralement de maladies comme la grippe, la rougeole ou la varicelle. « Un simple rhume peut rapidement se propager à travers une communauté toute entière », précisent les auteurs du rapport.

Pour obtenir des informations précises sur ces périls, l’ONG s’est appuyée sur les témoignages des populations autochtones voisines, en relation avec l’extérieur. Comme Lucas Manchineri, président de l’organisation qui représente le peuple Manxineru d’Extrema, au Brésil, et Maypatxi Apurinã, cheffe de l’Opiaj, l’Organisation des peuples autochtones Apurina et Jamamadi. Les deux ont fait le déplacement jusqu’à Londres fin octobre pour alerter sur la situation de leurs voisins non contactés.

« En 2002, le gouvernement péruvien a créé une réserve territoriale pour protéger les Mashco Piro, explique Lucas Manchineri, dont sa communauté partage une partie du territoire avec les Mashco Piro. Toutefois, cette réserve est bien plus petite que leur territoire réel, le reste de leurs terres a été concédé à des entreprises forestières. » Résultat : « Ces entreprises, comme la société Maderera Canales Tahuamanu (MCT), ne se contentent pas de couper des quantités gigantesques d’arbres, notamment les acajous, elles construisent aussi des routes et des ponts dans la forêt, et des populations non autochtones s’installent le long des rivières », poursuit-il. (…)

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