États-Unis : expulsion de milliers de migrants à la frontière sud du Texas (revue de presse)


L’administration Biden refuse de considérer des milliers d’Haïtiens arrivés au Texas comme des réfugiés ; elle ne les autorise pas à demander l’asile, en prenant appui sur un décret de l’ère Trump. Les expulsions massives se poursuivent. Les États-Unis ont renvoyé dimanche 19 septembre dans leur pays d’origine les Haïtiens qui campaient à Del Río, une ville frontalière du Texas, et ont tenté d’empêcher d’autres personnes de traverser la frontière avec le Mexique dans une démonstration de force qui a marqué le début de ce qui pourrait être l’une des expulsions à grande échelle de migrants ou de réfugiés les plus rapides des États-Unis depuis des décennies.

Les États-Unis ferment leurs portes aux exilés venus d’Haïti
(Christophe Deroubaix et Rosa Moussaoui / L’Humanité
)

Lundi 20 septembre, depuis la rive du Río Grande, des gardes-frontières états-uniens ont ordonné à des migrants haïtiens de quitter le territoire. Paul Ratje / AFP

On croirait ces images tirées d’un livre d’histoire : des hommes à cheval pourchassant des hommes noirs, faisant claquer leurs rênes pour les effrayer comme s’il s’agissait de fouets. Ces photographies ont pourtant été prises ces derniers jours à Del Río au Texas, près de la frontière avec le Mexique. Les cavaliers appartiennent aux patrouilles équestres de la police des frontières ; les pourchassés sont des migrants haïtiens. Elles ont soulevé, outre-Atlantique, un sentiment de révolte et de dégoût et suscité, du côté de l’administration Biden, un embarras manifeste. « C’est horrible à regarder, a admis la porte-parole de la Maison-Blanche, Jen Psaki. Je ne connais pas le contexte, mais je ne vois pas dans quel cadre ce serait approprié. »

L’auteur des clichés, Paul Ratje, photojournaliste travaillant pour l’AFP, a décrit le «contexte» : la scène se déroulait alors que des migrants se lavaient dans le Río Grande – qui trace la frontière entre les deux pays – ou traversaient le fleuve pour aller chercher des vivres, moins chers au Mexique. Cinq ou six agents à cheval sont alors arrivés, pour leur intimer l’ordre de retourner au Mexique. « La situation était tendue et les migrants ont commencé à courir pour les contourner, a-t-il relaté. Un des agents a attrapé l’homme de la photo par le tee-shirt. » « Je n’ai pas vu de coups de fouet, mais les agents ont fait tournoyer leurs rênes », a-t-il ajouté.

La promesse d’une enquête

Le chef des gardes-frontières, Raul Ortiz, a tenté de livrer cette explication à la presse : « Je leur ai demandé de chercher si des individus étaient en détresse et de rassembler des renseignements sur des passeurs. » « Contrôler un cheval dans un fleuve est difficile », a-t-il fait valoir.

Son ministre de tutelle, Alejandro Mayorkas, chargé de la sécurité intérieure, a promis qu’une enquête serait conduite, avant de réaffirmer que l’administration Biden ne changerait pas de position : « Nous avons répété que nos frontières ne sont pas ouvertes et que les gens ne devraient pas entreprendre un tel voyage dangereux. » « Si vous venez de manière illégale aux États-Unis, vous serez renvoyés », a menacé le ministre, dont les parents sont arrivés de Cuba en Floride comme migrants. Sans attendre, le secrétaire d’État Antony Blinken a appelé le premier ministre haïtien, Ariel Henry, prié de se conformer à «  la coopération afin de rapatrier les migrants haïtiens au sud de la frontière des États-Unis ».

Trois charters en deux heures

Suite au séisme qui avait ravagé, le 14 août, la moitié sud de Haïti, les États-Unis avaient suspendu les expulsions de ressortissants de ce pays déjà meurtri par la violence des gangs et l’instabilité politique extrême entretenue par les ingérences étrangères, à commencer par celle de Washington. Ce temps est révolu : l’afflux, à la frontière, de plusieurs milliers de migrants haïtiens, arrivés là au terme d’un épuisant et dangereux périple, a provoqué une brutale volte-face. En moins de deux heures, dimanche, trois charters partis du Texas ont atterri à Port-au-Prince, l’administration Biden annonçant une « montée en puissance » de ces expulsions. Certains de ces exilés revenus à la case départ sans même pouvoir demander l’asile n’ont ni point de chute, ni attaches, ni même un abri dans leur pays d’origine : ceux-là sont partis il y a longtemps, au lendemain du séisme de 2010, qui avait fait au moins 200 000 morts et plongé le pays dans un indescriptible chaos. Réfugiés au Brésil, au Chili ou ailleurs en Amérique latine, ils espéraient, pour la plupart, rejoindre des parents établis aux États-Unis. Selon les manifestes des trois vols consultés par l’AFP, près de la moitié des 327 personnes expulsées dimanche ont moins de 5 ans ; tous sont nés hors de Haïti. (…)

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Les Haïtiens expulsés du Texas sont en colère et angoissés
(Radio Canada / AFP)

Un agent frontalier étatsunien tente d’empêcher des migrants d’entrer dans un campement sur les rives du Río Grande, au Texas.
Photo : AFP Via Getty Images / Paul Ratje

Usées par les mois de voyage à travers l’Amérique centrale, les familles haïtiennes expulsées en nombre dimanche oscillent entre la colère du traitement subi aux États-Unis et l’angoisse de vivre à nouveau dans leur pays désormais en proie à la violence des gangs.

Les États-Unis avaient suspendu les expulsions de migrants haïtiens en situation irrégulière à la suite du séisme qui avait ravagé la moitié sud d’Haïti, le 14 août, mais le regroupement en quelques jours de plus de 15 000 migrants, dont une majorité d’Haïtiens, sous un pont au Texas a changé la donne.

En moins de deux heures, trois vols partis du Texas ont atterri dimanche sur le tarmac de Port-au-Prince : jamais les autorités migratoires haïtiennes n’ont eu à gérer un tel afflux.

À leur descente de l’autobus venu les chercher au pied de la passerelle, les familles ont déversé leur colère et leur frustration sur les employés administratifs et les photojournalistes, sommés de ne pas prendre d’images. (…)

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Lire également sur Radio Canada : Mauvais traitement de migrants : des images aux États-Unis suscitent des réactions


À Port-au-Prince, la colère des Haïtiens expulsés des États-Unis
(TV 5 Monde)


Ces photos de gardes-frontières avec des fouets soulèvent un tollé aux États-Unis
(Huffington Post / AFP)

Des gardes-frontières à cheval ont été photographiés au Texas en train de repousser des migrants près de Del Río. Une scène “horrible à regarder” a reconnu la Maison Blanche.

Photo : Paul Ratje, AFP

Des photos montrant des gardes-frontières à cheval en train de repousser des migrants près de Del Rio, au Texas, suscitaient ce lundi 20 septembre une forte émotion aux États-Unis, où le gouvernement du président Joe Biden a annoncé l’ouverture d’une enquête pour faire toute la lumière sur les faits. Sur un cliché pris par un photographe employé par l’AFP, un agent à cheval attrape un homme par son t-shirt. Sur une autre, il tient un groupe à distance en faisant tourner ses rênes, dans une posture menaçante. Ces images “de mauvais traitements de migrants haïtiens le long de la frontière sont horribles et très dérangeantes”, a estimé dans un communiqué l’élu démocrate Bennie Thompson, qui préside la commission sur la Sécurité intérieure à la Chambre des représentants. (…)

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Démocrates et républicains critiquent Biden à l’unisson
(Élodie Cuzin et Charlotte Plantive / AFP / La Presse)

L’administration du président démocrate peine à gérer un afflux soudain et massif de milliers de migrants haïtiens, qui se sont massés sous un pont la semaine dernière dans la petite ville frontalière Del Río, au Texas.

Un campement de fortune de migrants, notamment Haïtiens, installés près du pont international de Del Río, aux États-Unis, vendredi 17 septembre 2021. Eric Gay / AP

Ce week-end, son gouvernement a commencé à les renvoyer par avion dans leur pays. « Une telle décision va à l’encontre du sens commun » et de « la décence », s’est insurgé Chuck Schumer dans l’hémicycle du sénat. Haïti « ne peut pas les recevoir », a-t-il ajouté. Aux troubles politiques et à l’insécurité dans l’île, s’est ajouté en août un séisme meurtrier qui a ravagé le sud-ouest de l’île, tuant plus de 2200 habitants.  Plus largement, Chuck Schumer, un des principaux alliés de Joe Biden, lui a demandé de revenir sur les règles sanitaires adoptées au début de la pandémie par son prédécesseur Donald Trump, pour autoriser le refoulement immédiat de migrants. « Nous ne pouvons pas poursuivre ces politiques ignobles et xénophobes venant de Trump, qui ignorent nos lois sur les réfugiés », a-t-il lancé.

Les Nations unies ont également fait part de leur « profonde inquiétude » face à ces expulsions qui ne laissent pas le temps d’examiner les dossiers des Haïtiens. « Il y a d’autres moyens de gérer la santé publique […] et en même temps de garantir le droit à demander l’asile », a déclaré Shabia Mantoo, porte-parole de l’agence pour les réfugiés (HCR). (…)

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La détresse des migrants haïtiens bloqués au Mexique
(reportage de Thomas Harms / RFI)

Des migrants haïtiens bloqués à la frontière entre le Mexique et le Texas, à Del Rio, le 18 septembre 2021.
Des migrants haïtiens bloqués à la frontière entre le Mexique et le Texas, à Del Río, le 18 septembre 2021. AP – Eric Gay

À la frontière entre le Texas et le Mexique, près de 15 000 personnes – en grande partie des Haïtiens – sont désormais bloquées dans un camp sous le pont qui mène à la ville de Del Río. Bloquées, car l’administration américaine a annoncé la reprise des expulsions vers Haïti et que les frontières, côté américain et mexicain, sont désormais fermées à cet endroit. RFI est allé à la rencontre de ces migrants haïtiens.

Alex Rosier est désespéré, assis sur le bord de la digue qui mène du coté américain du fleuve Rio Grande. Dans le camp de Del Río depuis mercredi, il était sorti ce samedi 18 septembre pour chercher à manger. Et il a appris que, face à l’afflux des migrants d’Haïti, les États-Unis allaient reprendre les expulsions vers son pays : « La déportation, j’en veux pas. C’est pas pour moi. Si je suis déporté, je vais mourir. Haïti, c’est fini. On tue le président, les brigands sont au pouvoir. Imaginez ! »

Ce maçon laisse sa femme et sa fille de l’autre côté du Río Grande, dans le camp de Del Río. Il hésite à retourner au Brésil, où il vivait depuis 2013. Il ne s’est pas encore décidé. Devant le fleuve, comme lui, Mamouna Ismaël est en colère. Elle a traversé huit pays pour arriver là. Elle s’était arrêtée deux ans au Chili avant de décider, il y a deux mois, de monter vers le Texas : « On a peur de traverser. Si on y va, ils vont nous déporter vers Haïti. Donc, ça sert à rien de traverser. On a peur. »

Ils sont nombreux à faire ce choix : rester à Ciudad Acuña, au Mexique. C’est le cas de Judson Auguste, qui s’est aussi fait une raison : « Bon, on est obligé de rester ici. Donc, on va chercher un travail. On pourra retenter si les États-Unis rouvrent leur frontière. On ira. » Très présent sur des groupes WhatsApp, il va prévenir les autres migrants haïtiens que cela ne sert à rien de se presser désormais pour arriver au Nord du Mexique.

Le maire démocrate de la ville, Bruno Lozano, et l’élu républicain August Pfluger, représentant à Washington du 11e District du Texas, ont tenu une conférence de presse commune samedi. August Pfluger s’est adressé directement à Joe Biden et a déploré « que le président et son administration n’aient pas pu prévoir » cette situation. (…)

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