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Les Conseils communaux et l’expression
d’un pouvoir populaire
Dès 1999, l’Etat bolivarien s’illustre par la mise en œuvre de dispositifs de participation
populaire. La démocratie participative est inscrite comme un droit imprescriptible dans
la nouvelle constitution et s’avère cruciale pour la survie et l’approfondissement du pro-
cessus.
En 2002, la mise en œuvre des Conseils locaux de la communauté, élabore la cartographie et le recen-
sement de la zone. Il y a donc un transfert effectif
planification publique démontre une implication de pouvoir à la communauté qui se conscientise. Le DOSSIER
effective de la population dans les instances de ges-
tion. La loi établit la participation du peuple dans Conseil a une réelle dimension politique et éman-
cipatrice. Il est l’interlocuteur de la communauté et
la formulation, l’exécution et le contrôle des politi- des instances du gouvernement. Il peut développer
ques publiques. Le but est d’inciter les municipalités
à travailler avec les communautés organisées pour des actions de formation et de sensibilisation poli-
tique.
décider conjointement des investissements. Un Conseil communal regroupe 200 à 400 fa-
A partir de 2003, les programmes sociaux, les « Mi-
siones sociales », confirment ce besoin d’être acteur- milles en zones urbaines, 20 en milieu rural et 10
dans les régions « indigènes ». Une Assemblée de
trice et d’être reconnu-e en tant que citoyen-ne, no- citoyen-ne-s doit être composée d’au moins 20 %
tamment à travers l’accès aux droits fondamentaux
comme la santé et l’éducation. des habitants de plus de 15 ans, c’est l’instance de
décisions. Le Conseil délimite lui-même le territoire
Et, en 2006, la loi sur les Conseils communaux consti- et ses membres sont bénévoles et élu-e-s pour 2
tue une étape supplémentaire dans la démocratie
active. Elle instaure une forme de « double pouvoir » ans mais révocables.
Fin 2011, 49 200 conseils communaux fonction-
au sein du processus révolutionnaire. Ces instances naient dans l’ensemble du pays. La cohabitation
répondent clairement à l’aspiration des populations
à prendre en charge leur destin en décidant directe- avec les municipalités ne s’avère pas toujours sim-
ple et si certaines autorités locales ont transféré 100
ment des investissements sur leurs lieux de vie. La % de leurs budgets aux Conseils communaux afin
loi permet ainsi aux communautés de s’organiser
démocratiquement et de soumettre des projets aux qu’ils les gèrent directement, d’autres refusent de
se défaire de leurs prérogatives. De même, l’articu-
organismes de l’État. Le Fonds national des Conseils lation entre les différents mécanismes de participa-
communaux assure le financement des projets pré-
sentés à la Commission nationale du pouvoir popu- tion génère parfois des conflits avec les organisa-
tions sociales existantes dans les communautés (co-
laire. mités de terres urbaines, comités de l’eau, comités
La formation d’un Conseil communal est encadrée de santé, etc.).
par une procédure précise. Une équipe provisoire Malgré des progrès indéniables dans l’expression
convoque une assemblée de citoyen-ne-s, chargée
d’élire les commissions électorale et promotrice. d’un pouvoir populaire, des contradictions demeu-
rent entre les mobilisations locales, non dotées de
Cette dernière établit un « diagnostic participatif et moyens financiers autonomes, et la volonté de les
social » du quartier : nombre d’habitants, revenus,
problèmes techniques et sociaux. Elle convoque intégrer à la gestion de l’Etat. Un vrai pouvoir popu-
laire nécessiterait un pouvoir de décision à tous les
l’Assemblée constituante communautaire qui, sur la niveaux y compris financier. Or, la dépendance vis-
base du diagnostic, formule des projets. La commis-
sion électorale organise la désignation des porte- à-vis des subsides du pétrole peut handicaper les
conseils communaux dans l’affirmation d’une réelle
parole des comités qui composent l’organe exécutif, autonomie face à l’Etat.
l’unité d’inspection sociale (qui contrôle l’utilisation
des ressources et la réalisation des programmes) et Pour autant, la démocratie participative au Venezue-
la permet d’inclure des couches de la population
l’unité de gestion financière (Banque coopérative sur les lieux de vie des communautés. Les secteurs
communale).
marginaux de la population gagnent en confiance
à travers la prise de décision collective. Les conseils
Chaque Conseil communal détermine ses priorités, communaux ont notamment été créés pour remé-
ses domaines d’intervention et crée ses propres co-
mités : santé, éducation, alimentation, logement, dier à l’inefficience des bureaucraties de l’appareil
d’Etat et à la corruption.
économie populaire, culture, sécurité, eau, services
publics, information et télécommunications, etc. Les
habitants gèrent les subsides et contrôlent la réali-
sation des travaux. Le Conseil récupère l’histoire de Richard NEUVILLE
Membre du Comité directeur de FAL et
du Collectif Lucien Collonges
Richard Neuville est coordonnateur du livre «Autogestion hier,
aujourd’hui, demain» (Syllepse, 2010) et administrateur du blog Alter
autogestion. 15