🇦🇷 Argentine : le gouvernement d’extrême droite de Javier Milei s’attaque à la souveraineté alimentaire (Salomé Vuarant / CADTM)


À l’heure où sont écrites ces lignes, une centaine de jours se sont écoulés depuis l’arrivée au pouvoir de Javier Milei, le leader du Partido La Libertad Avanza (LLA) en Argentine. Il a été élu sur un programme constituant une attaque sans précédent contre les secteurs populaires et la classe ouvrière. Paradoxalement, son discours qui prétend éradiquer « la caste » et « les privilèges de la politique » démontre que son plus grand ennemi est en fait le peuple et non pas les « amis du pouvoir » qui restent confortablement installés dans leurs privilèges.

Photo : Thérèse Di Campo

La faim, la pauvreté, le chômage, l’endettement et l’inflation incontrôlée font partie de son programme de gouvernement, qui génère une misère sans précédent dans l’histoire du pays et porte gravement atteinte à la souveraineté alimentaire.

La ministre du capital humain, Sandra Pettovello, a gelé le transfert des fonds destinés à l’aide sociale aux secteurs les plus défavorisés de la population. Le gouvernement a scandaleusement annulé les soupes populaires, arrêté l’assistance médicale aux patient·es atteint·es de maladies chroniques et aiguës, supprimé les plans d’assistance sociale tels que le programme Potenciar Trabajo, poussé les retraité·es dans la misère avec des pensions proches du seuil de pauvreté… Avant l’arrivée au pouvoir de ce gouvernement d’extrême droite, la souveraineté alimentaire, droit des peuples à choisir son alimentation et comment celle-ci est produite, était déjà sévèrement mise à mal. L’accès à une alimentation saine, de qualité et à des prix équitables fait cruellement défaut en Argentine et la politique de Javier Milei exacerbent gravement la situation.

Publié en février 2024, un rapport de l’Observatoire social de l’Université catholique argentine (UCA) indiquait que la pauvreté dans le pays avait atteint le chiffre alarmant de 57,4 % de la population en janvier 2024 (contre 49 % en décembre), un record. Cette augmentation drastique est principalement due à la dévaluation accélérée de la monnaie nationale (une dévaluation de 116 % dès l’entrée en fonction de Milei en décembre) et à une déréglementation extrême des marchés, qui ont provoqué une escalade des prix des produits de base, érodant considérablement les revenus et le pouvoir d’achat des classes moyennes.

Cependant, au-delà du plan gouvernemental désastreux qu’il met en œuvre, Milei construit son image grâce à l’élaboration d’un discours surréaliste, qui suscite maintes critiques, mais qui bénéficie tout de même d’un certain consensus social lui conférant une légitimité relative.

La présentation de la Loi fondamentale pour la liberté des Argentins (Ley bases para la libertad de los argentinos) – familièrement appelée Loi omnibus – visait, à travers un projet de loi de 349 pages, à modifier la Constitution nationale, et ainsi à graver la doctrine libérale dans le marbre.

Ce projet fut élaboré pour satisfaire les entreprises internationales et les groupes économiques nationaux liés à ce plan gouvernemental, parmi lesquels des familles emblématiques telles que la famille Macri, la famille Caputo et des proches de la chancelière Diana Mondino. Par le biais du plan « Argentine à vendre », l’objectif est d’accorder de grandes concessions commerciales aux « rois du marché », ou encore des avantages aux organismes de prêts internationaux tels que le Fonds monétaire international (FMI).

Dans le cadre de ce projet de Loi fondamentale est orchestrée une réforme structurelle de l’État qui comprend un ensemble de mesures de flexibilisation du travail, de privatisation des entreprises publiques et des médias, de démembrement des ministères et des services gouvernementaux. Plus grave encore, elle vise à jeter les bases d’une mise en vente du pays, permettant le libre pillage des biens communs, dans des domaines stratégiques pour le monde des affaires, tels que le lithium, la pêche, les mégamines, la voie navigable Paraná-Paraguay, etc.

Avec ce paquet de réformes structurelles, la culture, la défense des droits humains, l’éducation publique, le financement des universités nationales et la recherche scientifique publique sont également menacés. Heureusement, ce projet de Loi omnibus a été stoppé à temps, mais le gouvernement n’a pas renoncé à son plan de réforme et entend l’imposer par d’autres moyens. (…)

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