Bilan situation des droits humains Colombie en 2012
La situation des droits de l’Homme en Colombie continue à être très délicate. Il faut mentionner les avancées significatives du droit en matière de droits humains à travers le décret 4100 de 2011 qui crée et organise le système national des droits humains et du droit humanitaire international. En 2011, est ratifiée la loi des victimes de restitution des terres, la loi de la protection des populations indigènes et enfin se crée l’Unité de protection. La première semaine de Décembre 2012, lors de la rencontre nationale des droits de l’Homme, la vice-présidence de la République a annoncé la création d’une politique publique des droits humains ;
Ces « avancées » ont permis à ce que la Colombie soit retirée, en 2012, du chapitre IV du rapport annuel sur les droits Humains de la Commission Interaméricaine. La Comision Justicia y Paz regrette cette décision et la considère comme le résultat direct de l’effort du gouvernement pour construire un discours et un langage très éloigné de la réalité.
Cette normativité contraste avec ce que vit réellement la population sur le terrain au milieu de l’augmentation de la présence militaire et des menaces, des persécutions, des disparitions, des assassinats et de l’invasion de leur terre par des “occupants de mauvaise foi”(1) . Le niveau de stigmatisation et de criminalisation des défenseurs des droits humains de la part du gouvernement est encore très élevé et l’inactivité et l’inefficacité des institutions tant régionales que nationales pour assurer la protection des citoyens est dramatique.
Il faut également mentionner la récente approbation de la nouvelle juridiction militaire qui vient augmenter le niveau d’impunité et qui a été rejetée par onze rapporteurs spéciaux de l’ONU et par le système interaméricain des droits de l’Homme. Cette approbation ajoutée à la décision du président colombien Manuel Santos de sortir du Pacte de Bogota suite à la sentence en faveur du Nicaragua de la Cour internationale de Justice est très inquiétante.
Jusqu’à aujourd’hui les quelques garanties de protection dont ont bénéficié les communautés victimes de la guerre en Colombia ont été permises grâce au système Interaméricain. De fait, si l’État colombien s’éloigne des traités internationaux, il est légitime de craindre une aggravation des conditions de protection des communautés.
Le développement des mégaprojets au niveau national (mines, barrages, zones de monoculture) a généré de sérieuses conséquences dans les communautés tant au niveau de la dégradation de l’environnement qu’au niveau de la qualité et la force du lien social. En 2012, avec lesdites ’locomotives’ du gouvernement, se sont construites de lourdes infrastructures qui empêchent le respect intégral des droits de l’Homme. La hausse de l’activité de ces mégaprojets prévue en 2013 va venir fragiliser d’autant plus les droits humains dans les communautés.
Les actuels dialogues de paix entre le gouvernement colombien et la guérilla FARC-EP constituent un moment historique pour que les communautés victimes du conflit armé puissent faire leurs propositions en terme de lutte contre l’impunité, pour la protection environnementale et la souveraineté alimentaire à travers notamment un nouvel agencement de leurs territoires.
Cette initiative de plan d’agencement territorial alternatif consiste à ce que les communautés, connaissant mieux leur territoire, puissent véritablement se l’approprier et proposer des alternatives aux projets nationaux. Un des objectifs à long terme de ce plan est en autres d’éviter l’exil de la jeunesse vers des emplois non qualifiés dans les zones urbaines en les intégrant à la planification et à la gestion de leur territoire.
Au début du mois de Décembre 2012, quelques représentants des communautés accompagnées par l’association Justicia y Paz ont participé à trois espaces de participation de la société civile : Rencontre Internationale – peuples construisant la paix, Rencontre des femmes pour la paix et le forum agraire.
(1) Les occupants de mauvaise foi sont des grands propriétaires qui ont étendu leur droit de propriété sur des terres de droit collectif ou individuel en dépit de toute législation ou en corrompant l’institution en charge de celle-ci.