Communiqué de France Amérique Latine. Situation de militarisation dans le sud et le sud-est mexicain et au sein des territoires zapatistes

France Amérique Latine exprime sa grande inquiétude sur la situation de violence au Mexique. Il ne s’agit pas ici de prendre position sur l’ensemble des changements politiques en cours depuis six mois dans le pays, mais de constater avec préoccupation ce qui se passe dans le sud et le sud-est du pays, et dans les États du Chiapas et du Guerrero.

Depuis 25 ans, au Chiapas, le mouvement zapatiste résiste et lutte pour construire son projet d’autonomie. L’armée a toujours été présente sur le territoire zapatiste mais, dans les derniers mois, une recrudescence de l’activité militaire a été signalée par diverses organisations de défense des droits humains, dont le centre Fray Bartolomé de las Casas. 
À cela s’ajoutent les six mille éléments de la Garde Nationale, police militaire créée par le nouveau gouvernement, qui ont été déployés dans l’État du Chiapas pour contrôler l’entrée de migrant.e.s, venu.e.s, notamment d’Amérique centrale et du sud, de la Caraïbe et même d’Afrique, par la frontière sud du Mexique. 
 
Alors que le gouvernement lui-même reconnait que les taux d’insécurité dans les territoires zapatistes sont parmi les plus faibles du pays, France-Amérique Latine s’inquiète de cette stratégie militariste qui assombrit les espoirs portés par le gouvernement d’Andrés Manuel López Obrador aux yeux de millions de mexicain.e.s en faveur d’un virage démocratique dans le pays. Une telle démocratisation ne saurait s’opérer alors que, en parallèle, la violence et des pressions s’exercent sur des femmes et des hommes qui se battent pour la justice et la dignité. Il est également inquiétant de constater que, dans les régions comme l’État de Guerrero, où les populations se sont organisées autour de leurs polices communautaires, on assiste à une recrudescence de la violence institutionnelle sur fond de narcotrafic.
Partout dans le pays, mais tout particulièrement au Chiapas, le gouvernement met en place des projets polémiques, dans les secteurs du tourisme, de l’énergie et de la prospection minière, critiqués par le mouvement zapatiste et une partie du mouvement écologiste et populaire.  Il existe près de cent concessions minières sur 15% du territoire de cet État, certaines sur des aires naturelles protégées.

La stratégie adoptée par le gouvernement pourrait conduire à une totale rupture entre zapatistes et exécutif. La reprise des négociations, interrompues depuis 1996, pourrait pourtant être de nature à faire avancer vers une solution pacifique si elle se fait sur la base du respect mutuel, du droit à l’autodétermination et en tenant compte des profondes avancées obtenues, en un quart de siècle, par les paysans indiens du Chiapas (et leurs soutiens) en matière d’organisation et de construction d’une autonomie communautaire, alternative au néolibéralisme.
 
 
Paris, le 2 juillet 2019