Esclavage moderne au Brésil: la justice internationale en lice

La Cour interaméricaine des Droits de l’Homme, basée au Costa Rica, examine à partir de ce jeudi le cas de centaines de travailleurs brésiliens soumis à de l’esclavage moderne dans une hacienda de l’Etat du Pará, dans le nord du pays. Face à l’inaction de la justice brésilienne, plusieurs organisations de lutte contre le travail forcé, comme la Commission pastorale de la terre au Brésil, ont porté l’affaire devant la justice interaméricaine.

Les travailleurs saisonniers peuvent être employés à la récolte de la canne à sucre comme ici, dans une ferme de Piracicaba, au Brésil. Paulo Fridman/Bloomberg/Getty
Les travailleurs saisonniers peuvent être employés à la récolte de la canne à sucre comme ici, dans une ferme de Piracicaba, au Brésil.
Paulo Fridman/Bloomberg/Getty

C’est un sujet qui empoisonne le Brésil depuis de nombreuses années, et, malgré la mise en place de politiques publiques pour éradiquer l’esclavage moderne, le problème persiste. Il s’agit de plaintes déposées entre 1989 et le début des années 2000 et qui n’ont donné lieux à aucune condamnation ni réparation par la justice brésilienne d’où cette volonté de porter ces affaires devant la justice internationale. Les cas qui vont être étudiés à compter d’aujourd’hui par la Cour interaméricaine des droits de l’homme et qui concernent 340 personnes ne sont certes pas nouveaux, mais ils sont représentatifs d’une situation qui reste d’actualité.

L’esclavage moderne au Brésil est particulier comme l’explique le père Xavier Plassat, coordinateur la Commission pastorale de la terre au Brésil. « Il s’agit dans la généralité des cas de personnes qui travaillent pour un temps déterminé. Ce sont des tâches saisonnières généralement, pour lesquelles on fait venir des travailleurs migrants temporaires, de régions lointaines. Les intermédiaires, ceux qui les font venir, leur font souvent des promesses merveilleuses et, selon le principe bien connu de toute traite humaine, vous avez des promesses trompeuses, un mécanisme d’endettement des personnes se met en place et elles se retrouvent pieds et poings liés aux lieux de leur exploitation ».

Selon le père Xavier Plassat, entre 1995 et aujourd’hui, 51.000 cas d’esclavagisme moderne auraient été répertoriés. Il estime que 25.000 travailleurs chaque année sont victimes de ce système, des personnes qui ont généralement entre 15 et 30 ans.
En portant cette affaire devant la Cour interaméricaine des droits de l’homme, les organisations qui luttent contre ce fléau espère que l’Etat brésilien va prendre la mesure du problème et que la justice brésilienne prononcera enfin des condamnations et réclamera des dommages pour ces dizaines de milliers de victimes.

 

Source :

RFI, le 18 février 2016