Haïti : un séisme meurtrier (revue de presse)

Après le puissant séisme qui a frappé le sud-ouest d’Haïti, le samedi 14 août 2021, les hôpitaux sont saturés. Le bilan provisoire de la catastrophe est de 1 300 décès et 5 700 blessés.

Les Cayes, dans le sud-ouest: scènes de dévastation après le séisme du 14 août 2021.  
© STANLEY LOUIS/AFP

Après le séisme, l’inquiétude avant la dépression tropicale (interview de Frédéric Thomas du CETRI
et reportage d’Amélie Baron / RFI)

Deux jours après le séisme qui a frappé le sud-ouest d’Haïti, samedi 14 août, toutes les rues des Cayes, hormis les trois grands axes, étaient entièrement bloquées lundi matin (16 août 2021). Les habitants, traumatisés, ont tous dormi dehors. Le risque des répliques est permanent et des bâtiments lourdement endommagés pourraient s’effondrer. Sur la route qui mène à Port Salut, les maisons, plus simples, ont pour la plupart résisté mais cela n’a pas empêché les habitants de passer la nuit à l’extérieur. À l’Hôpital de Port-Salut, la situation des blessés est elle aussi précaire. Ils restent dans la cour, de peur de subir à l’intérieur les conséquences des secousses sismiques, témoigne notre correspondante dans le pays Amélie Baron. Mais ils pourraient être victimes, dès ce soir, des pluies torrentielles qui pourraient commencer avec la dépression tropicale Grace.  

«La classe politique porte une énorme responsabilité» 

«Haïti est l’un des pays les plus affectés par le réchauffement climatique, il est sur la route des cyclones, sur une faille sismique si bien qu’il est affecté tous les deux, trois ans par une catastrophe naturelle de grande ampleur mais la classe politique porte une énorme responsabilité», dénonce Frédéric Thomas, docteur en Sciences Politiques, chargé d’études au CETRI et auteur du livre L’échec humanitaire : Le cas haïtien. «Elle a tourné le dos aux besoins de la population en ne s’intéressant qu’à ses propres intérêts. En accroissant l’appauvrissement de la population, elle a véritablement désarmé les institutions pour répondre à ces catastrophes», ajoute-t-il.

La Communauté internationale se mobilise

Une équipe de 65 sauveteurs professionnels de l’Agence des États-Unis pour le développement international, USAID, est arrivée en Haïti, dimanche (15 août 2021), avec dans ses bagages, 25 000 kilos de médicaments et de matériels techniques. Les avions d’aide envoyés par le Venezuela, la Colombie, ou encore par la République dominicaine voisine ont également atterri dans la nuit sur le tarmac de l’aéroport international à Port-au-Prince. Toutes ces livraisons ont été réceptionnées par les équipes de la Protection civile haïtienne qui sera en charge d’organiser la distribution.

Écouter le reportage et l’interview de Frédéric Thomas ci-dessous ou ici

Autres articles de RFI sur la situation en Haïti ici


Le bilan du séisme s’alourdit, les secours s’affairent
(interview de Frédéric Thomas / France 24)

Des bâtiments éventrés, des dépouilles coincées dans les décombres. Deux jours après le puissant séisme qui a frappé Haïti, faisant plus de 1.300 morts, les secours s’activaient lundi à la recherche des personnes disparues ou bloquées sous les ruines, à l’approche d’une tempête qui menaçait d’aggraver encore la situation. Frédéric Thomas, docteur en Sciences politiques et chargé d’étude au CETRI, explique comment gérer un tel drame dans un pays qui manque de tout : “Ceux qui gèrent en première ligne sont les haïtiens et les haïtiennes. C’est eux qui sont là, sur place, c’est eux qui sauvent les vies (…)”

(…) Lire la suite de l’article de France 24 ici


Séisme à Haïti : ces leçons qui n’ont pas été tirées
depuis la catastrophe de 2010
(Axel Perru / Marianne)

Régulièrement victime de catastrophes naturelles meurtrières, le pays ne semble toujours pas préparé à les affronter.

Séisme à Haïti : ces leçons qui n'ont pas été tirées depuis la catastrophe de 2010
La plupart des habitations civiles sont construites en dépit des normes parasismiques. AFP

Onze ans après le tremblement de terre de 2010, Haïti éprouve toujours autant de difficultés pour faire face aux catastrophes naturelles. Le pays déplore déjà près de 1 300 morts et 5 700 blessés à cause du séisme de magnitude 7,2 intervenu samedi 14 août. Le bilan pourrait s’aggraver dans les jours à venir, alors que la recherche des personnes disparues se poursuit.

Ce tremblement de terre, l’un des plus puissants cette année, reste cependant moins meurtrier que celui de 2010, qui avait fait près de 200 000 victimes. L’écart du nombre de morts ne signifie pas pour autant que le pays s’est mieux préparé. L’épicentre du séisme, à proximité de Cayes, la troisième ville du pays, a surtout touché une zone rurale du pays. Cette catastrophe aurait pu être plus ravageuse si elle avait eu lieu à proximité de la capitale Port-au-Prince. Trois raisons illustrent les difficultés du pays à tirer les leçons.

Un urbanisme anarchique

Le manque de politique claire d’urbanisme laisse les habitants s’installer dans des endroits potentiellement dangereux et construire avec des matériaux inadaptés. Depuis 2010, seuls les bâtiments publics comme la Cour de cassation ou le Ministère du tourisme ont été rénovés dans le respect des normes antisismiques, selon le géographe haïtien Jean-Marie Théodat. « Les habitations civiles ont quant à elles reproduit les mêmes erreurs, » ajoute-t-il auprès de Marianne. Absence de mesure parasismique et autoconstructions y sont la règle. « Ils ont sous-estimé le risque en jugeant qu’un tel séisme n’aurait pas lieu deux fois dans le même siècle. »

Cet urbanisme défaillant n’est pas lié à un manque de moyen, mais à un manque d’organisation. « Ça ne coûte pas beaucoup plus cher de construire moins lourd, avec du bois ou de la paille », insiste le chercheur. Les constructions démolies sont en majorité faites de briques ou de parpaings, des matériaux durs, peu coûteux, qui ont causé la mort de nombreux habitants condamnés sous les décombres. « Ils pensent qu’en construisant plus dur, ils seront protégés, raconte Jean-Marie Théodat. C’est tout l’inverse. » Le bois supporte bien mieux les contraintes qu’imposent les mouvements de la croûte terrestre.

Le manque d’organisation est avant tout dû à des lacunes de gouvernance, selon le chercheur. « Au Japon ou au Chili, des pays qui gèrent bien mieux les séismes, on ne peut pas construire n’importe comment ! » fustige-t-il. Des séismes aussi puissants impressionnent, mais sont beaucoup moins meurtriers. Un séisme de magnitude équivalente a ainsi été enregistré le 13 février dernier, à Fukushima, faisant un mort et plus de 185 blessés. « En Haïti, le gouvernement ne sait même pas localiser les lots car aucun cadastre n’a été enregistré par l’état civil », déplore le maître de conférences. (…)

(…) Lire la suite de l’article ici


Haïti en tremblement de terre :
ultime station d’un interminable chemin de croix ?
(Jean-Jacques Kourliandsky / Nouveaux Espaces Latinos)

Photo : BBC Espagnol

Les gazettes, radios et télévisions de France et de Navarre ont rapporté et exposé depuis le 14 août 2021 au soir images et témoignages du tremblement de terre ayant violemment secoué le sud-ouest de Haïti. Jamais traité en manchette et toujours avec émotion. Une émotion parfois accompagnée de commentaires fatalistes et apitoyés. Au-delà du sang et des larmes, pas grand chose d’autre, pas ou peu de débats, d‘interrogations. Comme si tout cela n’interpellait pas, dix ans après le drame similaire qui, le 12 janvier 2010, avait dévasté la capitale, Port-au-Prince, causant la mort de plus de 200 000 personnes.

Le fonctionnement des médias est-il en cause ? La priorité est donnée à l’information spectaculaire du moment. Et il est vrai que la débâcle militaire, diplomatique et politique, des États-Unis en Afghanistan est, de ce point de vue, centrale. Parce qu’il s’agit des États-Unis, puissance encore imposante. Parce que ses télés et réseaux sociaux particulièrement mobilisés proposent une offre d’images marquantes, reléguant tout autre sujet en deuxième ou troisième ligne. « L’élan de solidarité », a écrit dans La Croix le géographe haïtien Jean-Marie Théodat, aurait été « refroidi » par la relative proximité de la catastrophe de 2010. Peut-être. Il est vrai que les 2000 victimes identifiées au 18 août 2021 font pâle figure au palmarès des « unes » racoleuses et pourvoyeuses d’écoute et de fonds de solidarité, face aux 200 000 du 12 janvier 2010. Il est vrai aussi qu’à la différence des terribles événements de 2010, la France officielle n’a pas dit grand chose. Les Haïtiens de France, préoccupés, ont mobilisé leur radio et télé locale Fanfan Mizik. Ils ont avec leurs compatriotes d’Allemagne, Belgique, Bénin, Canada, Espagne, diffusé un appel à rompre le silence : « Stop silence Haïti ». (…)

(…) Lire la suite de l’article ici