Les dernières forêts primaires de l’Amazonie équatorienne menacées par l’élargissement de la frontière pétrolière

Depuis 2010, le Gouvernement National d’Équateur annonce un appel d’offres pour l’autorisation d’exploiter 21 nouveaux blocs pétroliers situés dans le centre-sud de l’Amazonie équatorienne. Cette onzième Ronde Pétrolière affecterait près de 3 millions d’hectares de forêt amazonienne dans les provinces de Napo, Pastaza, Morona Santiago et Zamora Chinchipe.

carteamazonie

Auteur : Roberto Narvaez, Fondation Pachamama, Équateur.

Jusqu’à maintenant, en Équateur, l’activité pétrolière était concentrée dans la zone nord de l’Amazonie, dans les provinces de Sucumbíos, Orellana et Napo, où l’industrie pétrolière a laissé un sévère impact environnemental, culturel et économique. Ces situations illustrent les mauvais exemples du « développement » à tout prix, très négatif pour les populations locales qui concentrent les indices les plus élevés de pauvreté et d’inattention de l’Etat, comme l’a signalé le président Rafael Correa lui-même, le 10 octobre 2011 en se basant sur une étude de l’Institut Équatorien de Statistiques et Recensement.
Les dépenses publiques croissantes et le discours à l’encontre des organismes multilatéraux traditionnels (Banque Mondiale, Fonds Monétaire International) ont conduit le gouvernement équatorien à chercher des financements auprès de nouveaux alliés, les gouvernements de Chine et de Corée du Sud par exemple.
Ces deux dernières années, selon le quotidien Hoy, la Chine a accordé des prêts équivalents à
6 700 000 dollars à l’Équateur.
C’est ainsi que l’Équateur a établi une alliance financière avec la Chine, dont une grande partie est constituée de « paiements anticipés pour la vente de pétrole », et dont les gisements se trouvent dans le centre-sud de l’Amazonie équatorienne.
La tendance du gouvernement actuel à élargir la frontière extractive, est fondée économiquement et politiquement sur la base d’un scénario électoral proche, dans lesquels les bons, les subventions, et la construction d’infrastructures seront une plateforme fondamentale pour les objectifs électoraux du gouvernement. C’est ainsi que serait affectée l’Amazonie centre-sud d’Équateur, une zone qui a su conserver plus de 80% de sa couverture végétale naturelle et hautement riche en biodiversité. Cette zone a réussi à garder ses conditions naturelles quasiment intactes, grâce à la gestion traditionnelle de ses ressources naturelles par les sept nationalités indigènes qui habitent le territoire.
L’autorisation par le sous secrétariat des hydrocarbures d’exploiter 21 nouveaux blocs pétroliers affectera à hauteur de 75.91% les territoires ancestraux Kichwa, Andoas, Shiwiar, Achuar, Shuar, Waorani et Sápara, qui représentent près de 3 millions d’hectares.
Par l’intermédiaire des directions provinciales ouvertes dans les villes de Puyo (capitale de la province de Pastaza) et Macas (capitale de la province de Morona Santiago) le sous-secrétariat des hydrocarbures a bafoué les droits des nationalités amazoniennes en lançant le processus de la onzième ronde pétrolière sans consulter les communautés, comme l’y obligeait la règle de consentement libre, préalable et informé. Il menace les formes sociales d’organisation traditionnelle, le droit à l’auto-gouvernement, et à l’autodétermination des peuples indigènes, en pénétrant dans les communautés sans le consentement des autorités traditionnelles et en cherchant à fragmenter leur organisation interne.
Si cette activité continue, l’État mettra en grave péril la culture de sept nationalités indigènes, ce qui pourrait également impliquer un processus d’ethnocide et génocide : une situation déjà connue dans le nord de l’Amazonie équatorienne par les peuples Tetetes et Sansahuaris dans les années 1960 et 1970, en conséquence de l’activité pétrolière.
Les nationalités amazoniennes du centre-sud de l’Équateur se retrouvent ainsi face à une lutte forte, constante et définitive, afin d’impulser un pays plurinational dont les politiques publiques promeuvent le Buen Vivir ou Sumak Kawsay sur la base du simple exercice de leurs droits.