Panorama du cinéma colombien: «La Roya» de Juan Sebastián Mesa ouvre le ban (Isabelle Le Gonidec / RFI)


Le cinéma en Colombie se porte pas trop mal, malgré le manque de moyens et de soutien institutionnel, la pandémie de Covid-19 qui complique les tournages… Et chaque année, le Panorama du cinéma colombien est là pour en témoigner et nous faire découvrir ses dernières pépites. Juan Sebastián Mesa est un jeune réalisateur que l’équipe du Panorama suit film après film.

Le deuxième et dernier long métrage de Juan Sebastián Mesa, La Roya, sélectionné dans la compétition longs-métrages, ouvre le festival qui se tient à Paris jusqu’au 11 octobre. Son précédent film, Los nadie, avait déjà été choisi en lever de rideau du Panorama du cinéma colombien en 2017. Le cinéma, c’est aussi des histoires de compagnonnage, de chemins qui se croisent et se recroisent. « Quand mon film Los Nadie a gagné le Grand prix coup de cœur du festival Cinélatino à Toulouse, en 2017, l’équipe du Chien qui aboie (l’association qui organise le Panorama) a décidé de se lancer dans la distribution du film pour lequel ils avaient eu un coup de cœur, en France, avec l’argent du prix », nous raconte Juan Sebastián Mesa. Il était naturel que ce nouveau film, découvert au dernier festival de San Sebastián où le réalisateur (il est né en 1989) avait été retenu cette année dans la sélection des Jeunes réalisateurs, fasse donc l’ouverture de cette nouvelle édition du Panorama.

Affiche du film La Roya de Juan Sebastián Mesa

Après la quête de jeunes graffeurs de Medellín, racontée en noir et blanc sur une bande son de punk local dans Los nadie (titre emprunté à un poème de l’Uruguayen Eduardo Galeano et que l’on pourrait traduire par « ceux qui n’existent pas »), on découvre le quotidien d’un jeune planteur de café hanté par le suicide de son père. Le vert sombre des plants de café, les écharpes de brume qui s’accrochent aux cimes des arbres, le jaune éclatant du guyacana, un arbre de la région, et du poitrail du turpial, un oiseau que l’on met en cage pour son chant, les bruits de la forêt… La nature, par la force de présence tant à l’image que dans la bande son, toutes deux très soignées, est presque le deuxième protagoniste de cette histoire. Les plans sont larges comme l’horizon de Jorge. Il vit avec son grand-père malade sur la plantation de café familiale – dont on comprend qu’une partie des terres a été volée à la famille – et donne à son frère Carlos sa part du revenu de la vente du café qu’il a lui cultivé. « C’est bien peu, lui dit Carlos, on ferait mieux de vendre la ferme ». Partir à la ville, c’est ce qu’ont fait la plupart des jeunes de ces montagnes qui ne reviennent au village que le temps de la fête patronale.

Rester ou partir ?

Jorge doute, fait des cauchemars dans lesquels son père lui apparaît. Son père qui lui enjoint en rêve de ne pas vendre la ferme. « J’ai été marqué enfant par l’histoire d’un suicide que l’on racontait dans ma famille, nous explique Juan Sebastian Mesa, et quand je me suis documenté sur le sujet, j’ai découvert que la région du café était la région de Colombie où il y avait le plus fort de suicide. » Isolement, démesure du paysage et des éléments, usurpation des terres, variation des prix du café, raisons intimes (…)

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