🇵🇪 Pérou : un an de gouvernement Boluarte, un bilan noir (Communiqué de France Amérique Latine fr.esp.)


Le 7 décembre 2022, Dina Boluarte accédait au pouvoir suite à un coup d’État institutionnel. Immédiatement, un mouvement populaire d’une force et d’un niveau de conscience politique inédits, parti du sud andin, a gagné tout le territoire national pour réclamer sa démission, la fermeture du congrès, de nouvelles élections et une Assemblée constituante.

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Manifestante face à la police (Lima 7 décembre 2023). Photo : Angela Ponce / REUTERS

Sourd aux protestations et aux revendications populaires, le gouvernement a répondu par une répression brutale et sanglante, causant plus de soixante-dix victimes mortelles, des faits qualifiés de crimes contre l’humanité par toutes les organisations de défense des droits humains nationales et internationales. À ce jour, les responsables n’ont été ni inquiétés ni punis tandis que les victimes et leurs familles réclament toujours justice. Non seulement les droits à la vie et à la protestation sociale ont été violés, mais un véritable processus de criminalisation des mouvements sociaux a été mis en place, avec une persécution judiciaire de leurs dirigeants.

Pendant les mois suivants, la droite et l’extrême droite péruvienne ont fait main basse sur toutes les institutions et pouvoirs de l’État y compris judiciaire, provoquant une rupture du principe démocratique fondamental d’indépendance des pouvoirs. Lors de la marche à Lima du 16 septembre dernier,  soixante organisations sociales, syndicales et de défense des droits humains dénonçèrent cette situation et formèrent un Front démocratique. 

De leur côté, contre la volonté des citoyens exprimée lors du référendum de 2018, les députés décidèrent de modifier la Constitution en vigueur et le système électoral pour s’assurer leur continuité au pouvoir.  

Depuis le tsunami représenté par le scandale « Odebrecht » de 2017, le Pérou a la triste réputation d’être l’un des pays les plus corrompus avec ses cinq ex-Présidents en prison, suicidé ou sous procédures judiciaires. Un nouveau scandale vient de frapper l’institution judiciaire au plus haut niveau, la Procureure Générale de la Nation, Patricia Benavides, ayant été mise en accusation pour présumée direction d’une organisation criminelle au sein du Ministère Public. Des membres de cette organisation sont en détention, ayant avoué les faits comme le principal assesseur de la Procureure, Jaime Villanueva. Ils étaient chargés de négocier les votes des parlementaires pour permettre le classement sans suite ou la disparition de leurs dossiers de corruption.  Au Pérou il n’y a plus ni démocratie, ni justice !

Pour couronner cette année noire de ce gouvernement illégitime, le Tribunal Constitutionnel vient de décider, le 4 décembre, la libération immédiate de l’ancien dictateur Alberto Fujimori, condamné à vingt-cinq ans de prison pour crimes contre l’humanité, malgré la résolution formelle de la Cour Interaméricaine des droits de l’homme l’interdisant. Cette décision, considérée comme une insulte aux victimes et aux familles, en rupture avec le cadre légal international, a immédiatement provoqué sa condamnation par toutes les organisations de défense des droits humains au niveau national et international, l’indignation et la colère des citoyens péruviens.

Le 7 décembre 2023, pour marquer l’année de ce gouvernement autoritaire et dictatorial, d’importantes manifestations se sont tenues dans le pays, pour une «  journée de la dictature » en réponse à la convocation de la CNUL (Coordination Nationale unitaire les luttes). Les manifestant.es ont dit « Non à la libération du dictateur Fujimori ! », « Non à l’impunité ! », et réclamé justice pour toutes les victimes et leurs familles. 

Face à cette situation, France Amérique Latine (FAL) :

  • renouvelle sa totale solidarité avec les populations en lutte contre ce régime autoritaire et dictatorial de Dina Boluarte et s’associe à leurs revendications,
  • condamne fermement la décision illégale de libération du dictateur Alberto Fujimori
  • appelle toutes les organisations syndicales, sociales et politiques démocratiques à se joindre à nous pour exiger d’être reçus par la ministre de l’Europe et des Affaires Étrangères afin d’évoquer la grave situation péruvienne,
  • dénonce le silence du gouvernement français, du président de la République et de l’Union Européenne, et les appelle à se prononcer clairement pour la fin de ce régime issu d’un coup d’État institutionnel et à s’opposer à la mise en liberté d’un génocidaire du peuple péruvien.

Bureau national de FAL
Paris, 12 décembre 2023


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