🇪🇨 Référendum et consultation populaire en Équateur: approbation des mesures gouvernementales de sécurité et rejet des mesures économiques (revue de presse)


Dans une journée marquée par l’assassinat d’un directeur de prison de la province de Manabi, les Équatoriens ont approuvé le durcissement de la politique anti-délinquance proposée par le président Daniel Noboa. En revanche, ils ont répondu «non» à deux questions économiques dont une sur la flexibilisation du marché du travail, mesure vivement critiquée par les syndicats et les organisations indigènes, et l’autre sur la reconnaissance de l’arbitrage international pour résoudre les litiges en matière d’investissement et de commerce.

Photo : Reuters

Équateur : derrière le « oui » au référendum sur « la guerre contre la drogue », le peuple rejette les mesures ultralibérales (Vadim Kamenka / L’Humanité)

Face au délitement du pays, le président Daniel Noboa a organisé un large référendum, dimanche 21 avril. Cette consultation légitime sa politique sécuritaire mais s’avère un échec sur le volet social et économique afin de réduire les droits des travailleurs.

Un homme vote au référendum à Guayaquil, en Équateur, le dimanche 21 avril 2024.© Santiago Arcos/Reuters

Ces dernières années, l’Équateur a plongé dans les mêmes affres qui ravageaient la Colombie durant les années 1990 et 2000. Face au délitement de la société et l’effondrement de l’État de droit, les 13,6 millions d’électeurs équatoriens ont voté majoritairement dimanche 21 avril en faveur d’un durcissement sécuritaire, lors d’un référendum.

Portées par le président Daniel Noboa, neuf des onze mesures ont été approuvées, le « oui » l’ayant emporté avec 65 % des suffrages contre 35 % pour le « non », selon le Conseil national électoral (CNE) qui a précisé que la participation avait été de 72 %.

Élu en novembre pour dix-huit mois, le dirigeant qui devrait briguer un nouveau mandat en 2025, a demandé l’approbation de réformes juridiques dans les domaines de la sécurité, de la justice et du travail. Elles vont définir notamment « la direction et la politique d’État (…) contre la violence, le crime organisé, la lutte contre la corruption » a défendu Daniel Noboa.

Sur le volet sécuritaire, les mesures actées portent sur l’extradition vers les États-Unis des narcotrafiquants, la participation de l’armée au contrôle des armes, l’alourdissement des peines pour les délits liés au crime organisé et sur la possibilité pour les forces de sécurité d’utiliser des armes saisie. […]

Les deux refus sont un véritable signal envoyé à la politique sociale du gouvernement. Pour le quotidien de gauche La Jornada : « le peuple équatorien a rejeté une volonté des milieux d’affaires et des élites oligarchiques » en votant contre l’arbitrage international comme méthode de résolution des différends en matière d’investissement, contractuels ou commerciaux et contre la modification de la Constitution et du Code du travail sur la formalisation d’un travail payé à l’heure. (…)

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«Plus d’outils pour combattre la criminalité» : en Équateur, un paquet de mesures sécuritaires approuvées par référendum (Libération/ AFP)

Une majorité d’Équatoriens se sont prononcés dimanche 21 avril en faveur de mesures visant à durcir la législation contre le narcotrafic et les gangs, notamment l’extradition de ressortissants liés au crime organisé.

Le président équatorien Daniel Noboa assiste à une cérémonie de remise d’équipements à la police. (Dolores Ochoa/AP)

Le président équatorien Daniel Noboa vante un «triomphe». Une majorité de ses compatriotes se sont prononcés dimanche 21 avril pour l’extradition des ressortissants liés au crime organisé, lors d’un référendum visant à durcir la législation contre le narcotrafic et les gangs. Le «oui» à cette proposition l’a emporté avec 65 % des suffrages, contre 35 % pour le «non», selon un calcul préliminaire du Conseil national électoral (CNE). Parmi les principales propositions adoptées figure l’extradition des ressortissants équatoriens liés au crime organisé – une mesure très crainte pour les personnes concernées quand elle est appliquée vers les Etats-Unis -, dans un pays devenu la principale plateforme de l’exportation de cocaïne produite en Colombie et au Pérou voisins..

Quelque 13,6 millions d’électeurs étaient appelés aux urnes pour répondre par oui ou par non à onze questions posées par le président Noboa. Les votants ont répondu «oui» à neuf questions portant sur la sécurité, selon les résultats du CNE, qui a précisé que 72 % des électeurs équatoriens avaient participé au scrutin. Le vote en lui-même s’est déroulé sans incident notable sur tout le territoire. Mais la journée a été marquée par l’assassinat du directeur du pénitencier N.4 de Manabi (sur la côte Pacifique), «victime d’un attentat», selon l’administration pénitentiaire. L’homme a été exécuté par balles par des inconnus alors qu’il était attablé à un restaurant.

Une majorité d’Équatoriens se sont prononcés dimanche pour l’extradition des ressortissants liés au crime organisé, lors d’un référendum visant à durcir la législation contre le narcotrafic et les gangs, un résultat qualifié de “triomphe” par le président Daniel Noboa.

Le “oui” à cette proposition l’a emporté avec 65% des suffrages, contre 35% pour le “non”, selon un calcul préliminaire du Conseil national électoral (CNE). La mesure est particulièrement redoutée des narcotrafiquants, celle-ci visant notamment à rendre possible des extraditions vers les États-Unis.

Les principales propositions de cette consultation avaient pour mission de définir notamment «la direction et la politique d’État […] contre la violence, le crime organisé, la lutte contre la corruption» selon le chef de l’État, à l’image de la mesure sur l’extradition. «Nous avons défendu le pays, maintenant nous aurons plus d’outils pour combattre la criminalité et rendre la paix aux familles équatoriennes», a réagi le président Daniel Noboa sur les réseaux sociaux après le vote, avant de faire état d’un «triomphe» à l’annonce du résultat officiel.

Les Équatoriens se prononçaient également sur la participation de l’armée au contrôle des armes, l’alourdissement des peines pour les délits liés au crime organisé et sur la possibilité pour les forces de sécurité d’utiliser des armes saisies. Sur toutes ces questions sécuritaires, les électeurs ont appuyé les demandes du président Noboa.

Les Équatoriens ont en revanche rejeté deux propositions : l’une sur la formalisation d’un travail payé à l’heure, mesure vivement critiquée par les syndicats et les organisations indigènes, où le «non» l’a emporté à 69 % selon le CNE. L’autre sur la reconnaissance de l’arbitrage international pour résoudre les litiges en matière d’investissement et de commerce (65 % de «non»). (…)

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L’Équateur s’est prononcé lors d’un référendum sur la lutte contre la criminalité (France 24)

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L’Équateur dit “non” à l’arbitrage international : une décision souveraine avec une résonance internationale dans la lutte contre l’ISDS

Le 21 avril a été une journée historique. Le peuple équatorien a massivement voté NON à la question référendaire sur un éventuel retour de l’Équateur à l’arbitrage. Le gouvernement Noboa a perdu de manière retentissante sur la question D, puisque près de 65% des citoyens ont voté contre. L’Équateur reste donc en dehors de ce mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États (plus connu sous l’acronyme anglais ISDS), sept ans après avoir mis fin à tous les traités internationaux qui incluaient l’arbitrage.

Source : Acción ecológica

L’Équateur n’est pas un pays comme les autres ; il ne s’agit pas d’un référendum comme les autres. L’Équateur a une longue histoire de résistance à l’arbitrage, à tel point que la question a été expressément interdite dans la Constitution de 2008. La question D du référendum : “Êtes-vous d’accord pour que l’État équatorien reconnaisse l’arbitrage international comme méthode de résolution des litiges en matière d’investissement, contractuel ou commercial ?”, ce qui impliquerait la modification de l’article 422 de la Constitution. Depuis 2017, lorsque l’Équateur a mis fin à tous ses traités de protection des investissements contenant l’arbitrage, la droite économique a systématiquement attaqué cet article, arguant qu’il restreint la capacité du pays à recevoir des investissements étrangers.

Il s’agit d’une grande victoire pour les mouvements sociaux équatoriens qui, en un temps record d’un mois et demi, ont organisé une campagne citoyenne à l’échelle nationale. Le fait de centrer la campagne contre le référendum, dans son ensemble, sur la question de l’arbitrage s’est avéré être une grande réussite. Cette question était cachée dans une série de questions liées au programme de sécurité, en particulier l’utilisation des forces armées dans la sécurité intérieure, où le oui l’a emporté. Cependant, la victoire du non a été écrasante dans deux des questions liées aux politiques néolibérales : dans la question D sur l’arbitrage et dans la question E sur la possibilité d’autoriser des contrats de travail prévoyant un travail à l’heure.

Mais on craignait que le oui l’emporte. Cela aurait à nouveau permis aux investisseurs étrangers en Équateur de contourner la justice nationale et de poursuivre l’État devant les tribunaux d’arbitrage internationaux lorsqu’ils estiment que la politique publique a affecté leurs bénéfices de quelque manière que ce soit.L’Équateur connaissait déjà les privilèges dont jouissaient les investisseurs étrangers dans le pays.Récemment, le Transnational Institute a publié un rapport qui montre que l’Équateur occupe la cinquième place dans la liste des pays d’Amérique latine où le nombre de plaintes déposées par des investisseurs est le plus élevé, avec 29 plaintes d’arbitrage déposées par des investisseurs étrangers. Le fait le plus notable est que la moitié de ces plaintes sont liées à des activités dans les secteurs extractifs (hydrocarbures et mines). Dans un pays qui s’est organisé contre l’extraction de minerais et de pétrole dans des zones protégées, d’une grande valeur pour leur biodiversité, l’expérience ne manque pas pour parler des privilèges des investisseurs. C’est pourquoi la réponse des mouvements sociaux a été si rapide, et c’est sans doute pourquoi le résultat du non est si retentissant à la question D. (…)

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Entre souveraineté et intérêts des multinationales : quels sont les enjeux du référendum équatorien ? (Bilatéral.org)

Cet article a été publié avant le référendum. La question D visant à modifier l’article 422 de la Constitution relatif au mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États a finalement été rejetée par 65% des votants. Les enjeux en étaient importants.

Le 21 avril 2024, le gouvernement de Daniel Noboa organisera un référendum en Équateur, qui vise à modifier la Constitution nationale et à aborder des questions fondamentales, telles que la sécurité et l’investissement. Parmi les 11 questions qui font partie du référendum, la question D, en particulier, cherche à réactiver le dangereux mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États (connu sous l’acronyme anglais, ISDS).


Depuis que l’ancien président Rafael Correa a révoqué, en 2017 les traités d’investissement qui incluaient l’ISDS, le débat sur cette question revient constamment dans l’arène politique équatorienne. Pour mieux comprendre les implications et explorer les raisons derrière l’appel des mouvements sociaux à rejeter la question D au référendum, nous avons interviewé Cecilia Cherrez, membre d’Acción Ecológica et de la campagne pour un NON à la question sur l’arbitrage international au référendum.

L’article 422 de la Constitution de l’Équateur empêche la cession de la compétence souveraine à l’arbitrage international, dans les litiges contractuels ou commerciaux, entre l’État et les personnes physiques ou morales privées. Par conséquent, les traités ou instruments internationaux qui impliquent une telle cession ne peuvent être conclus, comme c’est le cas des traités bilatéraux de protection des investissements, dont le pilier central est lié à l’octroi de garanties juridiques excessives aux sociétés transnationales, qui, lorsqu’elles sont appliquées, entraînent la soumission des droits humains, collectifs et ceux de la nature , aux règles d’un tel arbitrage international [1] .

Cet article a été inspiré par la lutte sociale du début des années 2000 contre la compagnie pétrolière Occidental (Oxy), qui avait déposé une demande d’arbitrage de plusieurs millions de dollars contre l’Équateur, en réponse à la décision de l’État de résilier son contrat – Oxy ayant négocié la cession d’une partie du bloc concédé à une autre compagnie transnationale, sans l’autorisation de l’État équatorien.

Cet article constitue un bouclier essentiel contre les prétentions juridiques des grandes entreprises qui cherchent à maintenir l’impunité pour les crimes commis contre les communautés, les peuples et les différentes nations vivant dans les zones où les projets pétroliers et miniers sont imposés. Face à la résistance des mouvements sociaux, des poursuites judiciaires ont été engagées devant des tribunaux d’arbitrage internationaux, ou menacées de l’être, si les gouvernements ne “contrôlent” pas les protestations des populations. Des personnes défendant les territoires, l’eau, l’agriculture paysanne et l’autonomie des communautés, ont ainsi été réprimées et traitées comme des criminelles

L’Équateur est actuellement le cinquième pays le plus poursuivi dans le cadre de l’arbitrage international en Amérique latine et dans les Caraïbes. Il a fait l’objet de 29 actions en justice, dont 21 ont déjà été résolues par des tribunaux arbitraux ; 14 sentences ont été rendues en faveur des entreprises et 7 seulement en faveur de l’État. (…)

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