🇸🇻 Au Salvador, « les défenseurs sont des proies faciles pour ceux qui détiennent le pouvoir » (entretien avec Vidalina Morales par Emilia Delfino, Mongabay / Traduction CDHAL)


Vidalina Morales, présidente de l’Association pour le développement économique et social de Santa Marta (ADES), au Salvador, est l’une des militantes sociales incontournables de son pays. Marqué par la violence et les tensions politiques, celui-ci est un territoire hostile aux défenseurs de l’environnement et des droits humains, alors que le gouvernement tente de réintroduire l’exploitation minière après huit ans d’interdiction de cette activité.


Fille d’un père strict, orpheline de mère depuis l’âge de treize ans, Morales s’est réfugiée dans l’Église catholique pendant son adolescence. « J’ai appris beaucoup de valeurs, et l’une de celles qui m’ont le plus marquée et m’ont beaucoup aidée dans ma vie est la solidarité », affirme-t-elle dans un entretien avec Mongabay Latam depuis les bureaux de l’ONG qu’elle préside.

Mère, épouse, cuisinière de la guérilla pendant la guerre civile salvadorienne des années 80 et du début des années 90, elle a parcouru un chemin difficile avant de se retrouver engagée dans un combat qui dure depuis des années : non à l’exploitation minière.

C’est complexe. Il y a eu un changement significatif, malgré de longues années de consensus national autour de la lutte environnementale et de la défense du territoire contre les projets miniers extractivistes. Lorsque le gouvernement est arrivé au pouvoir en 2019, il a commencé à montrer des signes de vouloir procéder à l’exploitation minière et a préparé le terrain : il a rejoint un panel intergouvernemental de pays qui misent sur l’extractivisme et a commencé à démanteler cette lutte menée par les Salvadoriennes et les Salvadoriens. En 2022, la Direction des hydrocarbures et des mines est créée. La même année, un budget de plusieurs millions est alloué à cette direction. Au cours des six dernières années, le ministère de l’Environnement n’a pas été en mesure de dépenser le budget qui lui avait été alloué, ni de réaliser les travaux d’atténuation que la loi lui imposait. Et après avoir dénoncé cette situation pendant toutes ces années, 2021, 22, 23, 24, ce que nous avions dénoncé se concrétise : la menace réelle de revenir sur la loi. Le 23 décembre 2024, cette loi qui autorise pratiquement l’exploitation minière est adoptée. Cette loi a été adoptée en urgence, comme c’est le cas pour d’autres lois. Ce n’est pas une particularité de cette loi. Elle interdit le mercure, un produit chimique déjà interdit dans de nombreuses régions du monde, mais elle n’interdit pas le cyanure. Et bien sûr, nous savons que le cyanure est le principal produit chimique utilisé pour exploiter la mine.

Nous avions de forts soupçons depuis l’adoption de la loi interdisant l’exploitation minière en 2017. Nous disions à l’époque qu’il était important que cette loi interdisant l’exploitation minière métallique soit élevée au rang constitutionnel. Et nous avons fait plusieurs tentatives au sein de l’Assemblée législative. Ces années ont été marquées par une lutte continue. La principale condition était qu’environ neuf députés devaient l’accepter, la présenter à une commission et ensuite l’approuver à la majorité des trois quarts des membres de l’Assemblée. Nous n’y sommes pas parvenus. En d’autres termes, il était impossible à l’époque de convaincre neuf législateurs, malgré l’activité de l’espace connu sous le nom de Mesa Nacional frente a la minería metálica (Table ronde nationale contre l’exploitation minière métallique). Nous n’avons pas trouvé d’écho auprès des législateurs. Lorsque ce gouvernement est arrivé au pouvoir en 2019, si je ne me trompe pas, la législature a changé et tous les législateurs proches du parti sont entrés en fonction. De nouvelles idées. La possibilité que cette loi ait un rang constitutionnel semblait alors encore plus bloquée. À partir de là, nous avons essayé d’alerter le pays et je pense que nous y sommes parvenus. En effet, la question environnementale et la lutte environnementale contre l’exploitation minière ont été reprises par de nombreux secteurs du pays. Il est impressionnant de voir comment l’Église, le monde universitaire et les jeunes ont également élevé leur voix en 2024 pour rejeter l’exploitation minière. (…)

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