Salvador : l’eau plutôt que l’or
Le 29 mars dernier, le Salvador est devenu le premier pays à interdire les mines de métaux sur son territoire. 69 des 84 députés salvadoriens ont ainsi voté en faveur d’une loi mettant fin aux activités d’exploration, d’extraction et de transformation de métaux.
Cette décision sans précédent a été motivée par la déforestation très avancée et la pollution de 90 % des eaux de surface du pays par les produits chimiques tels que le cyanure et le mercure, métaux lourds et déchets induits par l’activité minière, faisant ainsi du Salvador l’un des pays les plus pollués au monde. Elle marque l’aboutissement d’un mouvement massif de rejet des mines au sein de la société salvadorienne, où s’étaient mêlés milieux universitaires, organisations sociales et Église catholique, fidèle ici à l’encyclique papale Laudato Si.
Cette loi, rétroactive, mettra fin à tous les permis d’exploration et d’exploitation en cours. Les compagnies minières internationales, tenues pour responsable de ce désastre environnemental, en seront pour leurs frais ! En octobre 2016, un tribunal d’arbitrage de la Banque mondiale avait donné raison au Salvador dans un litige avec l’entreprise australo-canadienne Oceana Gold Corporation, qui réclamait au pays 314 millions de dollars pour lui avoir refusé un permis d’extraction en 2009. Finalement, c’est la compagnie minière qui devra régler 8 millions de dollars en frais de justice à l’État salvadorien.
Cette mesure laissera cependant deux ans aux quelques centaines de mineurs artisanaux du pays pour se reconvertir dans une autre activité. La fabrication artisanale, la réparation et la commercialisation de joyaux et de produits de métaux précieux ne sont pas concernées par la loi.
L’Institut Centraméricain d’Études Fiscales (ICEFI) estime que pour l’État salvadorien, la perte financière engendrée par le bannissement des métaux sera minime – de l’ordre de 0,3% du PIB – et sans commune mesure avec le coût écologique. Il est vrai que l’or ne se boit pas….
Mehdi Ezzahi