🇦🇷 En Argentine, douze ans de prison requis contre la vice-présidente, Cristina Kírchner (Le Monde / France 24)


Celle qui fut présidente du pays entre 2007 et 2015 est jugée pour corruption. C’est l’une des multiples procédures en cours contre celle qui bénéficie d’une immunité que seule la Cour suprême pourrait lever.

La vice-présidente argentine, Cristina Kírchner, le 10 août 2022, lors d’une session publique du Sénat au Congrès argentin à Buenos Aires. Juan Mabromata / AFP

Douze ans de prison, ainsi qu’une inéligibilité à vie, ont été requis, lundi 22 août, à Buenos Aires, contre la vice-présidente argentine, Cristina Kírchner, dans un procès pour corruption.

Cristina Kírchner, 69 ans, était jugée, dans ce procès en distanciel – et en son absence –, pour association illicite et administration frauduleuse aggravées, dans une affaire d’attribution de marchés publics dans son fief politique de la province de Santa Cruz, en Patagonie (Sud), alors qu’elle était cheffe de l’Etat (2007-2015).

Vice-présidente, et présidente du Sénat depuis 2019, elle bénéficie à ce stade d’une immunité, que seule la Cour suprême pourrait lever si elle venait à confirmer une éventuelle condamnation. Faute de quoi elle pourrait se présenter aux élections législatives et présidentielle de fin 2023, même si elle n’a à ce jour rien laissé filtrer de ses intentions.

Après les réquisitions lundi, viendra le tour des plaidoiries de la défense dans cette procédure ouverte en 2019, mais qui avait été suspendue en raison de la pandémie de Covid-19. Elles pourraient s’étirer sur plusieurs mois et la décision du tribunal n’être prononcée que vers la fin 2022.

Mais, signe de l’impact de Cristina Kírchner, aussi populaire à gauche que clivante, des rassemblements spontanés de plusieurs centaines d’opposants et de partisans de la responsable politique se sont produits, lundi soir, aux abords de son domicile à Buenos Aires, produisant des bousculades et poussant un épais cordon policier à faire usage de sprays lacrymogènes, a constaté l’Agence France-Presse.

Dans son réquisitoire, le procureur Diego Luciani a dénoncé « un authentique système de corruption institutionnel », l’autre représentant du ministère public, Sergio Mola, évoquant « des irrégularités systématiques dans 51 appels d’offres sur douze ans ».

Cinq procédures encore en cours

Des peines de deux à douze ans de prison ont été requises contre les douze coaccusés, notamment douze ans contre un homme d’affaires du bâtiment, Lorenzo Baez, déjà condamné l’an dernier à douze ans de prison dans une affaire distincte d’évasion de capitaux vers des paradis fiscaux. L’accusation a estimé les dommages causés à l’Etat à 5,2 milliards de pesos (38 millions d’euros environ), dont elle a demandé la confiscation.

À maintes reprises, la vice-présidente, qui nie les faits, a dénoncé une persécution politique de la part d’une justice, selon elle, instrumentalisée par l’opposition de droite. Opposition et gouvernement en Argentine se renvoient régulièrement l’accusation de « lawfare » (« guerre judiciaire ») et d’instrumentalisation de la justice.

Dans un tweet, lundi soir, Cristina Kírchner a accusé les procureurs d’avoir « bâti leur accusation sur des questions qui n’avaient jamais été soulevées » dans l’acte initial. Elle a dénoncé un « peloton d’exécution médiatico-judiciaire », auquel elle a dit qu’elle répondrait sur le fond mardi à travers les réseaux sociaux, après s’être vu refuser lundi le droit à une déposition additionnelle – une « violation des principes de défense », selon la vice-présidente.

Dans un communiqué, le président argentin, Alberto Fernández (centre-gauche), a condamné la « persécution juridique et médiatique contre la vice-présidente » et estimé « qu’aucun des actes imputés à la vice-présidente n’a été prouvé ».

Clivante mais toujours populaire et icône de la gauche argentine, Mme Kírchner a été mise en cause ces dernières années dans une dizaine de dossiers distincts, entre pots-de-vin, blanchiment de fonds, préjudice spéculatif occasionné à l’Etat ou entrave à la justice. Elle a bénéficié de non-lieux, deux récemment fin 2021, mais cinq procédures restent en cours.

Risque de manifestations tendues

La probabilité d’une condamnation de Mme Kirchner a donné lieu ces derniers jours à des appels à la mobilisation émanant de politiciens, de mouvements péronistes, certains promettant « le bordel » si l’on touchait à la vice-présidente. (…)

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Reportage de France 24