🇧🇷 Le Brésil « en guerre » contre les incendies dans le Sud-Est, où l’état d’urgence a été déclaré dans 45 villes (Le Monde / AFP) / L’Amazonie subit une saison record de feux de forêt (Magali Reinert / Reporterre)
Le Brésil est « en guerre contre les incendies et la criminalité ». C’est ce qu’a estimé dimanche 25 août la ministre de l’environnement, Marina Silva, alors que l’état d’urgence a été déclaré dans quarante-cinq villes de l’État de São Paulo (sud-est). L’une des zones les plus touchées est celle de Ribeirao Preto, ville de plus de 700 000 habitants située à environ 300 kilomètres au nord de São Paulo.
À l’issue d’une réunion de crise avec le président, Luiz Inacio Lula da Silva, la ministre a annoncé que des enquêtes avaient été ouvertes par la police fédérale pour se pencher sur les causes des feux de brousse qui ont touché la région ces derniers jours. « La police va mener l’enquête et le gouvernement va travailler avec tous les États pour combattre les incendies », a déclaré plus tard Lula sur le réseau social X.
Le gouverneur de São Paulo, Tarcisio de Freitas, qui a décrété l’état d’urgence dans quarante-cinq communes, a annoncé dimanche 25 août que deux personnes soupçonnées d’avoir déclenché des incendies avaient été arrêtées. L’une des zones les plus touchées est celle de Ribeirao Preto, ville de plus de 700 000 habitants située à environ 300 kilomètres au nord de Sao Paulo, au cœur d’un important pôle agricole.
« J’ai mis le nez dehors hier soir vers 19 heures et j’ai eu beaucoup de mal à respirer. Je vis ici depuis trente-deux ans et je n’ai jamais vu une chose pareille », a confié à l’Agence France-Presse Carlos Rodrigues, retraité de 66 ans. « J’ai vraiment eu très peur. (…) Comme je souffre de rhinite, je suis restée enfermée chez moi », a dit pour sa part Nazaré Loureiro dos Santos, esthéticienne de 71 ans, s’abritant sous un parapluie, alors que les autorités espèrent que les précipitations tombées dimanche aident à atténuer la gravité de la situation.
« C’est apocalyptique »
Dans un lotissement huppé, des habitants ont dû quitter leur domicile à l’approche des flammes, selon le site d’informations G1.
Plusieurs vidéos circulant sur les réseaux sociaux montrent Ribeirao Preto plongée dans l’obscurité samedi dès la fin d’après-midi, avec une épaisse couche de fumée et de fortes rafales de vent. « C’est apocalyptique. Beaucoup de vent, beaucoup de fumée, on ne voit plus la ville. Et il est 17 heures », dit l’auteur de l’une de ses vidéos, muni d’un masque de protection pour sortir de chez lui et plissant les yeux à cause de la fumée.
Deux employés d’une usine sont morts vendredi à Urupes, dans le nord de l’Etat, alors qu’ils luttaient contre un incendie. Des vols ont été annulés et des routes ont été coupées en raison des incendies, qui ont également détruit des cultures et tué du bétail. Selon la mairie de Santo Antonio do Aracangua, une quarantaine de bovins sont morts carbonisés dans une ferme.
Le gouverneur a déclaré que dix millions de reais (environ 1,63 million d’euros) seraient alloués pour aider les agriculteurs qui ont perdu leurs récoltes ou leur bétail. (…)
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L’Amazonie subit une saison record de feux de forêt (Magali Reinert / Reporterre)
La sécheresse et la chaleur exceptionnelles de 2023 expliquent l’ampleur des incendies de forêt au Brésil, en particulier en Amazonie. Face à la multiplication des foyers, le gouvernement suspecte des actions criminelles.
Le nombre de feux en Amazonie atteint de nouveaux records. Le seul mois d’août a enregistré 38 226 hot spots, ces zones identifiables depuis les photos satellites qui montrent des taches rouges de forte chaleur révélatrices d’un incendie. Un nombre jamais atteint depuis 2010, selon l’agence Reuters. Deux autres biomes brésiliens sont également touchés par de nombreux feux de forêt : la grande zone humide du Pantanal et le Cerrado plus au sud, proche de São Paulo, selon le recensement des feux par l’Institut national de recherches spatiales du Brésil.
En cause, un nouveau record de sécheresse et de chaleur en 2023. Ce phénomène est lié à un épisode El Niño amplifié par le changement climatique, selon une publication parue dans Nature en avril dernier. La saison des pluies, qui arrive normalement à la fin de l’hiver austral en septembre, n’est intervenue cette année que fin décembre 2023.
« L’écosystème forestier est fragilisé par des périodes de sécheresse plus longues et plus intenses, explique l’un des auteurs, Jhan Carlo Espinoza, climatologue à l’Institut de recherche pour le développement (IRD) et basé au Pérou. 2005 avait atteint un record de sècheresse centenaire, qui s’est répété en 2010 puis en 2015… En 2023, nous avons observé l’effet sur la végétation, avec une perte de verdure et un stress hydrique important. Et on peut s’attendre à ce que la situation s’aggrave, puisqu’en général le pic de la saison des feux est en septembre. »
Incendies criminels
Mais pas de feux de forêt sans la main de l’homme. En effet, les départs de feu sont très majoritairement d’origine humaine, que les raisons soient accidentelles, pour déforester des zones à exploiter, ou criminelles. Cette troisième raison pourrait expliquer une partie de l’ampleur de la catastrophe actuelle, en particulier dans le sud-est. La ministre brésilienne de l’Environnement a en effet évoqué fin août des actions criminelles tout en déclarant son pays « en guerre » contre le feu, alors que Brasília et São Paulo suffoquent et que des écoles ont fermé à cause des fumées, rapportait le Guardian le 26 août. (…)
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