🇨🇱 Chili. Carmen Castillo, une histoire chilienne (entretiens par Caroline Broué/ À voix nue / France Culture)


La musique de son nom évoque immédiatement l’Amérique latine même si aujourd’hui Carmen Castillo est française. Son pays d’origine, c’est le Chili : elle est née à Santiago le 21 mai 1945, y a grandi, fait des études d’histoire, milité, à gauche, pour la victoire de Salvador Allende auprès de qui elle a travaillé quand il a gagné l’élection présidentielle le 4 septembre 1970, et dont elle restée proche jusqu’au coup d’État du général Pinochet le 11 sept 1973. La répression des opposants à la dictature qui a suivi l’a touchée de plein fouet, jusque dans sa chair.

Elle a perdu l’homme qu’elle aimait, l’enfant qu’elle portait, et elle a été expulsée du pays, blessée, en 1974. Ces événements dramatiques, cette déchirure et cette mémoire meurtrie, Carmen Castillo les a racontés dans plusieurs œuvres, notamment un récit publié en 1980 et réédité par Verdier en 2023, Un jour d’octobre à Santiago et un film en 2007, Rue Santa Fe. Arrivée en France en 1977, elle est devenue écrivaine et réalisatrice, et quand on regarde ses films et qu’on lit ses livres, on se rend compte que si elle est physiquement ici, son esprit est toujours un peu là-bas, à la poursuite inlassable du passé, de la mémoire d’un Chili révolu, qui fut le témoin d’intenses combats pour la liberté et la démocratie.

Une série d’entretiens proposée par Caroline Broué. Réalisation : Anne Perez-Franchini. Prise de son : Frédéric Cayrou. Chargée de programme : Daphné Abgrall.

À écouter par épisodes ci-dessous ou intégralement ici


Premier épisode : La Quinta ou la belle époque

L’enfance à Santiago, les années de bonheur dans la maison familiale, ses parents Fernando et Monica.

Fernando et Monica, les parents de Carmen Castillo, en 1983. – Collection personnelle. Avec l’aimable autorisation de Carmen Castillo

Carmen Castillo convoque dans ce premier épisode ses souvenirs d’avant les années Allende : l’enfance à la Quinta, cette ferme familiale tenue par sa grand-mère, le père adoré, « chêne » de sa vie, architecte, recteur d’université puis maire de sa commune, la mère admirée avec qui les relations furent parfois plus compliquées, l’éducation libérale et progressiste qui fut la sienne dans une famille cultivée de la bourgeoisie chilienne éclairée et artistique, les années de collège, de lycée, et l’amour pour la France, déjà.

Écouter le podcast du premier épisode ici


Deuxième épisode : Une jeunesse chilienne

C’est très jeune que Carmen Castillo a commencé à s’engager politiquement. Elle décrit dans quel contexte elle a rencontré celle qui allait devenir son amie : Beatriz Allende, fille du futur président Salvador Allende.

Portrait de Miguel Enríquez en 1972 – Archive personnelle. Avec l’aimable autorisation de Carmen Castillo

Sensibilisée par sa famille aux injustices sociales du pays, Carmen Castillo a commencé dès l’âge de quinze ans à alphabétiser les paysans du sud, avant de rencontrer celle qui aura une influence déterminante sur son engagement : Beatriz Allende. Au milieu des années 1960, Carmen Castillo rejoint le MIR, mouvement de la gauche révolutionnaire, qui va œuvrer à la victoire de Salvador Allende le 4 septembre 1970. C’est ces années-là qu’elle raconte dans cet épisode, des années de joie et de ferveur populaire.

Écouter le podcast du deuxième épisode ici


Troisième épisode : Un jour d’octobre à Santiago

Après le coup d’État du général Pinochet le 11 septembre 1973, Carmen et son compagnon Miguel Enríquez, secrétaire général du MIR, ont été parmi les premiers pourchassés. Le 5 octobre 1974, la police politique (la DINA) est entrée dans la maison où ils vivaient cachés…

Camila et Carmen Castillo enceinte de Diego, en 1984 – Archive personnelle. Avec l’aimable autorisation de Carmen Castillo

Le 5 octobre 1974 est le jour où la vie de Carmen a basculé. Elle raconte l’attaque de la maison de la rue Santa Fe par les soldats de Pinochet, la mort de Miguel, l’homme de sa vie et le futur père de l’enfant qu’elle portait alors. Puis elle raconte l’après, la difficulté de la mémoire, la douleur du souvenir, la survie. Cette histoire deviendra un livre en 1980, paru sous le titre Un jour d’octobre à Santiago.

Écouter le podcast du troisième épisode ici


Quatrième épisode : La mémoire et l’exil

Depuis son arrivée en France jusqu’à l’arrestation de Pinochet en 1998 en passant par son premier retour en 1987 au Chili à l’appel de son père, Carmen Castillo raconte l’exil et la façon dont le militantisme, les livres et les films l’ont aidée.

La cinéaste et écrivaine franco-chilienne Carmen Castillo, en 2015, à Paris, France. ©AFP – Patrick Kovarik

Carmen Castillo a choisi de venir en France en 1977. Grâce à ses réseaux de gauche, elle a pu être accueillie par la styliste Agnès b. à l’époque. Elle est naturalisée française en 1982, écrit Un jour d’octobre à Santiago, continue de garder des contacts avec son pays, même si elle n’y retourne qu’en 1987, pour voir son père malade. Ce retour lui inspire l’ouvrage Ligne de fuite. Puis vient le cinéma, « comme un cadeau » dit-elle, et son film La Flaca Alejandra en 1993 (FIPA d’or à Biarritz) sur la figure de la femme qui les a dénoncés. En 2007, elle tourne Rue Santa Fe, dans lequel elle raconte son retour au pays et ce qu’il est devenu.

Écouter le podcast du quatrième épisode ici


Cinquième épisode : Empreintes

Ce dernier épisode porte sur les traces de l’histoire chilienne de Carmen Castillo, d’Allende et de Pinochet, sur ce qu’il reste du rêve initial et du cauchemar qui a suivi, et sur la transmission générationnelle.

Carmen Castillo, Diego, Camila et tomas, Paris 1990 – Archive personnelle. Avec l’aimable autorisation de Carmen Castillo

À l’aube du cinquantième anniversaire du coup dÉtat du 11 septembre 1973, comment Carmen Castillo relit-elle son histoire ? Ce qui reste est-il le souvenir des années joyeuses d’Allende, de la ferveur de l’Unité populaire ou bien l’enfer de la répression, des milliers de disparus et de leurs familles, des années de dictature Pinochet ? Comment le Chili de Gabriel Boric regarde-t-il cette histoire ? C’est ce qu’aborde cet épisode, en posant aussi la question de la façon dont cette histoire singulière et collective a été transmise aux jeunes générations.

Écouter le podcast du cinquième épisode ici