🇨🇴 Coca-Cola en Colombie, un village assoiffé par une usine d’embouteillage (Courrier international)
Le département de Cundinamarca, dans le centre de la Colombie, fait face depuis le printemps à un sévère épisode de sécheresse. Si certains habitants doivent composer avec les rationnements, une usine de mise en bouteilles continue à pomper des quantités industrielles d’eau minérale.
Le 2 février 2024, une dizaine d’habitants de la commune de La Calera, à l’est de Bogotá, ont demandé au curé du village de leur prêter la statue de San Isidro Labrador pour invoquer la pluie. Une tentative désespérée face à la sécheresse qui a pratiquement fait disparaître le fleuve local et contraint à restreindre l’approvisionnement en eau de leurs petites exploitations, raconte la revue Vorágine dans un reportage remarqué en Colombie.
“En temps normal, cette communauté, qui gère son propre aqueduc, ouvre les vannes neuf heures par jour, de 5h30 à 14h30. Cela peut sembler étrange pour tout citadin habitué à avoir de l’eau quand il en a envie, mais pour les habitants [du hameau] Buenos Aires Bajo, c’est suffisant pour se baigner, préparer les repas, planter des pommes de terre et élever des vaches.” Mais l’épisode de sécheresse qui dure dans le département de Cundinamarca depuis avril contraint la communauté à n’ouvrir les vannes que cinq heures par jour.
Habituées à la dure vie de paysan, les 250 familles de Buenos Aires Bajo et les 172 de Santa Helena (un autre lieu-dit appartenant à la commune de La Calera) se seraient sans doute résignées si elles n’étaient pas indignées par la proximité d’une usine du groupe Coca-Cola Femsa, entreprise mexicaine détenue en partie par le géant américain, chargée de mettre en bouteille et de distribuer en Colombie l’eau de la marque Manantial.
La concession accordée à l’entreprise prévoit qu’elle peut pomper 3,23 litres d’eau par seconde depuis les sept sources de Santa Helena, soit 279 000 litres d’eau par jour. Mais malgré la sécheresse, Coca-Cola Femsa continue d’extraire la même quantité d’eau qu’en temps normal. À Buenos Aires Bajo, “il n’y a plus une seule goutte d’eau” qui sort des robinets. De quoi obliger ses habitants à faire acheminer de l’eau via des camions-citernes.
Un commerce lucratif
Pour l’usine qui prive les habitants de cette ressource vitale, il s’agit d’une activité très lucrative, puisque l’entreprise dépenserait environ 1 160 dollars annuels (4,7 millions de pesos colombiens, environ 1 000 euros) pour l’eau de La Calera. Une infime goutte des 226 millions de dollars (209 millions d’euros) annuels de revenus générés par ses sept usines réparties dans le pays, assure Vorágine. (…)
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