🇪🇨 Équateur : mobilisation victorieuse des communautés indigènes contre un projet de méga-prison en Amazonie (TRT esp. – Traduction FAL / Déclarations de la CONAIE et de la CONFENAIE)
Dans le cadre du plan Phénix et de sa stratégie de guerre contre les gangs liés au narcotrafic, le gouvernement du président Daniel Noboa avait lancé la construction de deux prisons de haute sécurité, pour un budget de cinquante-deux millions de dollars chacune : l’une dans la province côtière de Santa Elena, avec une capacité d’accueil de 800 détenus, et l’autre en territoire autochtone, dans le bourg d’Archidona, dans la province amazonienne de Napo. Après deux semaines de vives protestations des peuples indigènes de la région amazonienne, Noboa a finalement renoncé à ce dernier projet.
Leer en español : Ecuador da marcha atrás en polémica construcción de cárcel en la Amazonía
Le gouvernement équatorien a fait marche arrière lundi 16 décembre dans la construction controversée d’une prison de haute sécurité en Amazonie, après deux semaines de manifestations et un appel du Congrès à réévaluer le projet. Les manifestants affirmaient que le projet serait préjudiciable à l’environnement et qu’il affecterait la qualité de vie des peuples autochtones de la zone.
Le centre de détention devait être construit à Archidona, dans la province amazonienne de Napo, une zone de forêts où vivent des communautés autochtones kichwas et waoranis. La plupart des habitant·es se consacrent à l’agriculture et au tourisme écologique, dans l’un des écosystèmes les plus diversifiés du monde.
Cela ne signifie pas pour autant que le président équatorien abandonne ce projet emblématique de sa campagne électorale. Il avait proposé deux prisons de sécurité maximale dans le cadre de sa politique de lutte contre le trafic de drogue : une dans la région amazonienne et une autre sur la côte du Pacifique, dans la province de Santa Elena. Finalement, les deux prisons seront construites dans cette dernière province.
” Cette décision réaffirme l’engagement du gouvernement national en faveur du renforcement de la sécurité publique et de la promotion du développement économique et social, notamment dans la communauté du canton de Salinas, en créant des emplois directs et indirects et en dynamisant l’économie locale grâce à un projet de cette envergure”, a ajouté le ministère dans un communiqué.
Protestations dans les rues et critiques au Congrès
L’annonce de Noboa intervient après deux semaines de manifestations contre la construction de la prison en Amazonie, auxquelles ont participé plusieurs groupes indigènes, soutenus par de larges secteurs sociaux de la région. Appuyés par la Confédération des nationalités autochtones de l’Équateur / CONAIE, les manifestants protestaient contre le fait que le gouvernement n’avait pas consulté les communautés concernées avant de confirmer le plan.
Lundi 16 décembre, les manifestations ont atteint leur point culminant lorsque les manifestants ont bloqué les routes reliant cette juridiction au reste de l’Amazonie et à l’intérieur du pays. Ils ont également occupé des institutions publiques telles que le gouvernement provincial.
En parallèle aux manifestations, le Congrès avait exhorté mercredi dernier le président Noboa à suspendre “immédiatement” le projet, qui suscitait des protestations citoyennes et le rejet des plus grandes organisations indigènes du pays.
Promesse de campagne électorale
Noboa, dans la campagne électorale qui l’a mené à la présidence en août 2023, avait promis de faire face aux violences qui sévissent dans les prisons depuis environ quatre ans, de la part de bandes criminelles qui se disputent le contrôle des centres pénitentiaires.
Depuis 2021, plus de cinq cents prisonniers ont été tués dans les prisons équatoriennes, la plupart lors d’une série de massacres entre bandes rivales, dans une vague de violence criminelle qui s’est également répandue dans les rues du pays. Le cas le plus récent, qui a fait dix-sept morts, s’est produit le mois dernier dans la prison de Guayas.
Au début de cette année, le président Noboa a déclaré une situation de “conflit armé interne” et a catalogué les bandes criminelles comme “terroristes”, pour faciliter l’action des forces de sécurité de l’État et la militarisation des prisons contrôlées par ces structures criminelles.
Article de TRT español / Traduction : webmaster du site de FAL
Déclarations de la CONAIE et de la CONFENIAE
La CONAIE (Confédération des Nationalités Indigènes d’Équateur) et la CONFENIAE (Confédération des Nationalités Indigènes de l’Amazonie équatorienne) se félicitent de la victoire des mobilisations des communautés et des habitant·es de la province de Napo contre la construction de la méga-prison mais annonce que les peuples et les nationalités restent vigilants et qu’ils continueront à défendre leurs droits, leurs territoires et l’avenir de l’Amazonie, en particulier contre la recrudescence des projets extractivistes.
Voir également :
– En Équateur, les organisations indigènes se mobilisent contre un projet de prison de haute sécurité(Marie Delcas / Le Monde / article réservé aux abonné·es)
– Équateur : Des autochtones amazoniens s’emparent du gouvernorat de Napo en refusant la prison (Cocomagnanvile)