🇭🇹 Haïti : entre crise politique et colère de la rue, un pays sans horizon (entretien avec Frédéric Thomas – CETRI / TV5 Monde)


Après le blocage en justice, fin janvier 2024, de l’envoi par le Kenya d’une mission sécuritaire en Haïti, des centaines d’haïtiens en colère se sont mobilisés les rues de Port-au-Prince, contre l’actuel Premier ministre Ariel Henry, responsable selon eux d’une situation politique dans l’impasse depuis l’assassinat de l’ancien président Jovenel Moïse, en 2021.

Entretien avec Frédéric Thomas, politologue affilié à  l’ONG CETRI, spécialiste d’Haïti, auteur notamment du livre L’Échec Humanitaire : Le Cas Haïtien.

L’ex-sénateur Moise Jean-Charles, au milieu des mécontents à Port-au-Prince, le 5 février 2024 AP | Odelyn Joseph

Le 7 février est la date inscrite dans la Constitution pour la passation de pouvoirs à un président élu. Et Ariel Henry, le chef du gouvernement actuel avait, le 21 décembre 2022, annoncé qu’il passerait le pouvoir à un président élu, précisément, à cette date. Mais Il y a pas eu d’élections en 2023, et au contraire, la situation n’a cessé d’empirer. D’où, le ras-le-bol, de la population qui ne veut pas que cette personne reste en place sans mandat et avec aucune échéance en vue. 

Il a nommé une Commission, un conseil de transition. C’était trois personnes sans véritable pouvoir et surtout sans volonté politique de négocier avec l’opposition ou avec la société civile. Cette société civile qui est vent debout contre ce gouvernement car, pour elle, il représente plus la communauté internationale que les Haïtiens et Haïtiennes, tant au niveau politique, social et économique qu’au niveau sécuritaire. À ce sujet, la situation n’a cessé de se dégrader sur place et, ce gouvernement, s’est montré inactif et même désintéressé du sort de la population. 

Oui, parce que d’abord, il semble s’être accaparé du pouvoir. Il apparaît vraiment comme celui qui détient la la clé du pouvoir en Haïti. Deux jours avant l’assassinat de Jovenel Moïse (NDLR : le dernier président haïtien élu à ce jour), Ariel Henry avait été nommé Premier ministre. Mais le mandat de Jovenel Moïse était déjà terminé, donc c’est quelqu’un qui n’a pas été élu, qui est très impopulaire, qui apparaît véritablement comme l’homme de paille de la Maison Blanche. Il ne fait rien et ne rend de comptes qu’à la communauté internationale mais pas à la population haïtienne.  Il n’est intéressé que par l’idée de se maintenir en place. Aux yeux des Haïtiens et des haïtiennes il symbolise vraiment le statu quo, le blocage, le verrou qui empêche toute solution, toute sortie de crise.

On a vu Ariel Henry, participer des sommets internationaux notamment au Canada, il y a quelques mois. Derrière lui et le gouvernement qu’il représente, y’a t-il des figures qui peuvent émerger pour envisager un futur politique alternatif ?Oui. Voyez “l’accord de Montana” qui date du 30 août 2021 et qui réunit l’ensemble des acteurs de la société civile haïtienne, (les mouvements de femmes, les syndicats, les mouvements paysans, les mouvements de jeunes, les ONG des droits humains, les églises et des partis politiques) autour d’un projet, d’une transition de rupture.Le problème, c’est qu’on ne veut pas de cette solution qui est sur la table depuis deux ans. Ariel Henry est toujours soutenu par la communauté internationale. (…)

(…) Lire la suite de l’entretien ici