🇭🇳 Honduras: les déplacés climatiques entre catastrophes naturelles et extrêmes sécheresses ( Aabla Jounaïdi / RFI)


Au Honduras, il y a eu le terrible ouragan Mitch en 1998, puis Eta et Iota en 2020 qui ont causé plus de 200 morts et des dégâts toujours visibles dans le pays. Entre ces épisodes extrêmes, les sécheresses ont déjà jeté des milliers de personnes sur les routes, en particulier ceux qui vivent de la terre. La Journée mondiale des réfugiés est l’occasion de faire un point. 

La sécheresse après le passage des ouragans Eta et Iota au Honduras. Ici, le 6 décembre 2020. REUTERS – José Cabazas

Au Honduras, le tableau aujourd’hui n’a pas beaucoup changé. Le couloir de la sécheresse dans l’ouest hondurien est toujours la dure réalité pour de nombreux habitants. Bartolo Fuentes est devenu député en 2021 sous les couleurs du parti libre de la présidente Xiomara Castro. Cet ancien journaliste et militant des droits des migrants résume la situation actuelle: « Des agriculteurs qui avaient semé ont tout perdu faute de pluie. Nous dépendons de la pluie, car les systèmes d’irrigation sont très rares. Ils appartiennent à quelques entreprises agricoles privées. Les sécheresses sont un châtiment de plus pour notre population, et surtout pour les agriculteurs. »

Depuis 1998, année où l’ouragan Mitch a détruit les récoltes et les infrastructures, les paysans quittent le pays, par groupes le plus souvent, dans les fameuses caravanes, direction le nord vers les États-Unis. Les ouragans Eta et Iota en 2020 n’ont fait qu’accélérer la tendance.

Yolanda Cerdeira est une experte de l’immigration à l’ERIC, un centre de recherche jésuite. Elle rentre de la zone d’Omoa dans le nord du pays: « Beaucoup de zones rurales agricoles y ont été polluées après les ouragans. Mais, en plus, les barrières de contrôle des crues ne sont pas encore en place partout. À tout moment, la rivière peut déborder. Ça s’est d’ailleurs vu l’an dernier. Avec quatre épisodes de pluies, on a assisté à des crues. Voilà pourquoi les gens n’ont même pas besoin d’attendre une autre catastrophe comme Eta et Iota pour avoir peur. Les mesures politiques de prévention ne sont pas en place. Tout est resté fragile. Cette incertitude, ce traumatisme leur fait dire qu’avec quatre pluies, ils vont tout perdre. Et c’est le facteur qui les décide à partir. Ce n’est peut-être pas le seul, mais c’est un de plus. »

Le statut protégé temporaire attribué aux Honduriens aux États-Unis

Il y a quelques jours, l’administration Biden a annoncé qu’elle rétablissait pour les Honduriens le statut protégé temporaire (TPS) qui avait permis à ceux qui étaient entrés illégalement aux États-Unis à la suite de l’ouragan Mitch d’y rester encore deux ans sans être inquiétés. Le programme profite à 57 000 Honduriens actuellement, mais Tegucigalpa aurait souhaité l’élargir.

« C’était notre requête principale au gouvernement américain, explique le député Bartolo Fuentes. Ce que l’on appelle une “redésignation”. Puisque Donald Trump l’avait suspendu, on souhaitait en profiter pour ne pas réactiver l’ancien TPS mais en établir un nouveau qui inclurait les gens arrivés plus tard aux États-Unis. Faute d’avoir obtenu cela, notre lutte maintenant consiste à demander que ceux qui bénéficient encore du TPS puissent obtenir la résidence aux États-Unis. Vous savez, chez nous, il y a une tradition. Lorsque surviennent des phénomènes climatiques extrêmes, ceux qui sont aux États-Unis envoient de l’argent à leurs proches ici pour qu’ils puissent organiser l’aide aux sinistrés. Je crois que l’aide des particuliers à plus de poids que celle du gouvernement»

Mais l’État hondurien, certes financièrement limité, a sa propre responsabilité dans le drame des déplacés et singulièrement dans la gestion des ouragans Eta et Iota selon la chercheuse Yolanda Cerdeira: « Non seulement en 2020, l’État n’était pas prêt. Mais il a utilisé ce malheur pour voler beaucoup d’argent. Un des responsables a même démissionné. L’État n’a pas rempli son devoir d’alerter à temps de l’arrivée de l’ouragan. Ce qui a provoqué un engorgement des structures d’accueil. Il y a eu en plus des cas d’abus sexuels sur des femmes. C’est documenté par l’ONU. Il y a eu aussi le problème des “zones invisibles” où les gangs empêchaient d’accéder aux services d’urgence. Cela a contribué à la vulnérabilité lors du premier déplacement, juste après la catastrophe. » (…)

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