🇧🇷 Les «journées de 2013», point de basculement politique au Brésil


Dix ans après des manifestations historiques, retour sur les conséquences politiques d’un mouvement sans leader, né pour dénoncer l’augmentation du prix des transports publics mais devenu rapidement le catalyseur de tous les mécontentements. Rapidement, les dizaines, les centaines de milliers de personnes dans les rues ont réclamé de meilleurs services sociaux, ont critiqué les dépenses immenses liées à l’organisation de la Coupe du monde de football de 2014 et ont dénoncé la corruption de nombreux responsables politiques.

Manifestation à Belem, au Brésil, le 17 juin 2013 contre la dégradation des services publics, la corruption du gouvernement, la violence policière. © Paulo Santos / REUTERS

Le mouvement lancé par les étudiants de la classe moyenne de São Paulo et l’ampleur des protestations qui ont suivi avait laissé sans voix la  président de l’époque, Dilma Rousseff. « Nous voulons des services publics du niveau FIFA », lançait alors un jeune protestataire. La gauche alors au pouvoir avait été prise de court. « C’est un mouvement qui avait surpris tout le monde à l’époque, résume l’historienne Anaïs Fléchet de l’Université Paris Saclay, qui a été très difficile à décrypter par le gouvernement de Dilma Roussef. Le gouvernement de gauche avait peu de marge de manœuvre, dans un contexte difficile de retournement du cours des matières premières dont le Brésil est très dépendant. »

Le retour de l’extrême-droite

Le gouvernement a été surpris par un mouvement parti de sa gauche, mais rapidement rejoint par différents bords politiques. « Très vite, on a vu apparaître une autre thématique qui était la dénonciation du système, la remise en cause des hommes politiques », explique Anaïs Fléchet en soulignant une conséquence très importante de ces journées de 2013, « elles ont permis en quelque sorte à l’extrême-droite brésilienne de sortir du placard alors qu’elle n’avait plus vraiment de droit de cité sur la scène politique brésilienne depuis la fin de la dictature. »

Faut-il y voir un lien avec l’élection de Jair Bolsonaro, cinq ans plus tard ? « Il n’y a pas de causalité linéaire, précise Anaïs Fléchet, mais il y a des ferments dont le retour de l’extrême-droite, l’apparition de nouvelles formes de mobilisation et la volonté de se démarquer du système, ce qui est vraiment un tour de force de Jair Bolsonaro qui a réussi à se faire passer pour un homme neuf alors qu’il était élu député depuis 1990. » (…)

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