🇬🇹 L’intégrité du processus électoral au Guatemala mise à mal par une judiciarisation excessive (Communiqué collectif)


Après dix jours d’incertitude sur le sort des élections générales1 du 25 juin 2023 (retour sur celles-ci dans notre dernier communiqué), l’incompréhension prédomine dans l’entre-deux -tours, en raison de l’usage abusif de l’appareil juridique.


De récents événements ont conduit à une politisation excessive du pouvoir judiciaire dont les mécanismes sont désormais bien connus : 

  • Procédure pénale visant à retirer la personnalité juridique au parti Semilla, conduite illégalement par le juge de droit ordinaire Orellana,  l’annulation d’un parti relevant de la Loi Électorale et des Partis Politiques de rang constitutionnel,
  • Décision de justice sur base de présumées signatures falsifiées sur les documents d’adhésion au parti,
  • Perquisition intimidante du Ministère Public au siège du registre des électeurs orchestrée d’intimidations,
  • Mandat d’arrêt à l’encontre de la directrice adjointe du Registre des Électeurs pour ne pas avoir suivi la décision du juge Orellana,
  • Perquisition au siège du parti Semilla sur ordre du Ministère public.

L’utilisation du pouvoir judiciaire comme instrument pour influencer le processus électoral est une première dans un entre-deux tours au Guatemala, et décrédibilise les efforts de ce dernier pour consolider ses instruments démocratiques et respecter les droits civils et politiques de ses citoyens. Pis, la judiciarisation à l’encontre de l’organe électoral met en péril son autonomie et son indépendance, garantie constitutionnelle de l’intégrité et de l’impartialité du système électoral.

Malgré cela, le Tribunal Suprême Électoral a validé officiellement la qualification de Sandra Torres et Bernard Arévalo au second tour des élections présidentielles.

La Cour Constitutionnelle a de son côté accordé l’injonction provisoire à Bernard Arévalo, rejetant ainsi la suspension du parti, sans s’opposer pour autant aux poursuites pénales.

Cette interférence juridico-politique dans le processus électoral atteint la légitimité et la souveraineté du pays qui s’exprime par le vote, laissant présager une tentative de coup d’Etat en cours. Comme également relevé par la Mission d’Observation Electorale de l’Union Européenne et l’Organisation des Etats Américains, le respect des droits civils et politiques est compromis, alors que l’Etat guatémaltèque devrait les garantir au travers du Tribunal Suprême Électoral. 

Nous exhortons les autorités guatémaltèques, en particulier l’exécutif, le Ministère Public, le Parquet Spécial contre l’Impunité (FECI) à :

  1. Respecter l’indépendance du pouvoir judiciaire et garantir qu’il ne soit pas utilisé comme un outil politique pour influencer les résultats électoraux,
  2. Assurer l’intégrité et la sécurité juridique du processus électoral garantissant que le vainqueur du second tour, quel qu’il/elle soit, soit bien intronisé(e) le 14 janvier prochain, 
  3. Restituer la confiance du peuple guatémaltèque dans le système électoral en mettant fin à la campagne de façade au profit d’une campagne de débats autour des principales préoccupations des citoyens : combattre la malnutrition et la corruption, favoriser l’accès à la santé et l’éducation pour tous, améliorer le pouvoir d’achat pour se procurer les produits de consommation courante, …

Nous invitons la communauté internationale à se manifester sur la violation des droits citoyens guatémaltèques induite par la judiciarisation du processus électoral.


1 Le système électoral guatémaltèque prévoit des élections générales tous les 4 ans pour renouveler les mandats des élus municipaux, législatifs, présidentiels et du Parlement Centraméricain, soit au scrutin majoritaire uninominal ou au scrutin proportionnel plurinominal, hormis au scrutin à la majorité absolue à deux tours pour la présidentielle.