🇨🇱 Le Chili passe à la semaine de 40h, largement en deçà de la majorité des pays d’Amérique latine (RFI / Le Monde)


Le Parlement chilien a définitivement adopté, mardi 11 avril, une loi de réduction du temps de travail de 45 à 40 heures hebdomadaires. Le pays rejoint ainsi l’Équateur et le Venezuela, seuls autres pays d’Amérique latine où la semaine de travail est de 40 heures, quand elle est de 48 heures dans la majorité des autres pays de la région.

La ministre chilienne du Travail, Jeannette Jara, et des ministres après l’adoption d’un projet de loi réduisant le temps de travail hebdomadaire, à Valparaíso, le 11 avril 2023. Reuters – Rodrigo Garrido

Après six ans de discussions et de navette parlementaire, le Congrès a approuvé mardi, avec une ample majorité, le projet de loi sur la réduction du temps de travail, qui était établi jusque-là à 45 heures par semaine. C’était l’une des promesses de campagne du président Gabriel Boric. La mesure sera mise en place petit à petit : cette année, la semaine passera à 44 heures, l’année prochaine à 43 et ainsi de suite jusqu’à atteindre les 40 heures.

Dans les faits, plusieurs entreprises avaient déjà mis en place cette mesure, mais pour certaines professions, c’est une véritable petite révolution. C’est le cas notamment pour les travailleuses domestiques qui vivent chez leurs employeurs du lundi au vendredi. Maria Cotal Neíra exerce ce métier depuis 38 ans, elle est aussi présidente du syndicat qui représente sa profession. « On se lève à 6 heures du matin, explique-t-elle, on prépare les enfants pour l’école, on sert le petit déjeuner. Et ensuite, c’est la routine : le ménage, les courses, la cuisine, promener les animaux, arroser les plantes. Et on termine vers 9 ou 10 heures du soir. »

« C’est une superbe avancée »

Avec ses collègues, elles réalisent des journées d’en moyenne 12 heures et souvent travaillent à Santiago. Elles ne voient que très rarement leur famille puisque beaucoup vivent en dehors de la capitale. « Bien sûr que ça affecte la famille, témoigne-t-elle. Parfois, lorsque je veux prendre la défense de mes petits-enfants, ma fille me dit que je n’ai pas mon mot à dire. Elle me dit : “Toi, tu ne sais pas ce que c’est que d’être mère”. Mais bien sûr que si je sais ! J’ai dû élever les enfants d’une autre femme pour mettre du pain sur votre table. »

Pour ces femmes, la semaine ne sera pas réduite à 40 heures mais la nouvelle loi a prévu qu’elles auront deux jours de repos supplémentaires par mois. « C’est une superbe avancée et nous sommes très contentes, souligne Maria Cotal. Mais l’employeur chilien pense toujours que nous sommes ses esclaves, de façon élégante, car il n’assumerait jamais le fond de sa pensée. » (…)

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Le Chili passe à la semaine de 40 heures, « ça fait partie de cette idée que tout ne tourne pas autour du travail » (Flora Genoux / Le Monde, article reservé aux abonné.e.s)

Gabriel Boric

La mesure, relancée par le président Gabriel Boric (gauche) a été approuvée à l’unanimité par le Sénat et par une ample majorité à la chambre basse.

« Que vaut une chanson [à son enfant] le soir ? Que vaut sortir marcher, respirer, après une journée de travail ? (…)  Que vaut passer du temps en famille ou seul, à réfléchir ? Cela n’entre sûrement pas dans les indices standardisés de productivité. » Depuis le palais présidentiel, le 23 août 2022, le président Gabriel Boric (gauche) relançait une mesure visant à réduire le temps de travail à 40 heures hebdomadaires, à salaire égal, contre 45 actuellement. Une promesse de campagne du plus jeune président de l’histoire du pays, 37 ans actuellement, ouvrant la voie à ce changement culturel au Chili : le travail ne doit pas être l’unique gouvernail d’une vie.

Mardi 11 avril, les députés ont adopté la modification du temps de travail, à une large majorité, après une adoption à l’unanimité par le Sénat, le 21 mars. Le fruit d’un dialogue et d’une coopération rares entre les partis, tandis que le Congrès est régulièrement le théâtre de tensions, se soldant parfois par des revers pour le gouvernement, à l’instar du rejet de sa réforme fiscale, le 8 mars. Ce sont au total près de 5 millions de travailleurs, du secteur privé, qui sont concernés. Les employés du secteur public, pour qui régissent les 44 heures hebdomadaires, doivent faire l’objet d’un projet de loi à part. Quant aux 27 % de travailleurs évoluant dans l’informalité, ils demeurent logiquement dans un angle mort.

Le texte n’était pas nouveau. Il avait été présenté pour la première fois au Parlement en 2017, à l’initiative de Camila Vallejo, porte-parole du gouvernement, et de la députée (Parti communiste) Karol Cariola. Mais sa discussion n’avait pas abouti, se heurtant à l’opposition des parlementaires de droite.

Profond processus de dialogue social

La nouvelle mouture introduit notamment la notion de gradualité, avec une semaine de 44 heures la première année, 42 heures la troisième et 40 heures la cinquième année. Un ensemble de professions bénéficie d’une application souple. Les chauffeurs routiers par exemple, peuvent travailler davantage mais compensent les heures additionnelles par des jours de récupération pendant l’année. En outre, la loi permet une concentration des heures de travail, selon un schéma de quatre jours travaillés pour trois jours de repos. (…)

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