Lettre ouverte aux autorités chiliennes
Lors du Forum Alternatif Mondial de l’Eau qui s’est tenu à Marseille en mars 2012, le Docteur Andrei Tchernitchin, membre du Collège des Médecins Chiliens, avait présenté un rapport d’analyse indépendant attestant de la contamination de l’eau de la localité de Caimanes, commune de Los Vilos Province de Choapa, par des métaux lourds présentant des risques certains pour la santé humaine.
Au mois de septembre 2012, la Police d’Investigation Chilienne a rendu public un autre rapport, confirmant la contamination des sources d’eau de Caimanes par des métaux lourds tels que le manganèse, le cadmium, le mercure, le zinc, entre autres. A la suite de cela, le Comité de gestion de l’eau potable de Caimanes -constitué par les habitants- a décidé par vote la suspension de la distribution de l’eau dans la localité.
À notre énorme surprise, nous avons appris que le SEREMI -Secrétariat Régional du Ministère de la Santé- a contredit ces analyses, déclarant l’eau de Caimanes parfaitement saine et apte à la consommation humaine et exigeant le rétablissement de la distribution de l’eau malgré le danger pour la santé des habitants.
Face à cette attitude autoritaire, en tant qu’associations organisatrices du Forum Alternatif Mondial de l’Eau, nous tenons à exprimer notre plus vive inquiétude. Nous tenons à rappeler que « le droit à l’eau potable et à l’assainissement est un droit de l’homme, essentiel à la pleine jouissance de la vie et à l’exercice de tous les droits de l’homme » reconnu par l’ONU le 28 juillet 2010, et que les Etats doivent veiller à ce que soit garanti à leurs populations un accès à une eau saine. Son non-respect implique une violation des droits de l’homme de la part de l’État, ce qui constitue un délit imprescriptible.
Nous rappelons que depuis l’installation du réservoir de déchets miniers du Mauro à 8 kilomètres du village, un assèchement visible de l’ensemble des cours d’eau alimentant le village a été constaté. La dangerosité de cet immense bassin contenant des métaux hautement toxiques a été dénoncée maintes fois par les habitants aux autorités sans qu’ils soient entendus.
Aujourd’hui, dès lors que la contamination de l’eau a été reconnue par des analyses scientifiques indépendantes, il est indispensable de prendre la mesure de ces expertises et d’intervenir immédiatement pour garantir à la population la distribution d’une eau sûre. Deux mille habitants, dont des nombreux enfants, continuent de consommer une eau qui a été reconnue comme étant contaminée. L’absence de réaction des autorités nous semble assimilable à une non-assistance à personne en danger et nous oblige à réagir en tant qu’organisations signataires de la Déclaration finale du Forum Alternatif Mondial de l’Eau.
Nous demandons que soient sérieusement pris en compte les rapports d’analyse scientifiques établis précédemment. La déclaration de l’autorité du Secrétariat Régional du Ministère de la Santé ne peut annuler des analyses détaillées validées par le Collège des Médecins et des spécialistes de l’environnement de la PDI, dépendante de l’Etat. Nous demandons à ce que des mesures soient prises de façon immédiate pour garantir la santé des personnes vivant à Caimanes. Dans le cas contraire les pouvoirs publics seraient responsables de ne pas avoir protégé la vie des habitants.
Nous demandons par ailleurs à ce que cesse immédiatement toute poursuite contre le dirigeant de Caimanes et les avocats défendant le village dont le seul délit à été dénoncer la contamination de l’eau, la perte d’accès à l’eau et les dommages du patrimoine naturelle et archéologique produits par La Mine Los Pelambres, propriété de la famille Luksic. L’accusation d’association illicite, de désordre public, de prévarication, est insoutenable dans ce cas où les supposés accusés ne font autre chose que défendre leurs droits, garantis par la Constitution. La défense des droits à vivre dans un environnement sain, non contaminé et à une qualité de vie digne ne peuvent faire l’objet de criminalisation.
Nous soutenons les demandes déposées par France Libertés et le MRAP auprès du Conseil des Droits de l’homme de l’ONU, dénonçant les atteintes aux Droits de l’homme ayant lieu à Caimanes.
Nous exprimons notre plus profonde solidarité aux habitants de Caimanes.