🇲🇽 Mexique : malgré l’envahissement du Sénat, la réforme du système judiciaire adoptée (L’Humanité)


Ses opposants auront tout tenté, jusqu’à envahir le Sénat mexicain, pour empêcher l’adoption de la réforme constitutionnelle du système judiciaire défendue par la gauche. Le texte a finalement été voté, mercredi 11 septembre, par les deux tiers des 127 sénateurs présents.

Un groupe de manifestants chante l’hymne national mexicain après s’être introduit dans le Sénat lors de l’examen de la réforme judiciaire du pays, le 10 septembre 2024. © Israel Fuguemann / SOPA Images / SPUS / ABACAPRESS.COM

Le sénat mexicain a adopté, mercredi 11 septembre, la réforme constitutionnelle du système judiciaire voulue par le président de gauche sortant Andrés Manuel Lopez Obrador. Pour en arriver là, il aura fallu, la veille, que la chambre déménage avec tous ses représentants après avoir été envahie par des manifestants. « Sénateurs, arrêtez le dictateur », « le pouvoir judiciaire ne tombera pas », ont scandé ceux qui parmi eux sont parvenus jusqu’à l’hémicycle, drapeaux mexicains à la main.

Après avoir franchi les barrières de sécurité, les fonctionnaires judiciaires en grève et les étudiants en droit mobilisé ont obligé le président du Sénat Gerardo Fernandez Noroña, appartenant à la majorité présidentielle, à ajourner la session. Ce dernier a, peu après, annoncé qu’elle serait délocalisée dans l’ancien siège du Sénat, tout en promettant qu’« il y aura une réforme du pouvoir judiciaire ». Les débats ont repris dans la soirée dans la nouvelle enceinte, aux alentours de laquelle se sont également déplacés les protestataires qui avaient déjà bloqué la Chambre basse lors de l’adoption de la réforme par les députés.

Le texte – adopté par 86 voix pour, soit les deux tiers des 127 sénateurs présents à la chambre haute et 41 voix contre, émanant des partis d’opposition, – fait partie de la vingtaine de réformes constitutionnelles que le président sortant Amlo laisse en héritage à sa successeure Claudia Sheinbaum.

Son objectif : tourner la page de l’actuel système judiciaire fédéral, gangrené par la corruption, les privilèges, le népotisme et le clientélisme. Pour y parvenir, la gauche souhaite donner la possibilité aux citoyens d’élire directement les ministres de la Cour suprême de justice, ainsi que de tous les magistrats, juges et membres du Conseil de la magistrature fédérale.

Tous seront désormais soumis à des élections populaires échelonnées : en 2025, les ministres de la Cour suprême et la moitié des juges de district et des magistrats seraient élus, et l’autre moitié serait élue en 2027. C’est donc bien d’une démocratisation de l’élection des autorités judiciaires qu’il s’agit – loin des supposées velléités “dictatoriales” prêtées à l’exécutif par la droite – autant dire un changement radical du fonctionnement actuel du pouvoir judiciaire au niveau fédéral. 

La réforme cherche aussi à réduire leurs salaires (un ministre de la Cour suprême perçoit actuellement un traitement de près de 13 000 euros par mois nets, soit le double du président de la République et 37 fois plus que le salaire minimum obligatoire) et la durée de leur mandat. Pour les députés de Morena, il ne s’agit ni plus ni moins que de « démanteler l’aristocratie judiciaire », tout en donnant aux citoyens la mission participative d’élire des autorités qui ont la capacité de bloquer les projets approuvés par les pouvoirs législatifs et exécutifs.

Un pouvoir que les actuels ministres de la Cour suprême n’ont pas hésité à utiliser pour freiner les politiques d’Amlo durant son mandat, ou encore pour favoriser de grands groupes privés par exemple en matière de fiscalité. “La réforme vise l’indépendance et l’autonomie du pouvoir judiciaire, en séparant la fonction judiciaire du pouvoir politique et économique et en la protégeant des intérêts de fait ou criminels“, a déclaré la sénatrice Ernestina Godoy (Morena). “C’est une réforme historique“, a-t-elle ajouté en rappelant la nécessité de veiller à ce que la justice parvienne à chacun indépendamment de ses revenus ou de son influence politique, économique ou sociale. Au Mexique, les ONG calculent que plus de 90% des crimes restent impunis. (…)

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