Manifestations à Cuba (revue de presse)


Depuis le 11 juillet, l’île est secouée par des manifestations inédites contre le gouvernement. Revue de presse et premières analyses


Cuba. «Un cri de désespoir» (Leonardo Padura / À l’Encontre)

Le point de vue de Leonardo Padura, écrivain cubain vivant à Cuba, auteur de nombreux romans salués à l’échelle internationale.


Il semble très possible que tout ce qui s’est passé à Cuba depuis le dimanche 11 juillet dernier ait été encouragé par un nombre plus ou moins grand de personnes opposées au système, certaines d’entre elles étant même payées, dans l’intention de déstabiliser le pays et de provoquer une situation de chaos et d’insécurité. Il est également vrai que par la suite, comme cela se produit habituellement dans ce genre d’événements, des actes de vandalisme opportunistes et déplorables ont eu lieu.

Mais je pense que ni l’une ni l’autre de ces évidences n’enlève une once de raison au cri que nous avons entendu. Un cri qui est aussi le résultat du désespoir d’une société qui traverse non seulement une longue crise économique et une crise sanitaire momentanée, mais aussi une crise de confiance et une perte d’espérances. (…)

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Cuba : pourquoi la crise ? (Christophe Ventura / IRIS)


Interview de Janette Habel / France Info

“Les gens manquent de tout, la situation économique et sociale est absolument horrible”, a analysé lundi 12 juillet sur France Info Janette Habel, spécialiste de Cuba, tandis que des milliers de personnes ont manifesté sur l’île dimanche pour dénoncer notamment la situation économique désastreuse dans laquelle le pays est plongé. Selon cette maîtresse de conférences à l’Institut des Hautes Études d’Amérique latine (IHEAL), “la population n’en peut plus”. Selon elle, “le premier problème ce sont les sanctions”. Ainsi, Janette Habel juge “qu’avant tout autre chose, ce pays est victime depuis 62 ans de sanctions économiques absolument effarantes”.

Manifestation à La Havane, le 11 juillet 2021. (YAMIL LAGE / AFP)

France Info : Pourquoi les manifestations interviennent maintenant ? Quelle est la goutte qui a fait déborder le vase ?

Janette Habel : La goutte qui a fait déborder le vase, elle existe depuis des mois, même beaucoup plus. La situation est terrible. Ce qui est même étonnant, c’est que ça ne se produise que maintenant. Les gens manquent de tout, la situation économique et sociale est absolument horrible. Il y a des problèmes d’alimentation, de médicaments, une pandémie de Covid-19 qui sévit comme sur tout le reste du continent, ainsi que dans les Caraïbes et en Amérique centrale. Cela aggrave considérablement la situation, il n’y a plus de tourisme, alors que l’économie est fondée dessus.

Si vous faites le tour de la situation, il y a eu en plus un cyclone Elsa, qui en a rajouté dans le désastre. Donc, on a la pandémie, la perte des ressources dues à l’absence de tourisme, plus d’envoi d’argent, plus de voyages, plus de transactions en dollars parce que tout ça est lié aux mesures prises par Donald Trump. Mais aussi des mesures économiques prises par le gouvernement au début de l’année qui ont aggravé les inégalités et la pauvreté, des coupures de courant parce que le pétrole qui arrivait du Venezuela n’arrive quasiment plus.

Tout ça dans un contexte de hausse de température, donc vous imaginez ce qui se passe dans les maisons avec les climatisations et les frigidaires qui se décomposent. Les médicaments, les vaccins, le manque de seringue, pas de technologie pour réparer ce qui ne marche plus… Le mécontentement social monte, ce n’est pas étonnant. La population n’en peut plus.

Les Cubains n’ont plus peur ?

Je pense qu’une partie de la population n’a pas peur à Cuba, c’est un peuple rebelle avec des grandes traditions. Le “je n’ai plus peur” doit concerner une petite partie de la population, mais je ne suis pas sûre que ce soit le sentiment général. Le sentiment majoritaire est que les gens veulent que ça change, ils protestent contre la politique menée par le gouvernement, dont ils ne savent pas très bien où elle va. Le gouvernement n’a pas caché les difficultés. Il a appelé ses partisans à descendre dans la rue face aux autres, il y a eu des gaz lacrymogènes, des arrestations… Il n’y a pas encore eu d’affrontements, il faut espérer qu’il y en aura pas, et que le gouvernement aura l’intelligence de les éviter. (…)

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Cuba: après les manifestations inédites, le régime mobilise ses partisans (Domitille Piron / RFI)

À Cuba, le gouvernement a rassemblé massivement ses partisans ce samedi 17 juillet, suite aux manifestations inédites de la population dimanche dernier.

Une femme tient un portrait du président cubain Miguel Diaz-Canel lors d'un acte de «réaffirmation révolutionnaire»  à La Havane, le 17 juillet 2021.
Photo : AFP – YAMIL LAGE

Un rassemblement auquel le dirigeant historique, Raul Castro, a participé. Il est pourtant parti en retraite il y a 3 mois, c’est dire la gravité de la situation sur l’île. Des dizaines de milliers de personnes ont donc été réunies sur le front de mer de La Havane avec pour consigne de défendre la révolution cubaine. Des Cubains par centaines ont été amenés en bus des quatre coins de la capitale sur le Malecón. Des étudiants et fonctionnaires comme Osiris, réunis pour dénoncer et rejeter les manifestations populaires hostiles au gouvernement de dimanche dernier : « Ce qui s’est passé ce sont des actes de vandalisme organisés par les États-Unis pour déstabiliser le pays alors qu’ici nous vivons dans la tranquillité citoyenne depuis toujours ! »

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À Cuba, sur quoi peut déboucher le plus grand soulèvement populaire depuis 1994 ? (entretien avec Christophe Ventura / Eva Massy, Ouest France)

« Liberté » et « A bas la dictature », scandaient les Cubains, dimanche 11 juillet 2021, à La Havane, pendant les manifestations spontanées.
Photo : Reuters

Les plus grandes manifestations depuis 1994 ont eu lieu ce dimanche 11 juillet à Cuba. Des milliers de personnes sont descendues dans les rues, pour dénoncer la répression du régime communiste et sa gestion de la crise économique et de la pandémie de coronavirus. Le début d’un soulèvement populaire plus conséquent ? Réponses avec Christophe Ventura, spécialiste de l’Amérique Latine à l’Institut de Relations Internationales et Stratégiques (Iris).

Qu’est-ce qui a déclenché les mouvements inédits de protestation de dimanche à Cuba ?

C’est un mouvement qu’on voyait venir depuis un certain temps, aux multiples raisons. Cuba vit une situation économique et sociale très difficile, liée à l’embargo américain et à son durcissement sous l’ère Trump. Dès qu’il y a une crise comme celle que nous connaissons aujourd’hui, la vie quotidienne des Cubains, déjà précaire, se détériore. Ils passent des heures chaque jour pour chercher de la viande, font face à la pénurie d’aliments, de médicaments, et sont soumis à des coupures d’électricité récurrentes. Ce qui est inédit, ce n’est pas tellement qu’il y ait des manifestations, c’est le fait qu’elles aient lieu dans tout le pays, et pas simplement à La Havane. Cela montre que la patience et la résignation des Cubains sont en train de céder. Le gouvernement cubain mène depuis dix ans des réformes sans grands résultats pour la population.

Ce mouvement, d’une ampleur inédite, peut-il inquiéter le gouvernement cubain ?

Le problème c’est que le gouvernement cubain n’est pas en situation de pouvoir répondre aux demandes sociales. Le risque c’est que la crise s’amplifie, et qu’il y ait la tentation de l’autoritarisme. Mais ça ne suffira pas à calmer un mouvement dont les racines sont multiples et lointaines. D’autre part, ​personne n’a intérêt aujourd’hui à ce qu’il y ait une crise politique ou un renversement du gouvernement cubain. Des masses de migrants partiraient, notamment aux États-Unis. Ceci explique aussi les commentaires relativement prudents de Washington sur la situation.

Comment se fait-il que ces mouvements spontanés aient émergé à plusieurs endroits simultanément ? Les réseaux sociaux ont-ils joué un rôle ?

Cuba est un pays très connecté, c’est un des paradoxes dans un pays à parti unique et autoritaire. Il y a un accès très large des jeunes aux réseaux sociaux, et c’est là que se jouent les mobilisations. L’opposition cubaine de Miami et les opposants à Cuba s’y rejoignent. Le gouvernement cubain a une approche très défensive sur les réseaux sociaux, en considérant que le pays est en permanence noyauté, infiltré par les États-Unis. Les autorités accusent la « mafia cubano-américaine », d’être à l’origine du soulèvement. Mais si l’accès à Internet continue d’être coupé, comme on l’a vu dimanche, les autorités risquent de perdre la bataille. Personne n’acceptera ça.

Si les mouvements de protestation continuent, la répression risque-t-elle de se faire plus violente ?

Je ne crois pas, parce que le gouvernement cubain sait parfaitement qu’il se trouve sous haute surveillance, et que les États-Unis chercheront en permanence à le discréditer. Contrairement à l’opinion qu’on en a, Cuba n’est pas un pays fermé, qui prétendrait à l’autarcie. C’est un pays très attentif à l’image qu’il renvoie, qui mise tout son avenir sur son ouverture au monde. Le gouvernement cherche à accueillir dans l’île des capitaux étrangers, des touristes (…)

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Dans la Grande Île asphyxiée par le blocus, la colère déborde (Rosa Moussaoui / L’Humanité)

Des manifestants sont descendus dans les rues de plusieurs dizaines de villes. Les sanctions américaines, la pandémie de Covid-19 et la crise économique se conjuguent pour le pire, dans un climat de tension guetté par Washington.

Le 11 juillet, à La Havane, des protestataires rassemblés devant le Capitole. Yamil Lage/AFP
Le 11 juillet, à La Havane, rassemblement devant le Capitole. Yamil Lage / AFP

C’est une secousse sérieuse. Sans doute la plus forte depuis le Maleconazo du 5 août 1994, lorsque les dures restrictions économiques de la « période spéciale », dans une île sous blocus états-unien, ayant perdu ses appuis soviétiques avec la chute du bloc de l’Est, avaient donné lieu, à La Havane, à de violentes émeutes. Dimanche, des marches ont réuni, aux cris de « Liberté ! », des milliers de Cubains excédés par les pénuries d’aliments, de médicaments, par les coupures d’électricité. Parti de San Antonio de los Baños, une petite ville à 25 km au sud-ouest de La Havane, où le premier rassemblement a été signalé, cet élan a gagné plusieurs dizaines d’autres villes, dont la capitale, au rythme des images répercutées sur les réseaux sociaux, de plus en plus fréquentés depuis l’arrivée de l’Internet mobile, fin 2018.

« Nous avons faim ! » 

Conséquence logique de la pire crise économique depuis trente ans : la crise sanitaire, la mise à l’arrêt du secteur touristique et le brutal durcissement des sanctions américaines par l’administration Trump se sont combinés pour le pire, entraînant, ces derniers mois, une dégradation terrible des conditions de vie de la population. « Nous avons faim ! » scandaient les protestataires, en défiant d’imposants déploiements militaires et policiers.

Les réformes économiques entrées en ­vigueur au début de l’année, dans le contexte le plus défavorable qui soit, avec une ­récession de 11 % en 2020, n’ont pas eu les effets escomptés. (…)

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Cuba, confrontée à des manifestations historiques, accuse Washington (France 24)

Lundi, le président cubain, Miguel Díaz-Canel, a imputé aux sanctions américaines, les difficultés économiques que rencontre le pays avec notamment des pénuries de médicaments et des pannes régulières d’électricité, à l’origine de manifestations inédites dans le pays depuis des décennies. 

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Cuba : la colère éclate dans les rues, les partisans du régime appelés à répliquer (Le Monde / AFP)

Des manifestants défilent pour protester contre le gouvernement, dans les rues de San Antonio de los Baños, à Cuba, le 11 juillet 2021.
Des manifestants défilent dans les rues de San Antonio de los Baños le 11 juillet 2021. 
YAMIL LAGE / AFP

Excédés par la crise économique, des milliers de Cubains ont manifesté, dimanche 11 juillet, à travers le pays, aux cris de « Liberté ! » et « À bas la dictature ! ». Face à ces manifestations historiques, le gouvernement cubain s’est dit prêt à défendre la révolution « coûte que coûte », tandis que Washington a mis en garde La Havane contre tout usage de la violence.

Pris par surprise par ce soulèvement qui a éclaté dans plusieurs villes du pays, dont la capitale, le président Miguel Diaz-Canel a appelé ses partisans à répliquer dans la rue. « L’ordre de combattre a été donné, dans la rue les révolutionnaires ! », a lancé, dans une allocution télévisée, le président, qui a accusé « la mafia cubano-américaine » d’être derrière ce soulèvement. « Nous appelons tous les révolutionnaires du pays, tous les communistes, à sortir dans les rues où vont se produire ces provocations, dès maintenant et les prochains jours. Et à les affronter de manière décidée, ferme et courageuse », a-t-il ajouté. « La révolution cubaine, nous la défendrons coûte que coûte ! », a clamé sur Twitter le vice-ministre des affaires étrangères, Gerardo Peñalver, en partageant une vidéo de partisans communistes défilant aux cris de « Je suis Fidel ! » tout en brandissant des drapeaux cubains. (…)

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