Mexique : assassinats, disparitions et actes de torture à Coahuila de Zaragoza constituent des crimes contre l’humanité

En collaboration avec plusieurs organisations mexicaines, la FIDH présente aujourd’hui une communication (rapport) au Procureur de la Cour pénale internationale (CPI), lui demandant instamment d’ouvrir un examen préliminaire sur les graves crimes commis dans l’État mexicain de Coahuila entre 2009 et 2016. Ce rapport porte sur une enquête et une analyse juridique diligentées par la FIDH avec le soutien de plus de 100 organisations mexicaines.

Source : FIDH, 07/07/2017

 

En collaboration avec plusieurs organisations mexicaines, la FIDH présente aujourd’hui une communication (rapport) au Procureur de la Cour pénale internationale (CPI), lui demandant instamment d’ouvrir un examen préliminaire sur les graves crimes commis dans l’État mexicain de Coahuila entre 2009 et 2016. Ce rapport porte sur une enquête et une analyse juridique diligentées par la FIDH avec le soutien de plus de 100 organisations mexicaines.

Le Mexique est le pays du continent américain où la situation est la plus critique : 200 000 assassinats et 32 000 disparitions en dix ans. Ce rapport fait état de façon détaillée des crimes contre l’humanité commis entre 2009 et 2016 dans l’État de Coahuila ciblant de manière systématique la population civile : privation grave de liberté physique, actes de torture et disparitions forcées.

Selon les organisations

« cette enquête fournit des preuves irréfutables, des témoignages et des résultats de recherche sur plus de 500 cas concrets, qui permettent d’affirmer qu’il s’agit bien de crimes contre l’humanité ».

Les crimes commis sur le territoire mexicain ou par des ressortissants mexicains relève de la compétence matérielle et temporelle de la CPI, puisque les États-Unis Mexicains ont ratifié le Statut de Rome le 28 octobre 2005. L’absence d’enquêtes menées au Mexique et la nature des délits enregistrés rendent inéluctable – malgré la réticence des autorités mexicaines – l’ouverture d’une enquête par la CPI.

Le rapport démontre qu’à Coahuila, nous ne sommes pas face à une situation de violence sporadique ou due uniquement aux cartels de la drogue. Il met en lumière l’existence d’une politique délibérée des autorités officielles de l’État de Coahuila visant à laisser commettre, voire à appuyer activement, les attaques contre la population civile. Toutes les informations analysées ont permis aux auteurs du rapport de conclure qu’entre 2009 et 2011/2012 les autorités de l’État de Coahuila responsables de la sécurité ont commis des crimes contre l’humanité de connivence avec le cartel de Los Zetas. Et qu’entre 2011/ 2012 et 2016, ces mêmes autorités ont commis des crimes contre l’humanité directement par le biais des forces spéciales.

La communication présentée à la CPI se base sur 500 cas de détention arbitraire, actes de torture et disparitions forcées et en particulier sur les dossiers de 73 victimes. Elle fait état de deux épisodes particulièrement violents qui en soi pourraient constituer des crimes contre l’humanité : 1) le massacre commis par les Zetas (organisation mexicaine liée au trafic de drogue et au terrorisme) de 60 à 300 habitants d’Allende en mars 2011. Certains faits laissent à penser que non seulement la municipalité, mais également le gouverneur de l’époque, étaient au courant de ce qui se préparait et que les Zetas ont bénéficié de la passivité, voire de la coopération des forces de sécurité. 2) la gestion de la prison de Piedras Negras, el CERESO, qui sous la responsabilité du gouvernement de l’État de Coahuila est devenue un centre d’opérations des Zetas entre 2008 et 2012. Les prisonniers pouvaient aller et venir à leur guise, se livrer à toutes sortes d’activités, notamment transformer et maquiller des véhicules, fabriquer des gilets pare-balles. Fait beaucoup plus grave, au moins 150 personnes y auraient été assassinées et leurs corps brûlés ou dissous dans des bains d’acide. Tout ceci n’aurait pas été possible sans la complicité de l’administration de la prison et de son autorité de tutelle.

Une fois que la CPI aura ouvert l’examen préliminaire et que l’existence de crimes contre l’humanité aura été reconnue, il reviendra à la CPI de déterminer si elle est compétente ou non pour traiter ce dossier et si les autorités mexicaines ont engagé ou vont engager des poursuites à l’encontre des auteurs ou des complices de crimes contre l’humanité, parmi lesquels figurent des hauts fonctionnaires et des personnes publiques.

 

Pour lire le rapport déposé par la FIDH à la Cour Pénale Internationale:

https://www.fidh.org/fr/regions/ameriques/mexique/mexique-assassinats-disparitions-et-actes-de-torture-a-coahuila-de