🇵🇪 Pérou. Des militaires condamnés pour viols quarante ans après les faits (Marc Thibodeau / La Presse)
Dix militaires ayant commis de nombreux viols dans une région du sud du Pérou où ils étaient déployés pour lutter contre la guérilla maoïste du Sentier lumineux ont été condamnés cette semaine pour crimes contre l’humanité, quarante ans après les faits.
Un tribunal péruvien a reconnu coupables de crimes contre l’humanité des soldats ayant commis une série de viols dans une région du sud du pays entre 1984 et 1994. De nombreux crimes sexuels ont été commis à l’époque par les forces de sécurité qui étaient engagées dans un conflit avec la guérilla maoïste du Sentier lumineux. Le verdict du tribunal marque un pas important dans la lutte contre l’impunité, mais risque de susciter de fortes résistances de l’élite conservatrice.
Le juge, Marco Angulo, a indiqué selon l’Associated Press que la condamnation visait à envoyer le message que « les droits fondamentaux des personnes doivent être respectés même dans les crises les plus graves que peut vivre la nation ».
Pascha Bueno-Hansen, une politologue de l’Université du Delaware ayant assisté à la collecte des témoignages de certaines victimes au milieu des années 2000, a indiqué vendredi que la décision était « historique » et créait un précédent susceptible d’avoir un large écho en Amérique latine.
Il s’agit d’abord, a-t-elle souligné, de la victoire d’un groupe de femmes « incroyablement courageuses » qui se sont battues pour obtenir justice et rompre l’impunité quasi complète dont les militaires du pays ont longtemps bénéficié en matière de crimes sexuels.
« Il a fallu vingt ans pour qu’elles parlent de ce qui leur était arrivé à l’extérieur de leur communauté et vingt ans de plus pour que les condamnations surviennent. Une des victimes est morte avant que le processus aboutisse », a noté Mme Bueno-Hansen.
Violence sexuelle « systémique »
Les victimes des viols, survenus entre 1984 et 1994, étaient des adolescentes d’origine autochtone vivant en milieu rural dans la région de Huancavelica, l’une des plus pauvres du Pérou. Plusieurs se sont retrouvées enceintes.
Une base militaire avait été installée au début de la période près des villes de Manta et de Vilca dans le cadre de la guerre menée contre le Sentier lumineux, qui a fait près de 70 000 victimes en vingt ans. Les militaires, chargés en théorie de protéger la population, arrêtaient régulièrement des résidents de la région pour les détenir et les torturer sous prétexte de déceler les sympathisants maoïstes et les faire parler.
Les femmes appréhendées dans ce contexte étaient souvent détenues en isolement et violées, parfois à répétition, sur des périodes de plusieurs jours. Des violences sexuelles survenaient également lors d’opérations militaires ponctuelles qui ont tourné à plusieurs reprises au massacre. (…)
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