Retour du FMI en Argentine : une violente sensation de déjà-vu (Elsa Broclain, Gilles Martinet, Raphaël Porcherot, Sylvain Pablo Rotelli/ Regards)

Cinquante milliards de dollars viennent d’être prêtés par le FMI à l’Argentine, sur demande de cette dernière. En échange, Buenos Aires annonce une cure d’austérité aux conséquences sociales et économiques pour le moins hasardeuses. Analyse.

Christine Lagarde (FMI) et Mauricio Macri (président d’Argentine)

Après un mois de pourparlers, le gouvernement argentin et le Fonds monétaire international (FMI) sont arrivés, ce vendredi 8 juin 2018, à un accord valable pour 36 mois prévoyant un prêt du FMI de 50 milliards de dollars, en contrepartie duquel l’Argentine s’engage à mettre en oeuvre une série de mesures visant principalement à limiter les dépenses de l’État. Ce recours au FMI a été envisagé en raison de l’effondrement du peso sur les marchés début mai, après plusieurs mois de forte baisse. Malgré la mise en scène par le gouvernement de Mauricio Macri d’une négociation serrée, il s’agit d’un accord sans grande surprise, s’inscrivant dans la lignée des Stand-By Arrangement (SBA). Créés en 1952, les SBA servent la diffusion des règles économiques promues par le FMI, notamment par le biais des “ajustements structurels”, c’est-à-dire du désengagement de l’État des services publics et de la limitation des politiques fiscales redistributives. Ces programmes sont accusés depuis longtemps de favoriser la déconstruction des structures publiques des États en développement pour mieux permettre l’extraversion de leurs économies. Ils ont finalement été réformés après la crise de 2008, mais seulement dans le sens d’une simplification des conditions d’emprunts. Malgré des prises de position en faveur de politiques de relance par le soutien de la demande et de certains investissements publics, la réduction de la dépense publique reste l’un des critères essentiels d’obtention des SBA. Loin de constituer un virage dans la politique économique de Mauricio Macri, cet accord avec le FMI cherche à légitimer ce que le gouvernement a déjà baptisé une politique “d’ajustement” (ajuste en espagnol). Il s’agit donc bien d’approfondir le sillon néolibéral suivi par le gouvernement depuis deux ans, ce qui ne laisse que peu d’espoir d’entrevoir un rétablissement de son économie, moins encore si l’on songe à l’histoire du FMI en Argentine.

Le FMI en terrain connu en Argentine

La terrible crise argentine de 2001 a couronné un demi-siècle de relations plus ou moins contraintes avec le FMI et a marqué l’échec de ses recommandations. Le premier accord fut signé en 1956, sous le gouvernement militaire de Pedro Eugenio Aramburu qui, un an plus tôt, avait destitué par les armes celui de Juan Domingo Perón. Par la suite, le besoin récurrent de devises dû au déficit structurel de la balance commerciale, le financement des déficits budgétaires et les investissements de développement ont été les principales causes de la croissance du stock de dette argentine. Pour assurer cet endettement, les accords avec le FMI se sont multipliés sur cinq décennies : on en compte vingt-huit, en incluant celui qui vient d’être signé. (….)

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