Venezuela : « Avoir en tête ce que veulent les Russes » (IRIS-La Marseillaise)

Interview réalisé par Angélique Schaller à Christophe Ventura – La Marseillaise

Miraflores palace. Source : Reuters

Où en est la gestion de l’épidémie aujourd’hui au Venezuela sachant que les États-Unis notamment avaient annoncé des conséquences cataclysmiques pour le pays ?

Le développement du Covid-19 au Venezuela intrigue les observateurs. Contrairement aux différentes annonces, force est de constater que l’épidémie est plutôt contenue si on se base sur les évaluations du gouvernement qui ne sont pas remises en cause à l’intérieur du pays ou de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Plusieurs éléments peuvent expliquer ce phénomène. Du fait des sanctions unilatérales qui pèsent sur le pays, de la part des Américains essentiellement mais aussi des Européens, le Venezuela est très peu connecté aux flux de marchandises et de personnes. Sa démographie est aussi avantageuse car c’est un pays très jeune et donc moins exposé aux formes graves de la maladie. Un autre élément peut être l’organisation sociale très forte, autour du chavisme, qui permet une chaîne de commandement plutôt efficace entre le gouvernement et les populations. Enfin, c’est un pays qui reçoit l’aide des Chinois et de Cuba qui apportent un filet de prévention sachant que le système de santé est très dégradé et que la pénurie de médicaments est une réalité depuis de nombreuses années. Autrement dit, la pression politique à laquelle est soumis le pays depuis plusieurs années qui oblige la population à vivre dans le repli et le manque a, peut-être, permis une réactivité plus forte, une gestion disciplinée de l’épidémie.

Quels retours avez-vous sur la situation politique actuelle ?

La situation met aux avant-postes la gestion gouvernementale. L’opposant Juan Guaido se retrouve assez isolé. D’autant que, avant l’arrivée du Covid-19, le gouvernement et une partie de l’opposition négociaient pour trouver une feuille de route minimale afin d’aboutir aux élections législatives qui doivent se dérouler avant la fin de l’année. Depuis, beaucoup de gens ont demandé la suspension du conflit politique. Y compris dans l’opposition avec notamment Henrique Caprilès, candidat contre Maduro en 2013. À l’opposé, Juan Guaido maintient des positions radicales, alignées sur Washington. D’où son isolement. Cependant, son vrai pouvoir n’est pas là. On sait désormais que sa force n’est pas dans les militants et la base sociale car il s’est « démonétisé » et a désormais beaucoup de mal à mobiliser. Son vrai pouvoir, c’est Washington et les appuis qui vont avec, c’est d’être montré comme l’autorité légitime à recevoir les aides internationales et les financements. C’est ce qui explique, par exemple, le rejet du prêt d’urgence demandé par Maduro au FMI. La situation est donc extrêmement compliquée.

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