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Amazonie : chronique d’un désastre annoncé

Officiellement, ce sont 3000 barils de pétrole, soit 480 m3 qui ont été déversés par les 2 ruptures
du pipeline Nord-péruvien les 25 janvier et 3 février 2016. En fait, c’est peut-être bien plus. Cela
représente un énorme potentiel contaminant, en particulier à cause de la dispersion du pétrole
après que les barrages flottants ont cédé suite à des pluies torrentielles. Il faut aussi souligner
l'attitude de la société Petroperú ; pendant les quinze premiers jours, l’incident a été minimisé
par la compagnie dont on ne peut que remarquer le manque d'investissement : près de 17 ans
sans entretien de l'oléoduc. Une autre conduite scandaleuse de la compagnie a été l’utilisation
d’habitants pauvres de la région pour recueillir le pétrole sans aucune protection, comme
l’avait fait l’entreprise Yanacocha à Choropampa pour le mercure. Rappelons également que ce
déversement n’est pas le premier, toujours pour les mêmes causes: manque de professionnalisme
et de préparation, technologie obsolète, mauvais entretien, standards insuffisants, tant en termes
de normes environnementales que de sécurité. Tout cela devrait suffire à envoyer en prison les
responsables de Petroperú. Pendant ce temps, les populations affectées dans l'Amazonie n'ont pas
accès à l'eau potable, respirent les émanations toxiques, ne peuvent ni cultiver leurs champs ni
consommer de poisson…

L’oléoduc Nord-péruvien. Le pipeline Nordpéruvien permet le transfert du pétrole extrait de l'Amazonie péruvienne vers le port de Bayoyar
dans le département de Piura, il mesure plus de 850 km de long, son diamètre est de 36 pouces (914 millimètres).

Les faits                                                  information ni protection.

Une première rupture de l’oléoduc Nord-péruvien a                        Les problèmes de maintenance
eu lieu près de Chiriaco (département de Amazonas)         Les organismes d’État OSINERGMIN (Organismo
au kilomètre 441 du parcours le 25 janvier. Le 27          Supervisor de la Inversión en Energía Y Minería)
janvier, Petroperú parle d’une simple avarie, due à un     et OEFA (Organismo de Evaluación y Fiscalización
déplacement de terrain. La seconde rupture a lieu le 3     Ambiental) mettront en évidence les manquements
février dans le département du Loreto au km 206.           de Petroperú en matière de maintenance des
Le 14 février, le président de Petroperú, Germán           installations et demanderont des sanctions financières
Velásquez, déclare à la télévision que l’accident est      contre la compagnie.
lié à un mouvement de terrain et non à un problème         En effet, entre 2011 et 2016, l’OEFA a relevé aux moins
de maintenance, que jamais la compagnie n’a utilisé        20 incidents sur la quasi-totalité du parcours, dont
d’enfants mineurs dans la récupération du pétrole, que     8 ont donné lieu à des fuites de pétrole. La dernière
l’oléoduc avait fait l’objet d’une inspection en 2014.     opération d’inspection globale daterait de 1999. Le 20
Toutes ces déclarations de Germán Velásquez seront         février, Germán Velásquez, annonce dans la presse que
ensuite démenties : des journalistes rencontreront des     le rapport d’inspection de 2014 avait été falsifié et que
enfants mineurs qui ont été payés 3 soles (moins d’un      des mesures seraient prises pour punir les coupables.
euro) par jour pour récupérer le pétrole sans aucune

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