🇧🇷 Brésil: des abattoirs et des éleveurs condamnés pour la déforestation d’une réserve protégée (Géraud Bosman-Delzons / RFI)


La justice de l’État de Rondonia les a rendus coupables d’avoir élevé et commercialisé du bétail dans la forêt tropicale de Jaci-Parana, désormais… transformée en pâturage. Des dizaines d’autres cas sont à l’instruction. Parmi les accusés, JBS, leader mondial de la transformation bovine.

Un troupeau pâture illégalement dans la réserve protégée de Jaci-Parana (État de Rondonia), le 12 juillet 2023. AP – André Penner

Une amende de 764 000 dollars pour préjudices environnementaux. C’est la peine écopée par trois éleveurs bovins et deux abattoirs, mercredi 4 septembre, rapporte l’agence de presse AP au Brésil ce vendredi 6 septembre. Les premiers pour avoir fait paître illégalement du bétail, les autres pour l’avoir acheté, tous étant liés à une même exploitation. Des documents de traçabilité, parfois fournis par les éleveurs eux-mêmes, prouvent que les animaux étaient transférés directement de leur zone d’élevage à l’abattage.

La zone d’élevage, Jaci-Parana, est théoriquement protégée, mais elle a été déforestée pour en faire un pâturage. « Il y a un lien incontestable entre les activités des entreprises et les dégâts environnementaux causés par l’exploitation illégale », a déclaré la juge Inês Moreira da Costa. La majeure partie de cette amende servira à restaurer environ 232 hectares de surface de bois. Les entreprises nient leur rôle dans cette déforestation et les cinq accusés peuvent encore faire appel du jugement.

Quelque 210 000 têtes sont élevées à Jaci-Parana, selon les chiffres de l’État, alors que la loi brésilienne interdit l’élevage commercial dans les réserves protégées. Avec 80% de sa surface déboisée depuis sa création en 1996, Jaci-Parana est la réserve la plus dévastée du pays, pour un préjudice total estimé à environ un milliard de dollars que l’État brésilien cherche en partie à recouvrer.

C’est l’une des premières fois qu’une telle sentence est prise au Brésil. Plusieurs dizaines d’autres poursuites ont déjà été lancées depuis décembre 2023. En juillet dernier, un éleveur de l’État d’Amazonas a été condamné à 50 millions de dollars d’amende par la justice fédérale. Il avait défriché son terrain à la tronçonneuse, puis allumé des feux pour ensuite planter de l’herbe pour son troupeau, en lieu et place de 5 600 ha de forêt. Il a été condamné à restaurer le précieux puits de carbone.

Dans les contentieux en cours au Rondonia, quatre abattoirs sont actuellement mis en cause. L’un d’entre eux appartient à JBS, un géant mondial du secteur de la transformation et du commerce de viande de bœuf, de volaille et de porc.

La multinationale, qui exporte dans plus d’une centaine de pays, est le premier acheteur de viande de la forêt amazonienne. Les sulfureux frères Batista, Wesley et Joesley, fils du fondateur de l’entreprise, avaient été écartés de la direction de l’entreprise en 2017, impliquée dans le tentaculaire scandale Petrobras. L’entreprise a admis en 2020 avoir versé 186 millions de dollars de pots-de-vin à près de 1 800 femmes et hommes politiques. Malgré ce passif, les Batista ont pu réintégrer le conseil d’administration le 26 avril dernier. (…)

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