🇦🇷 À Cannes, le cri du cœur des Argentins pour protéger leur cinéma face à Javier Milei (David Rich – France 24 / Pierre Barbancey – L’Humanité)


Sept films argentins sont projetés cette année à Cannes, dans un contexte d’inquiétude généralisée quant à l’avenir de ce cinéma parmi les plus prolifiques du continent sud-américain. Depuis son arrivée au pouvoir en décembre dernier, le président Javier Milei a déclaré la guerre à la culture et à l’industrie du septième art, en supprimant toutes les demandes d’aides publiques. Sur la Croisette, cinéastes et producteurs argentins tentent de faire entendre leur voix.

Rassemblement en soutien au cinema argentin, dimanche 19 juin, au Festival de Cannes. © David Rich

Premier festival de cinéma du monde, rassemblant stars hollywoodiennes et films internationaux jusqu’aux plus confidentiels, Cannes a un rôle de prescripteur dans cette industrie, comme l’a rappelé la trajectoire d'”Anatomie d’une chute” de Justice Triet, qui, après avoir décroché la Palme d’or 2023, s’est envolé à Los Angeles rafler l’Oscar du meilleur scénario.

La Mecque française du cinéma international est également une plateforme où l’art côtoie le militantisme, qu’il s’agisse du combat contre les violences sexistes, la dénonciation des conflits qui perdurent, ou bien encore la défense du cinéma face à la montée en puissance des géants du numérique. Mais il arrive également que le septième art soit menacé par les autorités, comme c’est le cas notamment en Argentine depuis l’élection de Javier Milei, en novembre 2023.

Dimanche 19 mai, une centaine de professionnels argentins ont organisé une manifestation à Cannes pour la défense du cinéma dans leur pays.

“Le gouvernement actuel s’est lancé dans une croisade contre la culture, la science et l’éducation. Il semble prendre plaisir à démanteler les industries culturelles” a dénoncé Clara Massot, productrice argentine, fustigeant une politique qui prive le pays “de son identité en attaquant une source vitale d’emploi pour des dizaines de milliers de familles”.

Chantre de la droite radicale – comparé à Trump et Bolsonaro pour son discours “anti-système” agressif – Javier Milei a mis en branle le “choc budgétaire”, promis lors de son discours d’investiture, pour sortir le pays de la grave crise économique qu’il traverse depuis plusieurs années. Une politique d’austérité à tous les étages, s’attaquant à l’éducation, supprimant de nombreuses aides sociales et subventions dans la culture et en particulier dans le domaine du cinéma.

Le nouveau dirigeant avait dans un premier temps annoncé la suppression des subventions attribuées par l’Institut national du film et des arts audiovisuels (INCAA) – l’équivalent du Centre national de la cinématographie (CNC) en France. Il a ensuite reculé face à la vague d’indignation et de manifestations suscitées par ce projet. Avant de revenir à la charge.

Le 11 mars dernier, le gouvernement a annoncé un plan drastique de réduction des dépenses publiques pour le cinéma : fin du financement des festivals, suppression des déplacements, non-renouvellement des contrats publics arrivant à échéance.

Les aides sont gelées et le secteur plonge dans l’incertitude. Exit les financements du plus grand festival de cinéma du pays, le Festival international du film de Mar del Plata, qui doit désormais se tourner vers des investisseurs privés au risque de disparaître. Idem pour l’École nationale d’expérimentation et de production cinématographiques (Enerc), dont on ne sait à l’heure actuelle si les cours pourront reprendre à la rentrée. Le marché du film et de la télévision Ventana Sur, partenaire de celui de Cannes, pourrait quant à lui migrer en Uruguay.

“Pour l’instant tout est bloqué, pendant encore au moins deux mois officiellement mais nous ne savons pas ce qu’il va se passer ensuite” s’inquiète le producteur Nicolas Avruj, l’un des organisateurs de la manifestation cannoise. “Nous sommes un punching-ball. Le but n’est pas de nous tuer mais de nous assoiffer”.

Si elle admet volontiers que la crise économique dans son pays est bien réelle, Clara Massot fustige le “faux remède” du gouvernement. “En France, le CNC a été créé au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, en pleine période de crise, alors qu’il n’y avait pas d’argent. Cet antagonisme que l’on nous vend, la culture ou l’économie, est un mensonge” insiste-t-elle. (…)

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À Cannes, la solidarité des cinéastes avec leurs homologues argentins (Pierre Barbancey / L’Humanité)

Sur la plage de la Quinzaine, des cinéastes du monde entier se sont retrouvés pour une expression unanime : ne touchez pas au cinéma d’Argentine !


Des cinéastes de toutes les sections du Festival de Cannes se sont retrouvés le 19 mai sur la plage de la Quinzaine des réalisateurs pour exprimer leur soutien au cinéma argentin. Une initiative qui fait suite à la tribune initiée par la Société des réalisatrices et réalisateurs de films (SRF). Il s’agissait notamment de dénoncer « les énormes coupes budgétaires et le plan de licenciements que subit l’Institut du cinéma et des arts audiovisuels (INCAA) (qui) mettent en danger une industrie qui fait vivre plus de 600 000 familles ».

Plus largement, comme il a été rappelé à Cannes, la question financière est l’arbre qui cache la forêt d’une extrême droite politique aujourd’hui au pouvoir et qui tend à vouloir faire disparaître un cinéma connu pour sa diversité et son importance démocratique dans un pays qui a longtemps connu la dictature. Personne n’est dupe. (…)

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