🇪🇺 Devoir de vigilance : les États européens adoptent un texte minoré (Stéphane Guérard / L’Humanité)


Les associations environnementalistes et pour les droits humains prennent acte de l’adoption par les vingt-sept États de l’UE des nouvelles obligations imposées aux grandes entreprises. Mais elles dénoncent l’intense lobbying patronal relayé par certains États, dont la France, pour affaiblir la directive.


La longue bataille en faveur de la responsabilisation des entreprises donneuses d’ordre vis-à-vis de leurs sous-traitants a connu une nouvelle étape ce vendredi 15 mars. Les Vingt-sept ont validé une législation imposant aux grandes sociétés de l’Union européenne un « devoir de vigilance », déclinant des obligations pour la protection de l’environnement et les droits humains (travail des enfants, travail forcé, respect des législations du travail locales…) dans leurs chaînes de production, mais avec un champ d’application plus réduit que prévu.

Pour les syndicats comme pour les ONG qui portaient ce combat depuis l’effondrement en avril 2013 du Rana Plaza sur plus de 1100 ouvriers du textile au Bangladesh, cette avancée aurait pu être plus marquante si des intérêts puissants n’avaient pas dénaturé les mesures prises.

« Si l’accord trouvé aujourd’hui doit être salué, plusieurs modifications opérées au dernier instant pour satisfaire les Etats-membres récalcitrants sont néanmoins à déplorer », relève ainsi Notre Affaire à tous, dans un communiqué. Le collectif prend date : « Ce vote, qui n’est qu’un premier pas dans la bonne direction, démontre que rien n’est jamais acquis en matière de protection des droits humains et de l’environnement. Le texte validé aujourd’hui par les États membres au Conseil doit encore être voté au Parlement européen avant son adoption finale. »

“La directive, qui doit encore être approuvée par le Parlement européen, sera un compromis dilué, qui n’a été atteint qu’au terme d’un processus frustrant qui a gravement entamé la crédibilité du processus législatif de l’Union européenne”, estime de son côté le label de commerce équitable Fair Trade Max Havelaar France. Malgré ces lacunes, après des semaines d’incertitude et face à l’urgence, un vote en faveur du compromis est un meilleur résultat qu’une absence d’accord.”

Quant à l’ONG Global Witness elle affiche son “soulagement” mais déplore que “cette législation ne soit que l’ombre de ce qu’elle aurait dû être, car elle ne s’appliquera qu’à une fraction des entreprises”.

Initialement, le projet de législation européenne prévoyait d’assujettir aux nouvelles obligations sociales (travail des enfants, travail forcé, sécurité…) et environnementaux (déforestation, pollution…) les entreprises de plus de 500 salariés et disposant d’un chiffre d’affaires de 150 millions d’euros au devoir de vigilance, ainsi que celles dès 250 employés si leurs ventes dépassent 40 millions d’euros et proviennent pour moitié de secteurs à risque (textile, agriculture, minerais…).

Au final, ces seuils augmentent si bien que seules seront concernées les entreprises de plus de 1 000 salariés et comptant un chiffre d’affaires de 450 millions d’euros. Quant aux dispositions sectorielles, elles ont disparu. Deux tiers des entreprises concernées au départ passeront au travers du filet. (…)

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Voir également :
Directive européenne sur le devoir de vigilance : les États membres entérinent un accord politique (FIDH)
Devoir de vigilance européen : les États membres adoptent un texte ressuscité grâce à la mobilisation, mais affaibli par les lobbies (CCFD)
Un devoir de vigilance européen très affaibli voté in extremis au Conseil européen (Novethic)


Pour rappel, voir des articles plus anciens sur ce sujet ici