Haïti La fronde sociale continue (Frédéric Thomas, Léo Ruffieux / Centre Tricontinental)

Les mobilisations se succèdent depuis la mi-août pour dénoncer l’incurie du gouvernement et exiger le départ du président, Jovenel Moïse, sur fond de crise sociale.

Depuis la mi-août, « la perle des Antilles » poursuit sa descente aux enfers. Le ras-le-bol social, les fortes mobilisations et la répression policière plongent les rues haïtiennes dans le chaos, allant jusqu’à bloquer toutes les activités du pays. Refusant l’appel à la trêve du chef de l’État, le 27 septembre dernier, des milliers de manifestants ont envahi la capitale, Port-au-Prince, et les principales villes de province pour exiger le départ du président Jovenel Moïse, au pouvoir depuis 2016.

Frédéric Thomas, politologue spécialiste d’Haïti, chargé d’études au Centre tri-continental (CETRI) à Louvain-la-Neuve (Belgique) et auteur de l’ouvrage L’échec humanitaire – Le cas haïtien, fait le point sur la situation.

Haïti est à nouveau frappée par des émeutes. Quelles en sont les causes profondes ?

Frédéric Thomas : La raison principale est à trouver dans l’incurie du gouvernement face à la dégradation des indicateurs sociaux, dans un pays où le taux de pauvreté est de 60%. L’économie nationale connaît aussi une série de contraintes structurelles : pénurie de pétrole, dépendance aux importations, dévaluation de la monnaie nationale, et inflation (aujourd’hui à 18%). D’autres raisons sont plus politiques. Telles l’absence de légitimité démocratique – Jovenel Moïse a été élu par moins de 20% des électeurs – et la corruption du pouvoir.

Quelles sont les raisons immédiates de cette nouvelle révolte sociale ?


La pénurie d’essence et la montée de l’inflation qui en résulte depuis la mi-août expliquent la résurgence de la fronde sociale. Une situation d’autant plus inadmissible aux yeux de la population que le scandale Petrocaribe [1] révélait en février le détournement de trois milliards de dollars par le président et son entourage au détriment du financement de programmes sociaux urgents. La deuxième raison immédiate est l’exaspération devant les cas de corruption révélés à la mi-septembre touchant l’homme d’affaire Fritz William Michel, pourtant appelé à devenir le prochain premier ministre [2]. S’il est élu, il serait le quatrième chef de gouvernement à exercer ses fonctions en l’espace de deux ans et demi !

Quelles sont les revendications des manifestants ?

Les protestataires exigent la démission de Jovenel Moïse, l’installation d’un gouvernement de transition et une enquête indépendante approfondie au sujet des allégations du scandale de Petro-caribe. L’objectif ? Réaffirmer la souveraineté nationale, du peuple et des ins-titutions, en luttant contre les politiques de privatisation. L’opposition vise à terme la refondation de l’ensemble du modèle de développement, aujourd’hui trop orienté vers les exportations (…)

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À lire également: un entretien de Frédéric Thomas avec Pascale Solages, activiste haïtienne féministe, au cœur du mouvement. Haïti : « C’en est assez ! Il faut une rupture avec cette classe dominante qui est dans le mépris total » (…)

(…) Lire l’article sur le site de Bastamag

Mise à jour. Lire ici le communiqué publié le 15 octobre par France Amérique Latine