L’itinéraire français d’un tortionnaire argentin, (Robin D’Angelo , Lucas Chedeville , Caroline Varon / Streetpress)

Enquête sur Mario Sandoval et autres sud-américains installés en Europe et accusés d’avoir commis des crimes contre l’Humanité pendant les dictatures militaires.

Beatriz Cantarini de Abriata, mère de Hernán Abriata, devant l’ambassade de France à Buenos Aires, le 9 avril 2014.
DANIEL GARCIA/AFP

StreetPress s’est associé au média d’investigation espagnol El Salto et au quotidien italien La Repubblica pour enquêter sur ces sud-américains installés en Europe et accusés d’avoir commis des crimes contre l’Humanité pendant les dictatures militaires. Un projet soutenu par la fondation Euractiv.

Article 1 : Mario Sandoval, un ex des escadrons de la mort à la Sorbonne

Mario Sandoval a fait carrière pendant 34 ans dans les institutions françaises avant que son passé ne le rattrape. StreetPress retrace l’itinéraire de cet ex-policier, membre des escadrons de la mort argentins pendant la dictature militaire.

Mario Sandoval ouvre la porte de son appartement cossu de Nogent-sur-Marne à la première sommation. Le 11 décembre 2019, dix gendarmes en tenue d’intervention, dont six du GIGN, viennent cueillir le Franco-Argentin de 66 ans. Cela fait un mois qu’il est sous discrète surveillance. Le dispositif est léger car la justice estime que les risques de fuites sont faibles. Depuis le début de la matinée, le colonel Eric Emeraux a positionné ses hommes autour du bel immeuble qui borde le bois de Vincennes. À 14 heures, un appel du procureur général. Le Conseil d’État vient de valider l’extradition. Emeraux et ses hommes grimpent au premier étage de l’immeuble, armes à la main, et toquent à la porte de l’appartement. Pas besoin d’utiliser le bélier. « Il y avait une forme d’abattement sur le visage de Sandoval quand il nous a vu arriver, décrit le colonel Eric Emeraux, retraité depuis août dernier de l’Office central français de lutte contre les crimes contre l’humanité (OCLCH). Je pense qu’il savait que c’était fini. »

Cinq jours plus tard, le 16 décembre, Sandoval est filmé par la télévision argentine à l’aéroport de Buenos Aires, menotté et le visage fermé, sous bonne garde de la Police Fédérale. L’ancien policier va enfin répondre à une accusation de crime commis pendant la dictature militaire. La fin d’une imposture qui dure depuis 34 ans, entre la France et l’Argentine. (…)

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Article 2 : Mario Sandoval, l’ami français des milices latino-américaines

Des paramilitaires en Colombie aux nostalgiques de Pinochet, Mario Sandoval met ses réseaux au service de l’extrême droite sud-américaine. Mais travaille-t-il pour la diplomatie française, comme il le prétend ?

Le 23 juillet 2001, à Santa Fé de Ralito, un hameau perdu dans la campagne colombienne. Dans un ranch, une soixantaine d’invités prend place sur des chaises en plastique, face à une estrade. Il y a l’électricité, des tables en bois et les téléphones mobiles captent, une chose impensable dans cette région rurale. La réunion est un peu particulière. Elle regroupe des chefs paramilitaires, des hommes politiques et des entrepreneurs. En toute clandestinité.

À cette époque, la Colombie est ravagée par la guerre civile. Elle oppose les Farc – une guérilla d’inspiration marxiste – à l’armée régulière, suppléée clandestinement par des milices anti-communistes. Le pays devient le terrain de jeu de l’extrême droite latino-américaine qui se presse aux côtés des Autodéfenses Unies de Colombie (AUC), la principale organisation paramilitaire. Comme dans l’Argentine de Videla, il s’agit d’exterminer « les subversifs ». Des journalistes de gauche, des militants des droits humains, des hommes politiques… Et surtout des paysans, massacrés par centaine s’ils ne prêtent pas allégeance.

À Ralito, cinq chefs des AUC, parmi lesquels Salvatore Mancuso, le dirigeant de la milice, ont convié leurs soutiens politiques afin d’élaborer une stratégie pour « refonder la patrie ». Parmi eux, Mario Sandoval. Devant l’auditoire, il donne une conférence de deux heures, où son titre de « professeur de la Sorbonne » fait son effet. « À cette époque, l’objectif des AUC étaient d’être reconnus comme un mouvement politique légitime, et non plus comme des terroristes, précise, sous couvert d’anonymat, un participant à la réunion clandestine. Sandoval nous indiquait les forces politiques en présence en Europe, et les mouvements vers lesquels nous pourrions nous tourner pour trouver des appuis. » Comment a-t-il atterri ici ? (…)

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