Les quatre enjeux clés de la COP 27 (Reporterre) / Faut-il continuer à organiser des sommets internationaux pour le climat ? (Huffington Post)


La COP27 s’est ouverte dimanche 6 novembre en Égypte. Réduction des émissions de CO2, financement des dégâts irréversibles du changement climatique… Reporterre fait le point des enjeux de cette conférence sur le climat.

Voilà six ans que les conférences des parties (COP) sur le climat n’avaient pas quitté l’Europe. La COP27, du 6 au 18 novembre, aura cette fois lieu à Charm-El-Cheikh, en Égypte, sur le continent africain. Objectif : discuter des moyens à déployer pour lutter contre le réchauffement climatique et vérifier leur mise en œuvre. L’événement s’ouvre dans un contexte géopolitique tendu. À cause de la guerre en Ukraine, les réseaux d’approvisionnement en énergie se redessinent et la sécurité alimentaire est menacée. Les catastrophes climatiques, elles, se succèdent : vague de chaleur et feux de forêt en Europe, canicule record en Indeinondations dévastatrices au Pakistan ou au Nigéria, sécheresses intenses dans l’est de l’Afrique ou encore ouragan aux États-Unis.

Après une COP26 focalisée sur l’atténuation (la réduction des émissions de gaz à effet de serre), ce nouveau rendez-vous se concentrera sur l’adaptation au changement climatique, ainsi que sur la justice climatique. Pour cela, les négociateurs pourront s’appuyer sur les deux derniers volets du rapport du Giec, parus en début d’année [1]. Quels sont les principaux enjeux de ce sommet mondial ? Les voici.

1 – Les engagements budgétaires des pays riches au cœur des débats

Avec une présidence africaine, la justice climatique sera au cœur des débats. Car si les pays du G20 sont responsables de 80 % des émissions mondiales, ce sont bien les pays les plus pauvres (et notamment africains) qui en paient le plus lourd tribut. En 2009, les pays développés se sont engagés à mobiliser chaque année 100 milliards de dollars à partir de 2020 pour aider les pays en développement à faire face au changement climatique. Seuls 83,3 milliards de dollars ont été versés en 2020. Le Pacte de Glasgow de la COP26 a repoussé l’échéance pour le versement des 100 milliards de dollars à 2023. Il s’agira de veiller à la crédibilité de cette promesse lors de la COP27.

De plus, selon un rapport d’Oxfam, 70 % des financements publics versés seraient en réalité des prêts, davantage destinés aux pays à revenus moyens qu’aux plus pauvres. « Se targuer d’une solidarité envers les pays les plus vulnérables au changement climatique alors que l’on fournit des montants largement insuffisants et que l’on contribue à leur endettement est injuste et contribue à saper la coopération internationale en matière climatique », a fustigé Guillaume Compain, charge de campagne climat et énergie pour Oxfam. Conséquence : les pays pauvres s’évertuent à rembourser leur dette au lieu d’agir pour leur transition écologique.

2 – Le financement des « pertes et préjudices »

Terres submergées ou devenues trop arides… Certaines conséquences du changement climatique sont irréversibles. L’adaptation ou l’atténuation de la crise n’y fera rien. Les pays en développement souhaitent donc que ce qu’on appelle les « pertes et préjudices » soient compensés par des financements spécifiques.

Les pays industrialisés — États-Unis et France en tête — ont toujours refusé. Mais John Kerry, l’envoyé spécial pour le climat du président étasunien, a affirmé être prêt à discuter — et l’Europe pourrait suivre. D’autant que lors de la COP26, l’Écosse et la Wallonie se sont engagées à verser un million d’euros aux pays les plus vulnérables pour faire face aux pertes et préjudices. En septembre, le Danemark a, lui, promis 100 millions de couronnes (environ 13,4 millions d’euros) d’aide climatique.

Quels mécanismes financiers adopter ? Certains États plaident pour la création d’un Fonds dédié, complémentaire à l’aide au développement ou à l’aide humanitaire. Le secrétaire général de l’ONU António Guterres a quant à lui appelé à taxer des superprofits des industries des énergies fossiles. L’idée d’une réforme plus globale du système financier sera aussi sur la table. (…)

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Cop 27 en Égypte : faut-il continuer à organiser des sommets internationaux pour le climat ? (Pauline Brault / Huffington Post)

Manque d’ambition, promesses non tenues, « greenwashing » : les COP apparaissent de plus en plus en décalage avec l’état des connaissances scientifiques sur le climat.

Photo d’illustration : manifestation de militants pour le climat à Tel Aviv, le 29 octobre 2021, avant la COP 26 (Jack Guez / AFP)

La COP 27 en Égypte, « c’est surréaliste ». Amy Dahan, directrice de recherche émérite au CNRS ne se rendra pas à Charm El-Cheikh pour assister à la 27e conférence des parties (Cop) qui débute ce dimanche 6 novembre. « Aller dans ce ghetto à touristes de Charm El-Cheikh, sous conditions très strictes de sécurité, dans le contexte géopolitique actuel, me paraît aussi surréaliste que la Coupe du Monde au Qatar ou les Jeux asiatiques d’hiver programmés en Arabie saoudite », explique la chercheuse au HuffPost.

Coauteure avec Stefan C. Aykut de Gouverner le Climat ? 20 ans de négociations climatiques, elle affirme « qu’à cette COP en particulier, il ne se passera rien ». Car tel qu’il est, le processus des Cop ne fonctionne pas vraiment. Selon elle, « on se donne des objectifs de baisse d’émissions à long terme, à 2050-2060, mais finalement on ne parle jamais des moyens à mettre en œuvre pour faire baisser les émissions : évolution des bouquets énergétiques, sortie des (énergies) fossiles, problèmes technologiques… »

L’objectif de l’Accord de Paris s’éloigne chaque année un peu plus

« Seule la COP 21 a été notable », poursuit Amy Dahan. Ce sommet, qui s’est déroulé en France en 2015, a accouché de l’Accord de Paris sur le climat entérinant l’objectif de ne pas dépasser +1,5 °C, maximum + 2 °C, de réchauffement d’ici la fin du siècle, par rapport à l’ère préindustrielle (1850-1900). Pour y arriver, les États soumettent une contribution nationale révisée tous les cinq ans, c’est-à-dire l’effort qu’ils sont prêts à engager pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre.

Seulement, « les contributions des États ne nous mènent toujours pas sur la trajectoire de l’Accord de Paris, mais vers une trajectoire vers + 2,7 – 2,8 °C d’ici à la fin du siècle », nous indique Sandrine Maljean-Dubois, directrice de recherche au CNRS à Aix-Marseille Université. « Le vice de l’Accord de Paris c’est qu’il laisse les États fixer leur contribution et juger par eux-mêmes si elle est ou non assez ambitieuse et équitable », analyse encore la juriste spécialiste des négociations climatiques. L’examen scientifique est sans appel, pour maintenir le réchauffement à +1,5 °C, il faudrait que tous les pays réunis réduisent leurs émissions de 45 % d’ici 2030. Or, les contributions révisées des États permettent, à ce jour, seulement de diminuer les émissions de 5 à 10 % d’ici à 2030.

Le manque d’ambition des politiques climatiques est flagrant, et rend chaque année « l’objectif de l’Accord de Paris de plus en plus inatteignable », estime Sandrine Maljean-Dubois. Tout en jugeant que les COP ne sont pas pour autant inutiles, « car, sans le régime international, on se dirigerait vers une trajectoire à + 4 voire +5 °C d’ici la fin du siècle ». (…)

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